jeudi 27 avril 2017

23 avril 2017 - ANGIREY - 2ème dimanche de Pâques - Année A

Ac 2, 42-47 ; Ps 117 ; 1P, 3-9 ; Jn 20,19-31
Chers frères et sœurs,

Depuis son entrée à Jérusalem, le dimanche des Rameaux, jusqu’à sa résurrection, à Pâques, nous avons suivi Jésus pas à pas. Chronologiquement, ce sont les saintes femmes qui, les premières, ont constaté un problème au tombeau de Jésus. Là, un ange leur est apparu pour leur annoncer sa résurrection. Immédiatement, elles ont prévenu les Apôtres. Pierre et Jean se sont précipités à leur tour au tombeau. En voyant les linges tombés à plat sur eux-mêmes, Jean a cru. Pierre est resté sceptique.
Après leur départ, Marie-Madeleine a bénéficié d’une apparition de Jésus. Mais les disciples n’ont pas voulu la croire. Pendant que deux d’entre eux sont partis à Emmaüs, pleins d’interrogations, d’après saint Paul, saint Pierre a bénéficié à son tour d’une apparition. Le soir venu, nous les retrouvons tous réunis au Cénacle. Nous pouvons imaginer sans peine l’effervescence dans les esprits : que faut-il croire ?

C’est alors que Jésus apparait. Sa première parole est « La paix soit avec vous ». C’est très important. En effet, la dernière fois que Jésus et ses disciples étaient ensemble, au jardin des Oliviers, ceux-ci l’ont abandonné à son sort et se sont enfuis. Il aurait pu les juger, les condamner comme des traîtres. Mais non : « La paix soit avec vous ». C’est pour cette parole de pardon que l’on appelle ce dimanche, le dimanche de la Miséricorde.
La seconde parole de Jésus est tout aussi importante : « La paix soit avec vous ; De même que le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie. Recevez l’Esprit Saint. A qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus ». L’évangélisation, fruit du pardon accordé par Jésus à ses disciples, est l’annonce de ce pardon désormais offert à tous les hommes. La force et la joie de l’évangélisation trouvent leur racine dans ce pardon de Jésus. Souvenez-vous de saint Paul sur le chemin de Damas : lui qui était persécuteur de chrétiens est devenu, grâce au pardon de Jésus pour lui, l’apôtre inépuisable que nous connaissons. Pour Paul, évangéliser, c’est rendre grâce à Dieu, dans la joie et sans limite de générosité, pour le merveilleux pardon qu’il a reçu.
Mais dans le groupe des disciples, il manquait Thomas. Thomas est un homme juste et généreux, et aussi un homme qui a besoin de choses concrètes pour comprendre et diriger son action. Il a besoin de voir pour croire. On peut imaginer qu’il a passé une semaine difficile… au milieu des autres apôtres qui, eux, ont vu Jésus vivant ! C’est alors que, le dimanche suivant, Jésus apparaît de nouveau. Bien qu’il soit passé à travers les murs, comme il est passé à travers le linceul, Jésus invite Thomas à le toucher : il n’est pas un fantôme. Il a son corps, qui a des propriétés particulières certes, mais qui est un corps réel. D’ailleurs, saint Luc dit que Jésus a aussi mangé un poisson grillé devant ses disciples. On imagine saint Thomas bouche bée. Jésus lui dit : « Cesse d’être incrédule, sois croyant ». Cette parole est importante : elle indique que c’est Jésus qui fait de Thomas un croyant. Jésus est la source de la grâce qui donne la foi. Alors Thomas est libéré : il s’écrie : « Mon Seigneur et mon Dieu ! ». Bientôt, il annoncera l’Evangile de la résurrection de Jésus en Orient, aux Indes et jusqu’en Chine.

