jeudi 30 mai 2019

30 mai 2019 - CHARGEY-lès-GRAY - Ascension du Seigneur - Année C


Ac 1,1-11 ; Ps 46 ; Hb 9,24-28 ; 10,19-23 ; Lc 24,46-53

Chers frères et sœurs,

Nous fêtons aujourd’hui, quarante jours après Pâques, l’ascension de Jésus au ciel, près de son Père. Des questions se posent : quelle réalité ? Quelle signification pour Jésus et pour nous ?

Saint Luc dédicace son deuxième livre, les Actes des Apôtres, à un certain Théophile. Déjà, il avait dédié son premier livre – l’Évangile selon saint Luc – à ce même Théophile, qu’il avait qualifié d’« Excellent ». Il s’agit là d’un titre honorifique réservé, dans l’Antiquité, aux personnages importants. Beaucoup ont pensé que Théophile – qui veut dire « ami de Dieu » – était un nom symbolique, dans lequel tous pouvaient se reconnaître. C’est possible, mais les études montrent qu’il s’agit bien d’un véritable interlocuteur, probablement un personnage important qui habite à Antioche. S’il s’agit bien de lui, après sa conversion, il a offert sa maison pour qu’elle devienne la première église de la ville.

Chers frères et sœurs, si j’ai attiré votre attention sur Théophile c’est parce que le regard que nous portons sur le début des Actes des Apôtres est décisif : il commande tout le reste.

Si nous pensons que saint Luc a écrit un texte symbolique, alors on est porté à croire que l’ascension de Jésus est une fiction, qui voudrait simplement signifier que Jésus, après sa mort, est entré dans la gloire du ciel. Ceux qui suivent cette interprétation symbolique, très logiquement, ne croient pas aux apparitions. Et ils ne sont pas loin de penser que Jésus n’est pas vraiment ressuscité, en tous cas pas dans sa chair.
Au contraire, si nous considérons que saint Luc s’est adressé à un personnage réel, alors il n’a pas eu du tout intérêt à lui avoir raconté des fables, mais bien plutôt à lui avoir dit la vérité. Et dans ce cas, nous devons prendre les informations des Actes au sérieux : à savoir que c’est bien aux Apôtres que Jésus « s’est présenté vivant après sa Passion » ; et qu’« il leur en a donné bien des preuves, puisque, pendant quarante jours, il leur est apparu et leur a parlé du royaume de Dieu ». Il s’agit là de la foi des chrétiens qui est fondée sur la résurrection de Jésus, dont les Apôtres ont affirmé la réalité, parce qu’ils ont été les témoins des apparitions de Jésus, dans sa chair.

« Dans sa chair ». Le problème est exactement là. Si Jésus, qui est Dieu, ne s’est pas réellement fait chair et n’est pas réellement ressuscité dans sa chair, alors il n’y a pas d’espérance pour nous, qui sommes chair, d’accéder à la gloire de Dieu.
Mais au contraire, comme l’a dit saint Irénée en une phrase : « Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu ». C’est cela la Bonne Nouvelle, l’Évangile : par sa résurrection et son ascension, Jésus nous a ouvert et nous a donné accès, par la communion avec lui – à nous qui sommes chair – à la gloire de Dieu.

Nous nous sommes réjouis, à l’Annonciation, de la venue de Dieu qui s’est fait homme en Marie, par l’action de l’Esprit Saint. L’Ascension est exactement le miroir de l’Annonciation : par l’action de l’Esprit Saint – c’est-à-dire la nuée qui soustrait Jésus aux yeux des Apôtres – Jésus devenu homme est revenu dans la gloire de Dieu. Mais avec une différence : c’est que Jésus est revenu dans la gloire avec son humanité, avec sa chair – c’est-à-dire avec nous. Il nous a ramené à Dieu comme le Bon berger a ramené la brebis perdue, sur ses épaules. Voilà donc la fête de l’Ascension.

Chers frères et sœurs, ne tombons pas, à l’inverse dans les clichés. Jésus ressuscité, apparu à ses Apôtres dans sa chair, n’est pas monté au ciel comme une fusée. De la même manière qu’il est apparu à de nombreuses reprises, il a aussi disparu, comme lors de son repas avec les disciples d’Emmaüs. L’Ascension correspond à l’ultime apparition de Jésus, au bout de quarante jours, et donc à sa dernière disparition, avant de revenir dans la gloire. Tout simplement.

