Ac 5,
12-16 ; Ps 117 ; Ap 1, 9-11a.12-13.17-19 ; Jn 20, 19-31
Chers
frères et sœurs,
Essayons de comprendre ce qu’il s’est passé au
cénacle, tandis que les disciples étaient réunis et que Jésus s’est manifesté
au milieu d’eux.
Tout d’abord, il y a la vision. Le fait que
Jésus dise « la paix soit avec
vous » indique que les disciples étaient tout autant terrorisés par la
vision qu’émerveillés par elle. Il en va toujours ainsi lorsqu’un humain est
mis en présence de Dieu ou de son ange : stupeur et émerveillement. C’est
pourquoi, aussitôt, en présence de Dieu, comme par réflexe, l’homme se
prosterne, et il a besoin d’être relevé par Dieu ou son ange, qui lui dit
généralement : « N’aie pas
peur ». Ici Jésus dit : « la paix soit avec-vous ».
Pour nous rendre compte de la puissance de la
vision de Jésus ressuscité, nous pouvons nous reporter à celle que nous décrit
saint Jean dans l’Apocalypse, terme qui ne veut pas dire « fin du
monde » mais « Révélation ». Dans cette vision Jésus se révèle
donc, habillé comme le Grand Prêtre qui se trouve dans le Temple de Jérusalem,
illuminé par la lumière du chandelier à sept branches. Malheureusement il nous
manque la suite de la description de Jésus : « sa tête et ses cheveux étaient blancs comme la laine blanche, comme la
neige, et ses yeux comme une flamme ardente ; ses pieds semblaient d’un bronze
précieux affiné au creuset, et sa voix était comme la voix des grandes eaux ;
il avait dans la main droite sept étoiles ; de sa bouche sortait un glaive
acéré à deux tranchants. Son visage brillait comme brille le soleil dans sa
puissance ». On comprend qu’avec une telle vision, Jean dit :
« quand je le vis, je tombais à ses
pieds comme mort, mais il posa sur moi sa main droite, en disant : "Ne
crains pas" ».
Et c’est ce même Jésus, qui montre ses mains et
son côté à ses disciples. Ils le reconnaissent alors, et c’est à bon droit
qu’ils « furent remplis de joie ».
Maintenant, je voudrais souligner trois points.
Le premier est l’envoi en mission. Jésus est
venu prouver sa résurrection à ses disciples et les envoyer témoigner de cette
résurrection dans le monde, avec ses conséquences qui concernent tous les
hommes : tous les péchés sont pardonnés, et le ciel est ouvert à tous ceux
qui croient en Jésus. C’est ainsi que les apôtres ont reçu le pouvoir de
pardonner les péchés et de baptiser ceux qui sont devenus croyants, au nom du
Père et du Fils et du Saint Esprit.
Le deuxième point est le problème de saint
Thomas. Thomas, lors de la première apparition, n’était pas là. Et il ne croit
pas. Parce qu’il est exactement comme nous : il n’apprend la résurrection
de Jésus que par un témoignage extérieur, et il veut une preuve. Il lui faut la
marque des clous, la blessure du côté. Quelque chose d’indubitable, de
physique. Mais il ne s’y attend certainement pas quand Jésus vient pour la
seconde fois, huit jours plus tard. Non seulement Jésus rappelle à Thomas ses
paroles, mais il invite ce dernier à vérifier physiquement que c’est bien lui. Revenez
à la vision de saint Jean et imaginez-vous que ce Jésus si impressionnant vous
demande de le toucher. Impossible : car vous êtes complètement bouleversé,
et confondu. D’ailleurs Thomas ne sait plus quoi dire devant Jésus ; il ne
peut que balbutier « Mon Seigneur et
mon Dieu ».
Vous me direz, finalement, saint Thomas a eu de
la chance, Jésus lui est apparu physiquement et, du coup, il a pu croire au
témoignage des autres disciples. Et nous, nous n’avons pas eu cette apparition
physique de Jésus pour nous aider à croire. Oui mais nous, nous avons le
témoignage des œuvres de l’Esprit Saint, que saint Thomas ne pouvait pas encore
avoir.
Et quel est-il ce témoignage ? C’est mon
troisième et dernier point. L’Esprit Saint, qui a été donné aux Apôtres, et
après eux aux évêques et par eux aux prêtres et à tous les fidèles, ne fait
qu’une seule chose : il construit le corps du Christ ressuscité et le
vivifie. Cela veut dire que, dans notre monde, l’Esprit Saint ne fait qu’une
seule chose : il construit l’Église, qui est le corps du Christ, et la
fait vivre.
Et il la construit et la vivifie d’abord à
partir du corps et du sang de Jésus, l’eucharistie, à laquelle et pour laquelle
nous sommes réunis pour communier. Le premier corps, en quelque sorte, c’est
l’hostie. Le deuxième corps, c’est nous, l’Église-communauté. Le troisième
corps, c’est l’église de pierre, matière naturelle travaillée pour être
signifiante et belle, dans laquelle nous nous réunissons pour communier.
Et pour bien nous rappeler que tout part du
même Jésus ressuscité, dans la liturgie le prêtre s’habille comme lui : en
blanc ; l’église est comme un Temple de Jérusalem en réduction, avec le
chandelier à sept branches qui correspond aux bougies placées sur l’autel. Sept
allumées quand l’évêque est présent. Et dans ce temple, nous chantons le sanctus, le chant qui acclame Dieu, présent
au milieu des saints et des anges, trônant sur toute la création transformée et
illuminée.
La présence de Jésus ressuscité dans le monde,
l’œuvre de l’Esprit Saint : c’est l’eucharistie. Là est donnée la preuve
physique que, comme saint Thomas, le monde cherche pour croire.