Chers frères et sœurs, saint Jean nous a donné le secret de l’évangélisation. L’annonce de la résurrection de Jésus est le fruit de son pardon. Celui qui est pardonné – comme l’aveugle qui retrouve la vue ou le grabataire qui se remet à marcher – est alors rempli de joie. C’est la joie qui donne force à son témoignage. Il ne s’agit donc pas de justifier par des tas d’arguments la résurrection de Jésus, mais d’annoncer simplement le fait : « Jésus était mort, et maintenant il est vivant. J’étais pécheur et maintenant je suis pardonné. J’étais malade et maintenant je suis guéri. J’étais triste et maintenant je suis rempli de joie ». Ensuite, pour les gens qui écoutent l’annonce de la résurrection, leur renaissance dans la foi appartient à eux et à Dieu. C’est leur secret. Si Jésus décide qu’ils deviennent croyants, il leur donnera sa grâce. Eux sont libres de croire ou de refuser de croire.
Il est remarquable que l’évangélisation n’est pas simplement une activité individuelle. Elle est aussi une activité communautaire. Le groupe des Apôtres qui suivait Jésus l’avait abandonné. Il se réunissait ensuite dans la tristesse et la peur. Mais avec Jésus vivant au milieu d’eux, ils éclatent de joie. Dès lors, nous dit saint Luc, l’Eglise est rayonnante : elle est assidue à l’enseignement des Apôtres et à la charité fraternelle, par le partage des biens. Elle célèbre quotidiennement l’eucharistie et participe aux prières au Temple. Et c’est ainsi que « Chaque jour, le Seigneur, leur adjoignaient ceux qui allaient être sauvés », c’est-à-dire les baptisés. Encore une fois, à partir du témoignage de l’Eglise, c’est le Seigneur lui-même qui convertit les cœurs.

Seigneur, donne-nous ton pardon et ta paix, afin que rayonnants de joie et de charité, nous annoncions ton nom avec assurance. Alors, par ta grâce, tu pourras faire grandir ton Eglise. Le monde en a besoin. Amen.

mercredi 19 avril 2017

16 avril 2017 - MEMBREY - Saint jour de Pâques - Année A

Ac 10,34a.37-43 ; Ps 117 ; Col 3,1-4 ; Jn 20,1-9

Chers frères et sœurs,

Saint Jean nous rapporte la présence de Marie Madeleine au tombeau de Jésus. Qui est cette femme ? En réalité, nous savons peu d’elle. Saint Luc nous dit qu’elle fut libérée par Jésus de sept démons, c’est-à-dire qu’elle avait été tout entière possédée. Et depuis cette libération, elle s’est attachée à son Sauveur jusqu’à le suivre dans ses pérégrinations. Elle a manifestement rejoint le groupe des femmes dévouées et fortunées qui soutenaient Jésus et ses disciples dans leur mission.
C’est ainsi que nous la retrouvons au pied de la croix, avec Marie, Mère de Jésus, Marie, femme de Cléophas – un des deux disciples d’Emmaüs et frère de saint Joseph – et la sœur de Marie, Mère de Jésus, que l’on ne connaît pas autrement. Vraisemblablement, Marie Madeleine a voulu et a trouvé la force de rester le plus près possible de Jésus, jusque dans sa passion.

Saint Jean nous dit qu’elle est venue au tombeau de grand matin, alors qu’il faisait encore nuit. Les autres évangélistes précisent qu’il y avait d’autres femmes avec elle : Marie femme de Cléophas, Salomé, la mère des Apôtres Jacques et Jean, et Jeanne, femme de Chouza, l’intendant du Roi Hérode. Marie-Madeleine est certainement la plus jeune : c’est elle qui court prévenir Pierre et Jean que le tombeau a été ouvert.
Lorsque Pierre et Jean arrivent, ils constatent que les linges sont posés à plat. Il s’agit du linceul qui avait enveloppé Jésus. En le voyant Jean croit immédiatement. Pierre demeure circonspect. Il lui faudra une apparition de Jésus pour qu’il croie vraiment.
Après leur départ, à son tour Marie Madeleine entre dans le tombeau et voit deux anges qui lui demandent : « Pourquoi pleures-tu ? ». Elle leur répond : « C’est qu’on a enlevé mon Seigneur, et je ne sais pas où on l’a mis ». A ce moment derrière elle se présente un homme qu’elle prend d’abord pour le jardinier et qui lui redemande : « Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? ». Elle lui demande si c’est lui qui a emporté Jésus : « Dis-moi où tu l’as mis, et moi je l’enlèverai ». L’attachement de Marie Madeleine à Jésus est tel qu’elle irait le chercher n’importe où. Mais à ce moment-là l’homme lui dit : « Marie ». Elle reconnaît immédiatement Jésus et lui répond : « Rabbouni ! », ce qui se traduit par : « Maître très cher », en araméen. Elle se précipite alors à ses pieds. Il est obligé de lui dire : « Cesse de me toucher, car je ne suis pas encore monté vers mon Père ».