Maintenant les disciples se retrouvent un peu écartelés pendant dix jours, entre l’absence de Jésus d’une part, et le don de l’Esprit Saint à la Pentecôte d’autre part. Durant ce temps ils veillent : ils prient et ils attendent le don de Dieu. Méditons bien sur ce temps de dix jours, car il ressemble beaucoup au temps que nous-mêmes nous vivons : le temps de l’Église, qui se souvient de Jésus et qui attend son retour en priant.



lundi 27 mai 2019

25-26 mai 2019 - LARRET - ANGIREY - 6ème dimanche de Pâques - Année C


Ac 15,1-2.22-29 ; Ps 66 ; Ap 21,10-14.22-23 ; Jn 14,23-29

Chers frères et sœurs,

Si nous voulons comprendre l’enseignement que Jésus nous donne aujourd’hui, il nous faut bien sûr l’assistance de l’Esprit Saint, mais il nous faut aussi d’abord replacer le texte de l’évangile dans son contexte.

Jésus donne donc cet enseignement durant son dernier repas, avec ses Apôtres, le Jeudi Saint, avant sa Passion. Juste avant le passage que nous avons lu, il leur explique qu’il va partir, mais qu’il leur enverra un autre défenseur, l’Esprit-Saint, qui sera avec eux pour l’éternité, et qui demeurera en eux. Cet Esprit, dit Jésus, « le monde ne peut le recevoir, parce qu’il ne le voit pas et ne le connaît pas ». Il ajoute que le monde ne le verra donc plus, mais que eux, les Apôtres, le reverront parce que, dit Jésus, « je vis et vous vivrez ». C’est-à-dire, que Jésus leur apparaîtra vivant et qu’ils le verront, parce qu’à ce moment, ils seront en communion avec lui, ils seront « vivants ». Et Jésus ajoute que ce sont ceux qui gardent ses commandements et qui l’aiment, qui le verront.

C’est alors qu’il est interrompu par l’Apôtre Jude, qui l’interroge : « Pourquoi dois-tu te manifester à nous et non pas au monde ? ». La question est pertinente, et elle a été posée à de nombreuses reprises ensuite par des incroyants : si Jésus avait voulu prouver sa résurrection, pourquoi n’est-il donc pas apparu à la foule de Jérusalem, aux grands prêtres, à Pilate… ? C’est trop facile de n’apparaître qu’à ses propres disciples, et cela fragilise leur témoignage ! Et c’est donc à cette question que Jésus répond maintenant, dans l’évangile que nous avons entendu aujourd’hui. Il répond en trois temps.

Dans un premier temps, Jésus réexplique les propos qu’il vient juste de tenir. Le problème est que celui qui n’aime pas Jésus, ne peut pas garder ses paroles, et donc n’est pas en capacité de le recevoir et de le reconnaître ressuscité. Cela ne sert donc à rien de chercher à se manifester à la foule de Jérusalem, aux grands-prêtres, à Pilate… ils ne peuvent pas reconnaître Jésus ressuscité, parce qu’ils ne l’aiment pas.
Au contraire, celui qui aime Jésus, garde plus facilement sa parole, qui vient de son Père. Cela réjouit le Père, et celui-ci vient alors habiter, avec Jésus, dans son cœur. C’est la communion. Alors, celui qui aime et qui est en communion avec Dieu, a la capacité de voir Jésus ressuscité et de le reconnaître.

Le problème devient donc : comment aimer Jésus et garder sa parole ? C’est la raison pour laquelle Jésus va envoyer l’Esprit Saint, qui « vous enseignera tout, et vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit ». Pour nous concrètement, nous voyons l’Esprit Saint à l’œuvre dans l’Église, quand elle nous transmet l’Évangile. L’Église, c’est l’Esprit Saint en actes, qui agit pour que Jésus soit aimé et ses paroles connues et mises en pratique.
On imagine facilement l’inquiétude des disciples, car ils ont bien compris que c’était eux l’Église, ceux qui sont chargés d’aimer et de faire aimer Jésus. Jésus a beau leur dire qu’il leur laisse la paix et leur donne sa paix, ils sont effrayés, car ils ne comprennent pas. Ils ont bien compris que Jésus allait partir, mais ils n’ont pas compris comment il allait revenir. Ils ne savent pas encore ce que c’est que de voir Jésus ressuscité. Et ils ne pourront le comprendre que quand Jésus apparaitra vivant devant eux. C’est comme pour nous aujourd’hui : Jésus est en train de leur apprendre et de nous apprendre ce que c’est que d’avoir la foi : aimer Jésus et garder ses paroles en attendant qu’il revienne.

