Gn 12,1-4a ; Ps
32 ; 2Tm 1,8b-10 ; Mt 17,1-9
Chers
frères et sœurs,
La
Transfiguration est un moment très important de la vie de Jésus, qui a lieu
entre son baptême et sa Passion. Mais pour bien comprendre de quoi il s’agit,
il faut revenir à l’Ancien Testament.
La
Transfiguration de Jésus a lieu à l’époque de la fête de Soukkôt, c’est-à-dire la
« fête des Tentes ». De quoi s’agit-il ? Cette fête avait lieu
six jours après le Yom Kippour, la fête du « Grand Pardon ». Elle
durait une semaine. On y commémorait deux choses :
D’abord
les quarante années passées par les Hébreux dans le désert, après le passage de
la Mer Rouge. Le peuple habitait alors sous la tente ou dans des cabanes et il
était protégé par la nuée lumineuse, c’est-à-dire la présence de Dieu. Cette
présence assurait aussi le peuple qu’il ne manquerait pas d’eau, ni de
nourriture. C’est pourquoi, lors de la fête des Tentes, les juifs fabriquent
des cabanes pour y manger un bon repas. C’est toujours le cas aujourd’hui.
Ensuite
– lors de cette fête – on commémore aussi l’ascension de Moïse sur le Mont
Sinaï, où il resta quarante jours et quarante nuits en présence de Dieu, dont
il reçut les Tables de la Loi. C’est pourquoi, les juifs se rendent aussi à la
synagogue pour y faire la lecture des Psaumes et de certains passages de la
Torah, c’est-à-dire de la Loi.
Autrefois,
le Temple à Jérusalem faisait la synthèse entre ces deux traditions : il
était une sorte de grande cabane et en même temps il était situé sur la
montagne. La présence de Dieu reposait sur lui. Dieu assurait ainsi sa protection
au peuple et sa bénédiction, par les sacrifices d’animaux, consommés sur place,
et par l’aspersion d’eau pour bénéficier de l’abondance des pluies. Enfin, on y
faisait aussi, bien sûr, la lecture de la Loi.
Maintenant
revenons à Jésus. Comme Moïse et Elie, Jésus monte sur la montagne. Mais là où
Moïse avait été ébloui par la lumière de Dieu, ici c’est Jésus lui-même qui est
éblouissant. A l’évidence, cela veut dire que Jésus est Dieu. Habillé de blanc,
il est aussi prêtre et roi. Le fait que Moïse et Elie l’entourent signifie que
ceux qui sont au ciel peuvent voir la face de Dieu, qu’ils résident dans sa
lumière et qu’ils sont vivants. Moïse et Elie prophétisent déjà ici la
communion des saints.
En
présence de Dieu, on est sous sa protection et on reçoit sa bénédiction : on
est bien. On est heureux. Et c’est exactement ce que l’on fête durant la fête
des Tentes. Saint Pierre a bien compris cela et il voudrait que ce moment dure
longtemps : il veut donc construire des
cabanes.
Mais
il n’a pas compris que la vraie cabane, sur laquelle va venir reposer la
présence de Dieu, la nuée, ce n’est maintenant plus une chose matérielle, mais
c’est Jésus, Moïse, Elie, Pierre, Jacques et Jean, tous ensemble : c’est
l’Église. C’est pourquoi la nuée vient les prendre tous sous son ombre :
ils sont devenus le vrai Temple de Dieu. Et dans ce Temple nouveau, une voix se
fait entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je
trouve ma joie : écoutez-le ». Jésus est donc lui-même la Loi
nouvelle, celle qui est inscrite non pas sur des tables de pierre, mais sur des
cœurs de chair : les cœurs des trois Apôtres présents.
Ainsi
donc, lors de la Transfiguration de Jésus, ce qui était symbolisé par les
cabanes et le Temple, sur lesquels reposaient la présence de Dieu, est
maintenant réalisé par l’Église sur laquelle repose la même présence de Dieu :
l’Esprit Saint donné à la Pentecôte.
Et
la Loi donnée à Moïse est devenue Jésus lui-même, l’Évangile, confié aux
Apôtres. Il est inscrit non pas sur des tables de pierre, mais dans leur cœur.
La prophétie de la fête des Tentes s’accomplit en Jésus et dans son corps qui
est l’Église.
Cela
représente un tel changement que – sur le coup – les apôtres n’ont pas compris.
D’ailleurs Jésus leur a demandé de se taire. Il faudra attendre sa résurrection
pour qu’ils puissent comprendre vraiment ce qu’il s’est passé sur la Montagne
sainte. Et voici ce qu’en a écrit saint Pierre dans sa seconde lettre :
« Ce
n’est pas en ayant recours à des récits imaginaires sophistiqués que nous vous
avons fait connaître la puissance et la venue de notre Seigneur Jésus Christ,
mais c’est pour avoir été les témoins oculaires de sa grandeur.
Car
il a reçu de Dieu le Père l’honneur et la gloire quand, depuis la Gloire
magnifique, lui parvint une voix qui disait : « Celui-ci est mon Fils,
mon bien-aimé ; en lui j’ai toute ma joie. » Cette voix venant du
ciel, nous l’avons nous-mêmes entendue quand nous étions avec lui sur la
montagne sainte.
Et
ainsi se confirme pour nous la parole prophétique ; vous faites bien de fixer
votre attention sur elle, comme sur une lampe brillant dans un lieu obscur
jusqu’à ce que paraisse le jour et que l’étoile du matin se lève dans vos
cœurs. »