Pourquoi Marie-Madeleine est-elle donc la première à voir Jésus ressuscité, avant même tous les Apôtres ? Alors qu’elle était au départ une femme toute envahie de démons ? Parce qu’elle aime tellement Jésus qui l’a sauvée de son esclavage, que son cœur, devenu pur, est tout prêt à accueillir le don de Dieu. Certainement, l’impossibilité de retenir Jésus est pour elle une douleur, mais qui est négligeable en regard de la joie de le savoir vivant, et vivant pour l’éternité.

Pourquoi savons-nous que cette histoire est vraie ? Parce qu’il est impossible en Orient à cette époque qu’un témoignage d’une telle importance soit accordé à une femme. Jamais une femme n’aurait dû passer avant les Apôtres dans l’honneur d’être le premier témoin de Jésus ressuscité.

C’est donc que pour entrer dans la foi, le chemin de Marie Madeleine est le plus sûr : être remplis de gratitude pour l’amour et la grâce de Dieu à notre égard, et ce d’autant plus si l’on a été un grand pécheur ; être fidèle dans notre attachement à lui, même lorsqu’il est totalement humilié – et nous avec lui. Persévérer encore, jusqu’à vouloir le toucher en payant de sa personne. La foi n’est pas qu’une question d’idée, elle est aussi charnelle, physique.

Chers frères et sœurs, les sacrements du baptême, de la confirmation et de l’eucharistie sont des moyens, pour Jésus vivant, de nous faire miséricorde pour nos péchés, de nous fortifier pour lui être fidèle, et même de nous permettre d’être en communion, physiquement, avec lui. Finalement, baptême, confirmation et eucharistie nous font passer par le même chemin que Marie Madeleine ; puissions-nous donc en étant fidèles aux sacrements qui nous font vivre avec Jésus, et avec la grâce de Dieu, de devenir à notre tour des apôtres, des témoins indéfectibles de la résurrection de Jésus, dès maintenant et tous les jours de notre vie. Amen.

15 avril 2017 - VELLEXON - Samedi Saint - Veillée Pascale - Résurrection du Seigneur - Année A

Gn 1,1 – 2,2 ; Ps 103 ; Ex 14,15 – 15,1a ; Ex 15 ; Is 55, 1-11 ; Is 12 ; Mt 28,1-10

Chers frères et sœurs,

C’est dans la nuit, sous les étoiles, que Marie-Madeleine et l’autre Marie, la femme de Cléophas, se rendent au tombeau de Jésus. Avec notre Dieu, la vie commence toujours par une petite lumière dans la nuit, qui devient une lumière éblouissante, avant de se répandre dans tout l’univers comme la Création, ou comme l’Evangile, qui est annoncé jusqu’au bout du monde. La résurrection, c’est comme le big-bang de la création, c’est un événement similaire dont Dieu est l’auteur. Voilà pourquoi nous avons lu le livre de la Genèse.

Devant l’explosion de la lumière de la résurrection et l’apparition de l’ange, les gardes sont pétrifiés de peur. Les femmes aussi, mais l’ange leur dit : « Soyez sans crainte, venez voir l’endroit où il reposait ». Face à l’événement de la résurrection il y a deux options : ou bien on ne croit pas et on reste pétrifié, ou bien on reçoit de Dieu la grâce de la foi – et même si on a encore des doutes, on est déjà rempli de joie. Cette séparation entre incroyants et croyants, c’est celle de la Mer rouge : ceux qui restent empêtrés dans les eaux de la mer et de la mort, et ceux qui sont libérés par la force de Dieu pour marcher vers la terre promise, vers le Royaume des cieux dans la joie. Le baptême dans les eaux réalise ce passage de la mort à la vie.

Les femmes reçoivent une mission de la part de l’ange : « Allez dire à ses disciples : « Il est ressuscité d’entre les morts et voici qu’il vous précède en Galilée ; là vous le verrez ». Et lui-même dit qu’il avait reçu une mission : « Voilà ce que j’avais à vous dire ». Toute personne qui est témoin de la lumière de Dieu et qui est porté par la grâce de Dieu, reçoit une mission. C’est ce que Dieu avait dit au prophète Isaïe en parlant de Jésus lui-même : « Ma parole, qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce qu’il me plaît, sans avoir accompli sa mission ». Cela veut dire que tous les baptisés dans l’eau et qui sont habités par la grâce de Dieu ressemblent à Jésus, aux femmes et à l’ange : ils sont chargés, de la part de Dieu, d’apporter au monde la bonne nouvelle du Royaume des cieux, la bonne nouvelle de la lumière de la résurrection.