Et c’est là que, troisième temps, Jésus annonce à ses Apôtres qu’il va solidifier leur foi : « Je vous ai dit ces choses maintenant, avant qu’elles n’arrivent ; ainsi lorsqu’elles arriveront, vous croirez ». Toutes ces paroles incompréhensibles avant la résurrection de Jésus, deviennent évidentes dès lors que Jésus ressuscité apparaît devant eux. Ce sera exactement pareil pour nous. Aujourd’hui, il nous faut nous appuyer sur la foi pour aimer Jésus, garder sa parole et ses commandements, mais lorsque nous serons ressuscités et vivants dans la communion des saints, alors nous verrons que tout ce qu’il avait dit était vrai. La différence entre les Apôtres et nous, c’est qu’ils ont une apparition d’avance. Pour encourager notre foi et notre amour pour Jésus, nous avons leur témoignage. Pierre et Paul sont morts martyrs pour que nous ayons l’assurance que leur témoignage est vrai et que nous pouvons aimer Jésus avec confiance, pour le voir à notre tour, quand l’heure viendra. Alors nous serons remplis de joie.

samedi 25 mai 2019

24 mai 2019 - CHARCENNE - Obsèques de M. Pierre MARCEL


1Co 15,51-54.57 ; Ps 22 ; Mt 5,1-12a

Chère Bernadette, Chers frères et sœurs, chers amis,

L’Évangile des Béatitudes est celui que nous proclamons pour la fête de la Toussaint, la fête de tous les saints. Et ceci à raison, car, par cet enseignement, Jésus nous apprend au moins trois choses.
La première est qu’à travers les Béatitudes, Jésus nous révèle son vrai visage, qui est aussi celui de son Père : le visage de Dieu. Dieu est pauvre de cœur, c’est-à-dire innocent ; il pleure sur les péchés et les souffrances des hommes ; il est doux ; il a faim et soif de justice, c’est-à-dire de vérité. Mais il fait aussi miséricorde. Dieu a le cœur pur ; il est artisan de paix, et pourtant il est persécuté pour la justice, c’est-à-dire pour l’amour qui rend juste. Il est aussi bien sûr celui qui a été insulté et persécuté, jusqu’à en mourir sur une croix, avant de ressusciter. Ainsi, par les Béatitudes, Jésus dévoile qui il est vraiment, et qui est aussi Dieu notre Père.
Mais, puisque les Béatitudes évoquent successivement différentes catégories de personnes, à qui sont promis le Royaume des Cieux, la consolation, la vision de Dieu, l’adoption comme fils de Dieu, il faut aussi comprendre – et c’est le deuxième enseignement – que nous les hommes, nous sommes tous concernés par ces Béatitudes et par leurs promesses. Car nous sommes appelés à vivre chacun une ou plusieurs d’entre-elles. Ainsi, par exemple, il y a au moins une béatitude qui correspond plus particulièrement à Pierre, à sa personnalité, à son âme.
Et c’est ainsi que – troisième enseignement – un saint ou une sainte sont des personnes qui partagent avec Jésus une ou plusieurs béatitudes, avec une plus grande intensité de ressemblance. Elles marquent une communion avec lui. Si donc nous pensons que Pierre est un cœur pur, alors il partage avec Jésus ce trait de personnalité et, comme lui, il est appelé à avoir la vision de Dieu. Et c’est là son caractère de sainteté. Par les Béatitudes, nous savons – comme dirait un chanteur célèbre – que « nous avons tous en nous, quelque chose de Jésus-Christ ».

