dimanche 25 août 2024

24-25 aout 2024 - LARRET - CHARCENNE - 21ème dimanche TO - Année B - Saint Louis

 Jos 24, 1-2a.15-17.18b ; Ps 33 ; Ep 5, 21-32 ; Jn 6, 60-69
 
Chers frères et sœurs,
 
Voilà. C’est la fin de la lune de miel entre les foules de Galilée et Jésus, entre tous ces braves gens qui espéraient qu’il devienne leur roi, pour les libérer de l’impérialisme romain et de la colonisation culturelle grecque. Et qu’il rende sa liberté et sa fortune à Israël, le peuple élu de Dieu. En effet, Jésus n’était-il pas le descendant du roi David ? N’était-il pas le Messie tant attendu, celui qui avait reçu l’onction du Seigneur au moment de son baptême dans le Jourdain ? Il avait tout, humainement, pour réussir… Mais qu’est-ce qui a bloqué ?

Jésus a refusé tout pouvoir terrestre, parce qu’il n’est pas seulement roi pour Israël, mais pour toute l’humanité. Son Royaume n’est pas le « Pays promis » au sens géographique – de la mer à l’Euphrate pour voir large… mais le « Pays promis » est un univers nouveau, régénéré par la puissance de l’Esprit Saint, pour l’éternité. Nous ne comprenons pas bien ce que c’est. Ou plutôt, nous en avons connaissance par quelques éclairs fugitifs comme la Transfiguration, ou les apparitions de Jésus ressuscité, ou certains miracles avérés… et bien sûr, par tout de ce que Jésus nous en a dit, qui est consigné dans le témoignage des Apôtres.
 
Mais le refus de Jésus de devenir roi sur la terre n’est pas le problème central ; le véritable point d’achoppement entre lui et les foules porte sur sa véritable identité : « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. » Par ces paroles, Jésus affirme non seulement qu’il est lui-même Dieu fait homme – il est « la Parole de Dieu faite chair » comme dit saint Jean ; mais en plus qu’il est la nourriture vitale de tout homme : il est le pain vivant, le pain de la vie éternelle. Et il n’y en a pas d’autre.

Aujourd’hui comme hier, et demain aussi, ces affirmations paraissent beaucoup trop fortes. – « Faut reconnaître : c’est du brutal… » dirait Raoul Volfoni ! Ainsi beaucoup renoncent et s’en vont. Ils sont très peu, ceux qui comme saint Pierre ont le courage d’accepter de boire à la coupe âcre que leur présente Jésus : « Voulez-vous partir, vous aussi ? » ; « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. Quant à nous, nous croyons, et nous savons que tu es le Saint de Dieu. » Pour pouvoir dire cela et l’assumer par toute sa vie, il faut un coup de pouce venant de la part de Dieu : la grâce ; certains diront un petit grain de folie… ! « Voilà pourquoi – dit Jésus – je vous ai dit que personne ne peut venir à moi si cela ne lui est pas donné par le Père. »
 
Il y a deux conséquences à cet état de fait. La première concerne chacun d’entre nous personnellement. Devant la coupe que nous présente Jésus, nous avons le choix : partir discrètement, comme les foules ; ou bien  confesser la foi, comme saint Pierre, en acceptant d’y boire. Soyons clair : cela n’a rien d’évident, ni de le faire certains ont peur de devenir aveugles !, ni de l’assumer ensuite par toute sa vie. 
Une chose est certaine cependant, c’est que nous tous qui sommes ici, d’une manière ou d’une autre, nous avons déjà fait ce choix positivement. Nous l’avons fait au jour de notre baptême, où nous avons reçu la grâce de Dieu et notre vocation chrétienne. Sinon, nous ne serions pas là. Nous avons déjà reçu la vocation d’être configurés à Jésus, prêtre, prophète et roi, avec sa croix sur la terre et sa gloire dans le ciel, pour l’éternité. Et déjà nous nous nourrissons de sa vie, par la communion eucharistique. Qu’à notre dernier jour, le Seigneur puisse simplement nous trouver fidèles.
 
La seconde conséquence concerne toute société humaine. Saint Louis, dont c’est la fête aujourd’hui peut nous aider à comprendre. Saint Louis fait partie de ceux qui croient fermement que Jésus est Dieu fait homme et qu’il est le vrai pain de la vie éternelle. Il a compris deux choses :
D’une part que sa responsabilité comme roi de France est que son royaume soit gouverné en tenant compte de la réalité dévoilée par Jésus – c’est-à-dire que s’il désire un royaume de France libre et paisible en ce monde, il faut que ce royaume soit d’abord spirituellement, intellectuellement et culturellement nourri par la vie véritable qui vient du royaume des cieux.
Et d’autre part, par conséquent, saint Louis a compris que son devoir comme roi de France, est de commencer ce programme par lui-même, le premier, pour gouverner son royaume avec sagesse et être un exemple vivant pour tous. Ainsi son modèle de royauté est Jésus lui-même. Comme Jésus roi, saint Louis rend justice et prend soin des pauvres ; comme Jésus prêtre, il prie et fait prier autour de lui, en se sacrifiant lui-même s’il le faut ; comme Jésus prophète, il témoigne de la réalité de Dieu et de son règne éternel. Pour cela, par exemple, il fait construire magnifiquement la Sainte-Chapelle.

Comme saint Louis de France, saint Étienne de Hongrie, saint Édouard d’Angleterre, saint Sigismond de Bourgogne, saint Vladimir de Russie, saint Olav de Norvège, saint Éric de Suède mais aussi sainte Adélaïde, Impératrice du Saint Empire Romain Germanique, sainte Marguerite d’Écosse, sainte Edwige de Pologne ou sainte Élisabeth de Portugal, tous ont voulu faire de leur royaume terrestre une part du royaume céleste. Ils l’ont réalisé en partie, par la sainteté de leur vie personnelle et leur sage gouvernement, et ils ont fait l’Europe chrétienne, ce beau jardin dont nous avons hérité.
 
Chers frères et sœurs, saint Louis comme saint Pierre, et bien d’autres, ont bu à la coupe de la vie éternelle que leur a présentée Jésus. Pas seulement pour leur salut personnel, mais aussi pour le salut de leurs proches et d’un grand nombre. C’était leur vocation, leur responsabilité et leur devoir. Alors… et nous ? Que faisons-nous ? Buvons-nous, nous aussi, à la coupe bien remplie que Jésus nous tend ?

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