Saint Paul nous dit dans sa lettre aux Romains, que tous ceux qui sont baptisés sont unis à Jésus : « Si nous avons été unis à lui par une mort qui ressemble à la sienne, nous le serons aussi par une résurrection qui ressemblera à la sienne ». Dans les eaux du baptême, nous avons été libérés du péché, et par l’Esprit Saint nous vivrons avec Jésus, dans sa lumière.

Chers frères et sœurs, vous allez me dire. Qu’est-ce qui me garantit que la résurrection de Jésus, c’est vrai ? Si on la soumettait à un référendum populaire, il est assez probable aujourd’hui en France que 95% de gens voteraient contre. Alors je vous donne trois arguments.
Le premier est qu’il est impossible que cette histoire de résurrection ait été inventée par les Apôtres. Ils n’y avaient strictement aucun intérêt, encore moins que nous aujourd’hui, puisque eux risquaient la mort. Pour l’instant en France, nous, nous ne risquons souvent que le ridicule. Mais même le ridicule, nous avons du mal à l’assumer… Alors, face à la mort, les Apôtres étaient vraiment déterminés.
Le second argument justement, est que ce témoignage des Apôtres s’est transmis au cours des âges avec une fidélité qui dépasse les seules capacités humaines. Souvenez-vous des persécutions, des catacombes, de la Révolution, des camps en Pologne et en Sibérie. Et même, voyez les persécutions d’aujourd’hui : sur les plages de Lybie, dans les villages chrétiens autour de Mossoul, au Pakistan, en Syrie, au Kosovo, au Nigéria, au Soudan, en Egypte, et même en France, près de Rouen. Le second argument de la puissance de la résurrection, ce sont tous les martyrs et tous les saints du ciel qui nous ont transmis la foi, et qui sont aujourd’hui dans la lumière de Dieu.
Le troisième argument, c’est nous : le simple fait que nous soyons là, concrètement, pour célébrer Pâque dans cette église de Vellexon. Nous sommes aussi miraculeux que la résurrection de Jésus. Nous sommes dans les 5% du référendum. En fait, presque malgré nous, nous sommes les Apôtres, les martyrs et les saints du XXIème siècle, tous petits comme une étoile dans le ciel, mais porteur d’une lumière qui va éblouir et transformer le monde.

Alors, chers frères et sœurs, notre mission est la même que celle de l’ange ou des femmes. Nous avons juste à dire aux 95% de gens qui ne sont pas là : « Il est ressuscité d’entre les morts » et « Voilà ce que j’avais à vous dire ». Et c’est tout. On ne peut pas faire plus simple. Amen.

14 avril 2017 - VELLEXON - Vendredi Saint - Passion du Seigneur - Année A

Is 52,13 – 53,12 ; Ps 30 ; Hb 4,14-16 ; 5,7-9 ; Jn 18,1 – 19,42

Chers frères et sœurs,

Aujourd’hui, Jésus est passé en jugement. Grâce à saint Jean, nous avons pu suivre l’essentiel de ce qui s’est passé et cela nous permet de nous interroger. Et nous, dans cette histoire, où serions-nous ? Je voudrais m’arrêter ce soir sur la figure de Pilate et celle de Nicodème.

Pilate n’était pas de grande famille romaine, mais certaines traditions rapportent que sa femme aurait été une petite fille de l’Empereur Auguste. Ceci peut expliquer sa promotion comme préfet de Judée. Comme pour toute nomination de ce type, la durée du mandat dépend de celui qui est à Rome. Or, deux ans avant le procès de Jésus, Séjan le protecteur de Pilate avait été assassiné. C’est alors que pour acquérir les bonnes grâces de Tibère, le nouvel homme fort, le préfet de Judée avait fait placer à Jérusalem des boucliers d’or à son nom. Les Juifs se plaignirent à l’empereur de ce blasphème qui souillait la ville sainte, et ils menacèrent de se révolter. Finalement, Tibère avait ordonné à Pilate de retirer les boucliers. Depuis, le préfet était donc fragilisé.
Ainsi, lors du procès de Jésus, Pilate s’est retrouvé écartelé entre sa conscience et la peur de perdre son poste. D’un côté, il voyait bien que Jésus ne représentait pas de menace contre l’ordre romain : ses revendications royales n’étaient que religieuses. Et d’ailleurs Jésus suscitait un malaise en lui. Il ressentait son autorité divine : « Tu n’aurais aucun pouvoir sur moi si tu ne l’avais reçu d’en haut » lui avait répondu Jésus. « Et dès lors – dit saint Jean – Pilate cherchait à le relâcher ».
Mais d’un autre côté, Pilate a en face de lui la foule et les grands prêtres. La foule n’a pas de nom : un jour elle acclame Jésus avec des rameaux, le lendemain elle réclame sa mort, quelques jours après, elle pleure parce qu’elle s’est faite complice : la foule ne sait pas ce qu’elle veut. En fait, elle ne s’est pas aperçue qu’elle s’était fait manipuler par les grands prêtres, par ceux qui disent ce qu’il faut penser. Et là il fallait penser mettre Jésus à mort. Les grands prêtres, eux, avancent masqués : ils ne disent pas ouvertement la vraie raison pour laquelle ils veulent la mort de Jésus. Ils ne l’avoueront que par inadvertance, en disant : « Il s’est fait Fils de Dieu ».
Pilate n’a pas peur de la foule ; il l’a déjà rudoyé en d’autres circonstances pour la disperser. Mais il a peur que les grands prêtres le dénoncent encore une fois à Rome. Et cette-fois-ci, il n’y aura plus de protecteur. Le dilemme de Pilate est donc le suivant : vérité et innocence pour Jésus, contre perversion de la justice et sauvegarde de son poste de préfet... « Qu’est-ce que la vérité ? » dit-il. Quand on ne croit à rien, on finit par tout lâcher : la justice et l’honneur. Pilate se lave les mains, geste rituel qui signifie qu’il vient de prononcer une sentence de mort. Jésus est condamné.