Justement, il ne faut pas avoir longtemps fréquenté Pierre pour s’être rapidement rendu compte qu’il était un homme heureux. On garde facilement de lui l’image d’un homme au visage souriant – sérieux, peut-être pas toujours facile, mais souriant. Et sa famille a voulu souligner « la joie de vivre qui le caractérisait ». Quel était donc le secret de cette joie, qui irriguait sa vie ?
Quelques aspects évidents de sa vie quotidienne nous apportent une réponse : d’abord Pierre était fidèle au Bon Dieu, et c’est avec joie qu’il participait chaque dimanche et fête à la messe, tantôt comme sacristain, tantôt dans la chorale, tantôt – avec un brin de fierté – comme lecteur, comme dimanche dernier, à Dampierre. Pierre était aussi fidèle à Bernadette, bien sûr, et il est facile de retrouver sur Internet la magnifique photo de leurs noces d’or, parue dans l’Est Républicain en avril 2014. Il était aussi fidèle à sa grande famille, dont il était si fier, et fidèle aux camarades d’Afrique du Nord, comme à tant d’autres amis. Il était enfin fidèle à la formation professionnelle riche et exigeante qu’il avait reçue, qui lui a permis de développer ses talents. Elle a fait de lui un travailleur avisé, dévoué et infatigable. Un homme de confiance. Au fond, c’était tout simple : toutes ces fidélités n’étaient-elles pas le secret de sa joie ?

En fait, il y a peut-être quelque chose de plus, et je terminerai par un témoignage plus personnel. Lorsqu’il a été question que je vienne m’installer à Notre-Dame de Leffond, Pierre m’a naturellement fait visiter les lieux, en commençant par la chapelle. Là, il m’a expliqué qu’à chaque fois qu’il venait, il sonnait la cloche, et joignant le geste à la parole, il tirait de bon cœur sur la tringle. Il sonnait pour Bernadette, pour sa famille, pour les habitants de Charcenne, et pour la paroisse. Et c’était avec une joie d’enfant. Là s’exprimait tout son bonheur, le bonheur des cœurs purs, en même temps que sa prière, une prière d’action de grâce. Là était donc la véritable source de toutes ses fidélités. Il était dans son lieu. Comme pour beaucoup d’autres amis de Notre-Dame de Leffond, la chapelle était son ciel sur la terre. Et il y était comme un enfant. Cela m’a beaucoup frappé.
Pierre aurait bien voulu que je le tutoie, que je l’appelle « Pierrot » comme ses amis, mais j’avais pour lui un trop grand respect. C’était impossible, il était en même temps le serviteur de Notre-Dame depuis tant d’années, et mon ange gardien à Charcenne. Pour cette raison et parce que c’était sa joie, je n’ai jamais osé sonner la cloche. Sauf une fois, un soir, pour Notre-Dame de Paris.
Désormais, à chaque fois que je viendrai, et à chaque office quand je résiderai, je sonnerai la cloche en priant pour vous Pierre, et pour Bernadette, et pour la famille, pour les habitants de Charcenne, et pour la paroisse. Notre-Dame se réjouira. Et du haut du ciel, avec elle et avec tous les anciens qui sont avec vous, vous intercéderez avec Jésus auprès du Père : pour qu’il nous envoie les grâces dont nous avons tous besoin pour être fidèles en tout, chaque jour, à notre tour, avant de nous retrouver tous ensemble et pour l’éternité, avec le Bon Dieu, dans la joie de tous les saints.

dimanche 19 mai 2019

19 mai 2019 - BARD-lès-PESMES - 5ème dimanche de Pâques - Année C


Ac 14,21b-27 ; Ps 144 ; Ap 21,1-5a ; Jn 13,31-33a.34-35

Chers frères et sœurs,

Avant de partir Jésus donne à ses Apôtres les enseignements nécessaires pour qu’ils puissent vivre et agir après son départ, que ce soit avant sa mort ou avant son Ascension, avant de retourner auprès du Père. De même Paul et Barnabé ont laissé des consignes aux chrétiens et organisé les Églises de Lystre, Iconium et Antioche de Pisidie, avant de revenir à Antioche de Syrie d’où ils avaient été envoyés en mission. Les deux situations s’éclairent l’une par l’autre.

Jésus se trouve donc, le jeudi saint, en train de célébrer la Pâque, son dernier repas avant la Passion. Judas est parti le dénoncer. Les dés sont jetés : Jésus sait qu’il va être arrêté, jugé et condamné à mort. Mais il sait aussi que par-delà sa mort il ressuscitera et que c’est dans la lumière de la résurrection qu’il sera glorifié.
En attendant, les Apôtres vont se retrouver seuls dans la tourmente. C’est pourquoi il leur parle, avec douceur : « Petits enfants »… Jamais Jésus ne leur a parlé de cette manière : « Petits enfants »… Il est bien conscient de leur grande fragilité face aux épreuves qu’ils vont devoir endurer : le jugement, la Passion, la croix, la mort, le désespoir, l’incompréhension, la persécution. Toujours – que nous soyons des hommes d’hier, d’aujourd’hui, ou de demain – la croix demeurera pour nous une pierre d’achoppement : comment des ténèbres peut-il sortir de la lumière ? de la mort, la vie ? des larmes, la joie ? Aujourd’hui encore, nous ne supportons pas la croix, et nous préférons souvent l’éviter ou la supprimer, d’une manière ou d’une autre, quand elle nous dérange trop.

