Ac
10,34a.37-43 ; Ps 117 ; 1Co 3,1-4 ; Jn 20,1-9
Chers
frères et sœurs,
La résurrection, personne ne s’y attendait.
Certainement pas les grands prêtres : vous savez bien que les saducéens ne
croyaient pas à la résurrection des morts. Certainement pas non plus les
romains ni les grecs présents à Jérusalem. Lorsque saint Paul évoquera ce sujet
à Athènes, il ne s’y attirera que des moqueries. Et nous apprenons, dans
l’évangile de saint Jean que les disciples non plus ne s’y attendaient
pas : « en effet, les disciples
n’avaient pas compris que, selon l’Écriture, il fallait que Jésus ressuscite
d’entre les morts ». Au bout du compte personne ne s’attendait à la résurrection
de Jésus : c’est une surprise totale. Et l’on comprend que plusieurs
demeurent incrédules.
Saint Jean, l’évangéliste qui donne le plus de
détails historiques authentiques, est le premier à comprendre ce qu’il se
passe. Pour lui, il lui suffit de voir le linge « posé à plat » sur la table du tombeau où reposait Jésus. Cela
l’a tellement frappé, qu’il reviendra par trois fois, dans le passage que nous
avons lu, sur le fait que ce linge était « posé à plat ». Comme si le corps de Jésus s’était évanoui, et
que le linge était retombé comme un soufflé. Que voulez-vous, chers frères et
sœurs, il y a des détails qui ne s’inventent pas. Et quand saint Jean s’est
retrouvé face à cette situation, il a compris immédiatement qu’il était arrivé
au corps de Jésus quelque chose d’extraordinaire.
Nous avons du mal à imaginer ce qu’est la
résurrection, surtout la résurrection d’un corps. On peut encore comprendre
qu’une âme ressuscite, mais un corps ! Et pourtant c’est bien ce qui est
arrivé à Jésus et à son corps de chair. Il est entièrement ressuscité. Ce que
nous n’arrivons pas à comprendre, c’est qu’il s’agit d’une nouvelle étape dans
la création de Dieu, quelque chose d’entièrement nouveau qui concerne l’âme,
l’esprit et le corps. D’ailleurs, lors de ses apparitions Jésus a pu passer à
travers une porte, tout en étant capable de manger du poisson. Son corps a reçu
des facultés pour nous inimaginables, qui sont de l’ordre d’un univers nouveau,
inconnu jusqu’à présent, que pourtant Jésus a essayé de nous expliquer, quand
il parlait de son Royaume.
Ce qu’il y a au tombeau de Jésus, cependant,
dépasse l’entendement de saint Pierre. Devant les linges « posés à plat », il reste
parfaitement incrédule quoique troublé. Il ne comprend pas ce qu’il s’est
passé, et il lui faudra attendre que Jésus vivant se manifeste devant lui, dans
sa chair de ressuscité. Cela est vrai de saint Thomas aussi, vous le savez
bien. Aucun Apôtre – et encore moins saint Paul – n’a cru à la résurrection
lorsqu’elle leur fut annoncée. Mais il a fallu que Jésus lui-même vienne à leur
rencontre pour qu’ils aient la foi.
Et nous alors ? Nous sommes comme le
centurion de Césarée. Nous écoutons, grâce aux évangiles, le témoignage de
saint Pierre, de saint Jean, mais aussi de saint Matthieu et de saint Paul,
dans ses lettres. Et le centurion croit parce qu’il croit au témoignage de
Pierre. Lui ne bénéficie pas d’une vision de Jésus ressuscité, mais il a la
vision de Pierre, qui lui raconte ce qu’il a vécu, ce qu’il a entendu et ce
qu’il a vu. Et cela lui suffit.
Cela est également vrai pour nous, bien
que nous nous sommes bien trop habitués au témoignage des Évangiles et à la
présence d’un évêque, successeur des Apôtres. Et pourtant ces Évangiles qui
remontent aux premiers temps de l’Église, comme ces évêques, dont la
bénédiction remonte de mains en mains jusqu’aux Apôtres, ce sont des
témoignages exceptionnels si l’on veut bien y prêter attention. Nous n’avons
pas la vision de l’explosion que représente la résurrection de Jésus, mais nous
en avons le souffle et le bruit. Quand on ressent le souffle d’une explosion et
qu’on en entend la détonation, on en déduit évidemment qu’il y a eu une
explosion, n’est-ce pas ? Alors, en ayant les Évangiles et les évêques,
nous ne croyons pas à la résurrection de Jésus ? Le centurion n’est pas si
compliqué, et pourtant il n’est pas plus stupide que nous : il a écouté le
témoignage de saint Pierre et il a cru que Jésus était vivant.
Que le Seigneur nous fasse donc la grâce
d’éclairer notre esprit, pour qu’en lisant les Évangiles et en considérant attentivement
ce qu’est un évêque, nous comprenions toujours plus ce que la résurrection de
Jésus signifie concrètement : l’accès pour nous, pauvres pécheurs, à
l’univers nouveau du Royaume de Dieu. Cela est déjà vrai aujourd’hui, par les
sacrements, et demain, au jour où Jésus nous relèvera, à notre tour, d’entre
les morts, pour entrer entièrement, esprit, âme et corps, dans sa joie, sa paix
et sa lumière.