Nicodème est un homme qui apparaît trois fois dans l’évangile de Jean. C’est un docteur de la Loi, membre du Sanhédrin. D’après les écrits Juifs anciens, il est un des trois personnages les plus riches de Jérusalem. Autrement dit, localement c’est un personnage considérable.
Nicodème est aussi un disciple de Jésus mais en secret. Il était venu l’interroger en cachette, de nuit, et Jésus lui avait dit : « Amen, amen, je te le dis : nul – s’il ne naît de l’eau et de l’Esprit – ne peut entrer dans le Royaume de Dieu ». Lorsque les grands prêtres avaient voulu, il y a un an déjà, condamner Jésus, il s’y était courageusement opposé : « Notre loi condamne-t-elle un homme sans que, d’abord, on l’entende, et que l’on sache ce qu’il a fait ? ». Mais il s’était durement fait remettre en place par les collègues. Et aujourd’hui, devant la perversion flagrante de la justice, il est impuissant.
La Passion de Jésus a dû être aussi la passion de la conscience de Nicodème devant un tel déni de justice. « Qu’est-ce que la vérité ? » avait dit Pilate. Et Nicodème savait que la Vérité était justement en face de lui. Pilate avait étouffé sa conscience devant Jésus, et lui, Nicodème, avait sa conscience crucifiée avec Jésus.
La seule chose que Nicodème pourra faire, c’est – avec Joseph d’Arimathie – de procéder aux funérailles du Maître. Il fournit les aromates nécessaires, en abondance. Ce furent des funérailles de roi, où Nicodème ne transigea pas sur les dépenses. Mince consolation, mais l’honneur est sauf : Nicodème porte bien son nom  qui veut dire : « Innocent du Sang ».

Chers frères et sœurs, devant Jésus, devant la vérité, où sommes-nous ? Sommes-nous Pilate, prêts à toutes les compromissions pourvu qu’on ne perde pas notre situation ? Sommes-nous Nicodème, parfois impuissants, mais malgré tout présents quand le témoignage de la vérité l’exige ?

Chers frères et sœurs, le procès de Jésus dure toujours et encore aujourd’hui. Demandons au Seigneur la grâce d’agir toujours selon notre conscience et d’être en toutes circonstances fidèles à Jésus.