C’est pourquoi Jésus veut aider ses Apôtres et leur donner la clé qui permet de traverser l’épreuve de la croix pour atteindre les rives de la vie : il leur donne un commandement nouveau. Il ne s’agit pas du commandement de l’amour du prochain, de la bienveillance envers le prochain : ce commandement-là existe déjà dans l’Ancien Testament. Il n’est pas nouveau. Il s’agit ici d’un commandement supérieur. La traduction française le rend mal. Il y a deux points remarquables.
Premièrement, l’amour dont il est question est celui qui est le plus élevé : l’amour divin ; c’est l’amour qui est le plus intime, qui est communion, qui est don de sa vie. Jésus va leur donner l’eucharistie pour cela : « Ceci est mon corps ; ceci est mon sang, livré pour vous », et il va le faire en réalité.
Deuxièmement, les apôtres doivent s’aimer les uns les autres. Il ne s’agit pas d’un amour de communion tourné vers le prochain, mais une communion d’amour entre eux, qui est à l’image de l’amour que Jésus a pour son Père. Le noyau, le cœur du groupe des Apôtres, c’est cet amour-là qui s’enracine dans l’amour de Jésus, lui-même enraciné dans l’amour du Père.
On ne comprend donc rien à ce qu’est l’Église, à ce qu’est un évêque, si on ne comprend pas qu’en leur cœur il y a l’amour de communion, du don de sa vie, de l’eucharistie, qui prend sa source dans l’amour que Jésus partage avec son Père.

Et nous alors ? Nous sommes comme les chrétiens de Lystres, d’Iconium et d’Antioche de Pisidie. L’Évangile nous a été transmis par Ferréol et Ferjeux, comme il l’a été là-bas, autrefois, par Paul et Barnabé. Et que nous ont-ils laissé ?
D’abord, Paul et Barnabé étaient bien conscients de laisser les chrétiens face à des grandes épreuves : « Ils affermissaient le courage des disciples ; ils les exhortaient à persévérer dans la foi en disant : « Il nous faut passer par bien des épreuves pour entrer dans le royaume de Dieu » ». Et sachant leur grande fragilité, comme Jésus avec ses Apôtres au jeudi saint, ils leur donnent part au commandement nouveau : « Ils désignèrent des Anciens pour chacune de leurs églises et, après avoir prié et jeûné, ils confièrent au Seigneur ces hommes qui avaient mis leur foi en lui ».
Paul et Barnabé, parce qu’ils en avaient reçu le commandement eux-mêmes à Antioche, ont donné à ces jeunes Églises des évêques, c’est-à-dire des hommes de l’amour divin et de l’eucharistie, des hommes de communion et de don de soi.
Ce qui permet aux chrétiens de tous les lieux et de tous les temps d’affronter les épreuves, c’est leur fidélité à leur évêque et à l’eucharistie que celui-ci célèbre en communion avec tous les autres évêques du monde, et avec Jésus lui-même, en mémoire de lui et de l’amour divin dont il nous a aimé.

Chers frères et sœurs, le scandale de la croix, l’épreuve de la souffrance et de la mort, ne peuvent être surmontés que par l’amour et la vie nouvelle que Jésus nous donne. Le gage de cet amour et de cette vie nouvelle, c’est l’eucharistie célébrée par notre évêque, à laquelle nous communions. Il n’y a pas de chemin plus sûr que ce commandement, pour entrer à notre tour dans le Royaume de Dieu.

dimanche 12 mai 2019

11-12 mai 2019 - VELLEXON - MONTOT - 4ème dimanche de Pâques - Année C


Ac 13,14.43-52 ; Ps 99 ; Ap 7,9.14b-17 ; Jn 10,27-30

Chers frères et sœurs,

Quand on cherche à comprendre l’Évangile, il faut toujours essayer de resituer la scène dans son contexte. Ici, Jésus se trouve dans le Temple de Jérusalem, pendant la fête d’Hanoukka. C’est dit au verset 22, qui a été coupé, malheureusement.

