mercredi 10 novembre 2021

06-07 novembre 2021 - NEUVELLE-lès-LA CHARITE - DELAIN - 32ème dimanche TO - Année B

 1R 17,10-16 ; Ps 145 ; Hb 9,24-28 ; Mc 12,38-44
 
Chers frères et sœurs,
 
Jésus est monté au Temple, où il a quelques discussions polémiques avec les scribes. Nous sommes quelque temps avant la Passion. C’est dans ce contexte que Jésus donne l’enseignement que nous avons entendu.
 
À première vue, Jésus semble donner un enseignement pour le moins anticlérical. Dans un premier temps il exhorte les foules à se méfier des scribes qui se donnent belle apparence. Mais parce qu’ils sont en réalité des profiteurs, ils seront d’autant plus sévèrement jugés. Ils devraient au contraire montrer l’exemple d’une vie sainte, c’est-à-dire humble et honnête. Jésus, donc, dénonce le cléricalisme des scribes aux yeux de tous. C’est pour le moins un avertissement sévère à ses Apôtres.
D’ailleurs, dans un second temps, il s’adresse à eux uniquement et leur fait remarquer le geste généreux de la veuve. Il s’agit aussi d’une leçon : ce qui est mis au bien commun de l’Église est le fruit de dons généreux de la part de personnes qui en ont les moyens, mais aussi de beaucoup de personnes qui, elles, font de réels sacrifices. Parce que leur geste d’offrande est pour elles d’une extrême importance. Les Apôtres ne doivent donc pas gérer les biens de l’Église à l’emporte-pièce, et encore moins en abuser.
Nous aurions donc ici un enseignement de Jésus à ses disciples pour le moins très actuel, et d’une portée anticléricale tout à fait remarquable.
 
Mais cette lecture est-elle conforme à l’intention de Jésus à l’époque ? En réalité, je pense que Jésus voyait plus loin, plus profond, et que le message qu’il délivrait à ses Apôtres – quand il attirait leur attention sur la réalité des choses et des personnes – ce message concernait aussi le Royaume des cieux. Voyons comment.
Jésus est dans le Temple, c’est-à-dire dans la Maison de son Père. Le Temple est par rapport à ses environs, ce que le ciel est à la terre. Or Jésus rencontre dans le Temple des scribes, c’est-à-dire des serviteurs de Dieu, qui en ont l’apparence, mais qui n’en sont pas vraiment, et qui profitent des bénéfices que leur donne leur qualité. Ce sont exactement ce que sont dans le ciel les démons par rapport aux anges. Les démons sont des anges qui ont renoncé à adorer Dieu, qui se font passer pour ce qu’ils ne sont plus, et qui profitent de leur état angélique pour abuser les gens innocents. Or Jésus ici, en dénonçant les scribes, dénonce aussi et combat en réalité les démons. Et il attire l’attention de tous quant à leur perversité. Mais nous comprenons que ce qui vaut pour les anges et les démons vaut aussi pour tous les baptisés appelés à la sainteté, qu’ils soient clercs ou pas.
 
De même la veuve, qui vient mettre dans le trésor tout ce qu’elle a pour vivre, accomplit ici un geste extrême. Cette petite dame est dans une situation très différente de celle de la veuve de Sarepta. Cette dernière donne tout à Elie, et celui-ci, à partir de peu – et avec l’aide de l’Esprit Saint – fait beaucoup : la veuve de Sarepta a finalement fait fructifier sa farine et son huile. Tandis que la petite veuve du Temple, après avoir tout donné, n’a plus rien du tout pour vivre. C’est un geste humainement suicidaire. Si donc, on considère qu’à travers ces piécettes c’est toute sa vie que la veuve a donnée au Temple, c’est-à-dire à Dieu, alors cela veut dire qu’elle lui appartient désormais. Elle lui est consacrée. Il revient alors à Dieu ou au Temple d’assurer sa vie désormais. En fait, cette femme fait comme Jésus va faire durant sa Passion : il va offrir sa vie humaine tout entière à son Père, pour le salut des hommes, et son Père la lui rendra aussitôt en vie glorieuse et éternelle.
Au contraire, ceux qui veulent négocier leur vie éternelle avec Dieu pour conserver autant que possible une bonne part de vie humaine, en réalité risquent fort de perdre la première après la seconde. La leçon de Jésus est donc semblable à cette parole : « Celui qui veut sauver sa vie la perdra ; mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Évangile la sauvera. »
Finalement, savoir si on est ange ou démon, ou si on négocie un peu ou beaucoup sa vie éternelle avec le Bon Dieu, ce ne sont pas là d’abord des histoires de cléricalisme : tout le monde est concerné.
 
Chers frères et sœurs, pour finir, je n’arrive pas à me retirer de l’esprit que, lorsque Jésus rencontre une veuve, il voit en elle Marie sa Mère. Or la petite veuve qui donne tout au trésor du Temple, n’est-elle pas Marie, qui a donné tout ce qu’elle avait pour vivre ? D’abord elle-même, à l’Annonciation ; puis son fils unique, Jésus, durant la Pâque ? Et finalement, c’est bien elle, Marie, la pauvre veuve qui est maintenant louée et couronnée dans le Temple, par Jésus lui-même, c’est-à-dire dans la Jérusalem céleste.


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