vendredi 14 avril 2017

13 avril 2017 - VELLEXON - Jeudi Saint - Cène du Seigneur - Année A

Ex 12,1-8.11-14 ; Ps 115 ; 1Co 11,23-26 ; Jn 13,1-15

Chers frères et sœurs,

Le peuple de Dieu était réduit en esclavage en Egypte. Les Hébreux étaient obligés de tuer tous leurs garçons à la naissance, et ne laisser vivre que les filles. La peur était telle qu’ils n’osaient pas se révolter. Seul le Seigneur pouvait les sauver. C’est ce qu’il a fait, avec l’aide de son serviteur Moïse, parce qu’il est un Dieu fidèle.
En cette nuit de Pâques, le Seigneur a porté un jugement contre les Egyptiens. Il a demandé aux Hébreux de se réunir en famille, de sacrifier au coucher du soleil un agneau âgé d’un an, sans défauts, de marquer de son sang les montants des portes des maisons, et de le manger à la hâte avec du pain sans levain. Et pendant cette nuit, Dieu a frappé les premiers-nés des Egyptiens, en épargnant les maisons marquées par le sang de l’agneau. Le sang de l’agneau était protecteur. Alors, les Egyptiens demandèrent aux Hébreux de partir vite. C’est ainsi que Dieu libéra son peuple.
Chaque année, pour se souvenir de cette nuit terrible en Egypte, les juifs se réunissent en famille, se purifient en prenant un bain puis –  le soir de la fête étant venu – sacrifient un agneau avant de le manger en hâte, dans la nuit comme autrefois, avec du pain sans levain. C’est Pessah, la Pâque du Seigneur.

Jésus et ses disciples sont donc montés à Jérusalem pour fêter la Pâque. Ils se sont purifiés et les voici réunis pour le souper, en attendant demain soir le sacrifice des agneaux et le grand repas de la nuit de Pâque.
Mais voilà tout à coup que Jésus bouscule la tradition. Il accomplit les rites du repas de Pâques avec vingt-quatre heures d’avance : Il n’a pas d’agneau mais il prend le pain sans levain et il dit : « Ceci est mon corps ». Puis il prend la coupe de bénédiction, qui clôture traditionnellement le repas, en disant : « Ceci est mon sang, le sang de l’alliance nouvelle ».
En fait, Jésus dit que le pain et le vin sont le corps et le sang de l’agneau, et en même temps qu’ils sont aussi son corps et son sang. Jésus dit que l’agneau de Pâque, le vrai agneau de Pâque : c’est lui. Et d’ailleurs, demain soir, au coucher du soleil, au moment même où les agneaux seront sacrifiés dans le Temple, Jésus mourra sur la croix.
Que s’est-il passé ? Les Hébreux qui sont esclaves en Egypte, sont les prophètes de tous les hommes qui sont esclaves du péché et de la mort, et qui vivent dans la peur. Le soir de la Pâque de Jésus, de l’unique vraie Pâque du monde, Dieu va passer pour détruire le péché et la mort ; et tous ceux qui auront été purifiés dans le bain du baptême et qui communieront au corps et au sang de Jésus, en seront totalement libérés. Et l’agneau de Pâque, innocent et sans défaut, qui donne sa vie et son sang pour que les baptisés soient sauvés du péché et de la mort, c’est Jésus lui-même.

Pourquoi Jésus veut-il laver les pieds de ses disciples avant de célébrer ce repas si particulier ? N’est-ce pas que les disciples se sont baignés avant, dans la journée ? Mais il y a toujours les pieds qui sont sales. Evidemment.
Nous aurions beau nous purifier tout entier, il reste toujours, au plus profond de notre humanité, une part qui touche le sol, dont on ne peut pas se détacher : la racine du péché en nous, qui repousse tout le temps. Seul Jésus peut nous délivrer de cette ronce mortelle, pour que nous puissions être vraiment libres et avoir part à son Royaume de vie éternelle.
Seul Jésus peut nous délivrer, et il le fait en s’humiliant à nos pieds ; et nous, en acceptant de nous laisser laver les pieds par lui, en acceptant qu’il descende jusqu’au plus profond de notre vie et de notre cœur. Jésus fait cela par le baptême et la confirmation, et il le réitère au besoin par le sacrement de la réconciliation. Nul ne peut avoir part dans son Royaume avec Jésus s’il n’est pas d’abord réconcilié avec lui et par lui.
Alors oui, c’est humiliant de se laisser laver les pieds par Jésus. Et saint Pierre s’y oppose dans un premier temps. Mais il voit bien qu’il doit se laisser faire. Quant à Jésus, il faut qu’il accepte de se dévêtir, c’est-à-dire de quitter sa divinité, pour devenir homme au milieu des hommes, de descendre ensuite parmi les plus rejetés des hommes, condamné comme un pécheur à la croix, et plus encore, de descendre parmi les morts, au plus profond des enfers, pour aller laver les pieds d’Adam et Eve et leur annoncer, dans la nuit profonde de leur tombeau, leur libération et leur retour au paradis.