La fête d’Hanoukka dure huit jours, durant lesquels chaque famille juive allume un chandelier à neuf branches à la fenêtre de sa maison, en souvenir de la purification du Temple au temps des frères Maccabées. C’est un geste de résistance et d’espérance.
Au IIème siècle avant Jésus-Christ en effet, les frères Maccabées avaient résisté avec les armes pour maintenir la tradition d’Israël contre une assimilation forcée à la pensée et aux mœurs grecques. Lors de leur entrée dans le Temple, qui avait été profané, ils n’avaient trouvé qu’une petite fiole d’huile sainte pour allumer le Chandelier à sept branches du Sanctuaire. Or, par miracle, l’huile de cette petite fiole avait permis de maintenir le Chandelier allumé pendant huit jours, le temps de fabriquer de l’huile nouvelle.
La fête d’Hanoukka, c’est la mémoire de ce miracle, qui signifie en même temps la fidélité et la bénédiction de Dieu. Dieu n’a pas voulu que la foi d’Israël soit entièrement éteinte, et même il a montré qu’un petit peu d’huile sainte pouvait suffire pour éclairer pendant huit jours, c’est-à-dire pendant une éternité.

Revenons maintenant à l’Évangile.

Dans le Temple, pendant la fête d’Hanoukka, Jésus déclare à ses interlocuteurs qu’il est comme un berger qui conduit ses brebis, auxquelles il donne la vie éternelle. Jamais celles-ci ne périront, car c’est le Père qui les lui a données et que tous deux ne font qu’un. Et nul ne peut arracher quelque chose de la main du Père.
La leçon est donc la suivante : La petite fiole qui contient l’huile sainte servant à allumer les branches du chandelier pendant huit jours, c’est lui, Jésus, qui contient la vie éternelle, celle qui donne vie à ses disciples pour l’éternité. Comme la lumière d’Hanoukka ne s’éteindra pas, les brebis de Jésus le Bon Berger ne périront jamais. Comme Dieu a été fidèle à son peuple au temps des Maccabées, le Père et lui-même Jésus, seront toujours fidèles aux brebis, c’est-à-dire aux disciples et à nous. Nous ne manquerons jamais de l’huile de l’Esprit Saint, de la vie éternelle, pour être illuminés par lui. Nous avons reçu cette huile et cette lumière à notre baptême, quand notre lumière a été allumée à celle du cierge Pascal.

Il est important maintenant de comprendre pourquoi Jésus nous compare à des brebis.

En premier lieu, parce que nous savons bien qu’il n’y a pas plus innocent que ces animaux, et que les chrétiens – comme il est dit dans les Béatitudes – sont pauvres de cœur, c’est-à-dire humbles, sensibles et doux. Mais aussi, en second lieu, en raison d’un jeu de mot qui n’a pas été traduit en grec et en français : le mot « mouton » en hébreu – pour faire référence au terme exact – s’apparente à celui de « témoignage », de « promesse solennelle ». Le mouton est un gage de promesse solennelle. Ainsi donc, nous les chrétiens, nous sommes les cœurs sensibles, humbles et doux qui portons dans le monde le témoignage de Jésus, et sa promesse solennelle de vie éternelle.
Or, ces brebis, selon Jésus, écoutent sa voix, sont connues par lui et le suivent. Ces trois verbes écouter, connaître et suivre sont très importants, car ils forment l’essentiel de notre vie chrétienne. Nous écoutons la Parole de Dieu, c’est-à-dire Jésus, notamment dans ses paroles et ses actes, rapportés par les Évangiles. Par la voie des sacrements – surtout ceux du baptême et de l’eucharistie – Jésus se révèle à nous et nous unit à lui : il nous connaît, comme un homme « connaît » sa femme quand ils s’aiment. Enfin, quand nous sommes unis à Jésus, connus par lui, nous pouvons le suivre où il va, c’est-à-dire vers son Père, dans son Royaume, pour la vie éternelle.

Ainsi donc, chers frères et sœurs, aujourd’hui Jésus nous a appris que nous étions comme des branches de chandelier, illuminés et unis à lui pour l’éternité, par l’huile sainte de l’Esprit Saint, et que humbles et pauvres comme des brebis, nous étions en même temps ses témoins dans le monde et la promesse de sa fidélité, pour tous les hommes.

vendredi 10 mai 2019

05 mai 2019 - GRAY - 3ème dimanche de Pâques - Année C


Ac 5,27b-32.40b-41 ; Ps 29 ; Ap 5,11-14 ; Jn 21,1-19

Chers frères et sœurs,

Les lectures de ce jour nous rappellent quels sont les fondations de notre vie chrétienne.