Chers frères et sœurs, vous vous souvenez qu’avant de chanter le chant de l’Agneau de Dieu, durant lequel l’hostie est rompue, nous nous donnons la paix ? Hé bien ce geste, c’est le lavement des pieds que nous nous faisons les uns les autres, en nous souvenant de ces paroles : « Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensé ». L’Hostie qui est rompue, c’est l’Agneau de Pâque qui est sacrifié, avant et pour que nous puissions communier à la table du Seigneur, et recevoir de lui la vie éternelle. Amen.

dimanche 9 avril 2017

9 avril 2017 - GY - Dimanche des Rameaux et de la Passion - Année A

Mt 21,1-11

Chers frères et sœurs, 

Le geste de Jésus est une provocation pour les scribes et les pharisiens. Il ose monter à Jérusalem comme un roi, comme le roi d’Israël, en accomplissant les rites traditionnels du couronnement. Politiquement, c’est un putsch. 

Plus encore Jésus, montant à Jérusalem, va entrer dans le Temple, où il va chasser les marchands à coups de corde. Et il va s’asseoir pour enseigner. Non seulement Jésus monte à Jérusalem en Roi, mais il va trôner dans le Temple comme Dieu. 

Voilà les deux raisons qui vont déclencher la fureur des scribes et des pharisiens. Et ils vont décider de condamner Jésus à mort.

Aujourd’hui, nous les disciples de Jésus, nous rejoignons la foule de Jérusalem qui acclame Jésus comme Roi et comme Dieu. Et nous n’avons pas peur d’affirmer notre foi !

Maintenant, avançons vers le Temple, comme les foules de Jérusalem, heureuses d’acclamer le Messie.


Is 50, 4-7 ; Ps 21 ; Ph 2,6-11 ; Mt 26,14-27,66

Chers frères et sœurs,

Ils étaient nombreux, ceux qui acclamaient Jésus avec des rameaux ! Et combien sont-ils maintenant à rester jusqu’au bout, avec lui, lors de sa Passion ? A la fin, il ne reste plus que quelques femmes dont Marie, la toute sainte, et Marie-Madeleine la pécheresse pardonnée ; et un homme, un seul, Joseph d’Arimathie, qui est un disciple secret mais qui ose quand même prendre en charge publiquement les funérailles de Jésus.

Il en va toujours ainsi, lorsque Jésus est arrêté et persécuté : tout le monde l’abandonne. Même ceux qui se disent ses plus ardents disciples.
Il y en a un qui le trahit pour de l’argent, parce qu’il se trompe de religion. Il croyait dans un Messie politique qui allait apporter le bonheur sur terre. Mais il n’avait pas compris que Jésus était le Dieu du ciel.
Il y en a un autre qui est prêt à sortir les armes pour défendre Jésus, mais qui, quelques heures plus tard, le renie devant les questions d’une servante de grand prêtre. Tout le monde a peur du pouvoir des grands prêtres et de leurs servantes…

En attendant, le corps de Jésus est dénudé, percé d’épines, giflé, fouetté jusqu’au sang, et cloué à la croix. Mais frères et sœurs, le corps de Jésus, c’est nous. C’est l’un d’entre nous quand il est moqué ou persécuté au nom de Jésus. Nous sommes le Corps du Christ. Lorsqu’un chrétien est persécuté dans le monde pour sa foi, c’est Jésus qui souffre encore sa passion. Mais où sont les autres ?

Chers frères et sœurs, nous sommes nombreux à acclamer Jésus avec nos rameaux aujourd’hui. Demandons à Dieu la grâce que nous soyons aussi comptés parmi le petit reste de ceux qui seront avec Jésus jusqu’au bout et au jour de sa résurrection. Chers frères et sœurs, la plus grande fête des chrétiens, c’est la nuit de Pâques. Amen.

lundi 3 avril 2017

2 avril 2017 - BEAUJEU - 5ème dimanche de Carême - Année A

Ez 37,12-14 ; Ps 129 ; Rm 8,-11 ; Jn 11,1-45

Chers frères et sœurs,

Qui donc est ce Jésus, qui se comporte de manière surprenante et qui accomplit des actions extraordinaires ? Qui donc est ce Jésus qui connait l’histoire cachée de la Samaritaine, la femme aux cinq maris, qui vit avec un homme qui n’est pas son mari ? Qui donc est ce Jésus qui avec de la salive fait de la boue et rend la vue à un aveugle de naissance ? Qui donc est ce Jésus qui sait les choses à distance et qui par la seule puissance de sa prière et de sa parole fait revenir un mort à la vie ? C’est tout le mystère de Jésus, qui est en même temps homme et en même temps Dieu.

Qui peut douter que Jésus est homme ? Devant Marie et ses amis qui pleurent la mort de Lazare, Jésus est bouleversé et il pleure aussi abondamment. Les Juifs présents remarquent l’affection qu’il avait pour Lazare : « Voyez comme il l’aimait ». Et en même temps qui peut douter que Jésus est Dieu ? Il sait à distance que Lazare est mort, et déjà il annonce à ses disciples qu’il va le ramener à la vie. A Marthe, qui dit qu’elle croit que Lazare ressuscitera au dernier jour, Jésus répond : « Moi, je suis la résurrection et la vie ». Devant le tombeau de Lazare, il donne des ordres pour enlever la pierre, il s’adresse à son Père dans la prière, et il ordonne « Lazare, viens dehors ». Qui peut faire revivre un mort par sa seule voix, sinon Dieu lui-même ?
Je n’ai pas commenté le fait que Jésus, devant Marie et ses amis qui pleurent, fut « saisi d’émotion en son esprit et il fut bouleversé ». La traduction n’est pas très bonne. En Araméen, nous avons plutôt « il s’affermit en son esprit et il fut troublé en son âme ». Saint Jean nous a décrit deux réalités. La première est que devant la douleur de Marie et de ses amis, Jésus en tant que Dieu est affermi en esprit : il est rempli de la force de l’Esprit Saint, l’Esprit qui est vie. Et en tant qu’homme, il est troublé dans son âme, il est bouleversé et il se met à pleurer abondamment. De nouveau, arrivé près du tombeau saint Jean nous dit qu’il est repris par l’émotion. Traduisons plutôt que Jésus est à nouveau saisi par la puissance de l’Esprit Saint. C’est l’homme Jésus qui vient au tombeau, mais c’est aussi le Dieu de lumière et de vie qui vient chercher Lazare dans les ténèbres de la mort.

Arrêtons-nous ici sur deux points.

Le premier est qu’entre Lazare et Jésus, le prochain qui va bientôt se trouver au tombeau sera Jésus, après sa Passion. Nous ne savons pas comment Jésus est ressuscité d’entre les morts. Mais ici, en fait, nous voyons Dieu à l’œuvre. Et Jésus le sait. La gloire de Dieu est à l’œuvre pour Lazare comme elle le sera pour lui au jour de Pâques. On roule la pierre. Et un cri se fait entendre : « Lazare, viens dehors » ; c’est la parole de Dieu, créatrice de vie nouvelle. Lazare sort du tombeau enveloppé de son suaire, encore tout attaché par les bandelettes. Mais il sera tout autant question de suaire et de bandelettes pour Jésus. « Déliez-le et laissez-le aller ». On pense aux anges qui ont délivré Jésus et à Marie Madeleine à qui Jésus interdit de le toucher, pour pouvoir le laisser aller. La résurrection de Lazare, c’est la répétition générale de la résurrection de Jésus. Et Jésus sait qu’il est mortel en tant qu’homme. Mais il sait aussi qu’il est vie éternelle en tant que Dieu. La vie de Dieu est plus forte que la mort.
Le second point est une phrase curieuse qui passe presque inaperçue. A Jésus, affermi en esprit et bouleversé, qui demande « où l’avez-vous déposé » ? Marie et ses amis lui répondent « Seigneur, viens, et vois ». Si on retranscrit en Araméen le début de cette phrase, cela donne : « Marane tha, et vois ». « Marane, Seigneur » et « Tha, viens ». « Marana tha, Viens Seigneur Jésus ». C’est la dernière phrase de l’Apocalypse de Saint Jean.
Chers frères et sœurs, nous attendons la venue de Jésus rempli de l’Esprit Saint pour nous sauver des ténèbres de la mort, pour nous rassembler tous dans la vie, et que nous ne soyons plus séparés par la mort. A ceux qui pleurent, comme Marie et ses amis, Jésus ému jusqu’aux larmes, notre Dieu, va répondre par la résurrection.


Chers frères et sœurs, nous allons entrer dans le temps de la Passion, où Jésus, va se révéler comme un homme, faible extérieurement, quoique fort intérieurement, mais dans une lutte terrible où sa volonté humaine va accepter de s’aligner sur la volonté unique de Dieu, qui est de donner sa vie librement, par amour, pour sauver tous les hommes du péché. C’est avec terreur et impuissance que nous allons accompagner Jésus jusqu’à sa croix. Mais aujourd’hui, nous savons déjà que la puissance de sa résurrection va détruire la mort et renouveler la vie. Et ce sera, comme aujourd’hui, l’heure de la gloire de Dieu. Heure que nous attendons pour nous-mêmes et pour tous ceux que nous aimons. Amen.

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