Dans l’Évangile, nous voyons Jésus inviter ses disciples pour partager le repas qu’il a préparé pour eux. Un chrétien comprend immédiatement qu’il les appelle à célébrer et à se nourrir de l’eucharistie.
La mention des poissons ne doit pas nous faire oublier que l’aliment fondamental en Judée à cette époque, est le pain. Ainsi, Jésus et ses disciples mangent du pain avec du poisson et non pas du poisson avec du pain. Le poisson est là comme pour donner du goût au pain. Et c’est bien ainsi, car nous sommes les poissons qui viennent donner leur goût particulier au pain qui est Jésus, auquel nous communions.
D’ailleurs, Jésus demande si les apôtres ont du poisson. La pêche a été difficile, mais sur son ordre, les pêcheurs finissent par prendre dans leur filet – celui de l’Église – de nombreux poissons. 153 est un nombre qui renvoie à la notion d’une grande multitude. Et le filet, malgré ce volume, ne se déchire pas.
Ainsi donc nous avons ici de manière imagée l’essentiel de la vie chrétienne et la vocation de l’Église : nous sommes tous appelés par Jésus à communier à son Eucharistie – qui est lui-même – et le rôle de l’Église est de nous rassembler pour participer à cette communion.
Comme nous le voyons ensuite, dans l’échange qui a lieu entre Pierre et Jésus, cette mission de rassemblement est confiée plus particulièrement à Pierre et à travers lui à ses successeurs, le Pape et les évêques en communion avec lui. Or la clé de cette mission est l’amour de Jésus. Un évêque qui n’aime pas Jésus ne peut pas accomplir sa mission : au lieu de rassembler, il divise. Mais c’est aussi vrai pour chacun d’entre nous.

La célébration de l’Eucharistie et le rassemblement de l’Église qui lui est lié, par amour du Seigneur, n’est pas la seule activité de notre vie chrétienne. Il y a aussi le témoignage de l’Évangile à la face du monde. La première lecture nous en donne une bonne illustration.
L’essentiel du message des Apôtres est le suivant : Jésus est le Messie attendu, qui a été envoyé par Dieu, pour accorder à Israël et à tous les hommes, la conversion et le pardon des péchés – ce que le culte du Temple de Jérusalem n’arrivait pas à obtenir réellement parce qu’il était seulement une image du culte véritable. Et la preuve en est que les Apôtres sont les témoins que Jésus, qui avait été mis à mort, est vraiment ressuscité. Et non seulement Jésus leur est apparu vivant réellement, mais le don de l’Esprit Saint à la Pentecôte a confirmé qu’il a bien été reçu dans la gloire de Dieu, qu’il est Dieu lui-même. C’est ce que Pierre veut dire lorsqu’il explique que Jésus est « Prince et Sauveur » : premier-né d’entre les morts et fils de Dieu, Messie libérateur et source de vie éternelle.
Cet enseignement – nous l’avons vu – n’est pas bien reçu par les membres du Conseil suprême. A l’interdiction qui leur est faite d’enseigner l’Évangile, sous peine de châtiments corporels et d’humiliations, les Apôtres répondent qu’il est de leur devoir d’obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes.
En conséquence, quelles que soient les époques et les lieux, il est du devoir de l’Église – c’est à dire de tous les baptisés – d’annoncer l’Évangile, même si cela perturbe l’ordre établi et leur attire des ennuis. Être chrétien, c’est accepter et assumer d’être différent des autres, dans le monde.

Finalement, si l’on récapitule, être chrétien, c’est répondre à l’appel de Jésus à nous rassembler avec tous les autres membres de l’Église pour communier avec lui, pour nous nourrir de lui. Et c’est témoigner qu’il est Dieu et Sauveur, parce que par sa mort et sa résurrection, par le don de son Esprit Saint, il nous accorde, avec la conversion, le pardon de nos péchés et la réconciliation avec Dieu, c’est-à-dire la participation à sa vie éternelle. Et cela toujours dans la joie. Car il ne faut jamais oublier qu’un des signes donnés aux disciples est, que malgré toutes les difficultés, l’Esprit de Jésus les rend profondément joyeux.

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