Is
52, 7-10 ; Ps 97 ; He 1,1-6 ; Jn 1, 1-18
Chers
frères et sœurs,
Nous
pourrions méditer des heures entières et des jours entiers le Prologue de Saint
Jean. Mais peut-être pouvons-nous faire quelques observations rapides.
Tout
d’abord, l’Évangile de Jean débute par « Au commencement », de
la même manière que le Livre de la Genèse débute par « Au commencement ».
C’est évidemment intentionnel. Saint Jean veut nous faire comprendre que
l’Évangile, la venue, la mort et la résurrection de Jésus sont à comprendre à
partir du livre de la Genèse, et de toutes les Écritures ; mais aussi que
cet Évangile nous présente la nouvelle création, celle du Royaume des cieux,
auquel nous participons déjà maintenant par notre baptême. Il est donc question
de vie et de vie nouvelle.
Nous
pouvons observer que le texte est structuré en trois parties, entrecoupée par
deux évocations de saint Jean-Baptiste.
Il
n’est pas très étonnant de trouver ici la mention de Jean-Baptiste, car la
tradition tient que saint Jean a d’abord été un disciple de Jean-Baptiste. Mais
il a suivi les indications de son maître, à savoir qu’il fallait se mettre à la
suite de Jésus, l’Agneau de Dieu, tandis que lui, Jean-Baptiste devait
s’effacer. Saint Jean a donc pu vouloir montrer à quel point la mission de
Jean-Baptiste était importante pour pouvoir comprendre qui est Jésus ; il
a aussi pu vouloir montrer à ses anciens condisciples que la vraie lumière est
Jésus et non pas Jean.
Toujours
est-il que les trois paragraphes qui parlent du Verbe de Dieu – la Parole de
Dieu, de la Lumière, de la vie, du Fils de Dieu, de Jésus en réalité, semblent
suivre une progression.
Le
premier paragraphe parle de Jésus comme du Verbe de Dieu, par lequel le Père a
créé tout l’univers, en nommant les choses : « Que la lumière soit »,
par exemple. Le Père a tout créé par sa Parole. Parce qu’elle est une Parole
vivifiante qui est aussi lumière. Un bon physicien ne serait pas étonné :
il sait bien que la lumière est tout autant une onde qu’une particule. Ces
éléments sont comme inséparables. Et surtout que le néant ou les ténèbres, sont
incapable de les dominer. Comme la lumière d’une étoile peut percer la nuit sur
des milliard d’années-lumière. Rien ne semble pouvoir l’arrêter.
Autrement
dit, la première manifestation de Jésus, comme Verbe de Dieu, implique qu’il
est lié à tout ce qui existe dans le monde, que ce soit les personnes comme les
choses, la matière.
Or,
parmi les créatures, l’une d’entre elle a été choisie pour rendre témoignage à
Jésus comme Parole créatrice de Dieu, vie et lumière. Tout d’abord (et c’est le
second paragraphe) par le fait que Jean est lui-même éclairé par cette Parole,
cette vie et cette lumière créatrice. Cette illumination n’est pas un effet
naturel, mais un effet surnaturel, comme une deuxième naissance : « Ils
ne sont pas nés du sang, ni d’une volonté charnelle, ni d’une volonté
d’homme : ils sont nés de Dieu. » Cette définition s’applique à
tous les prophètes, à tous ceux qui sont devenus « enfants de Dieu ».
Et Jean-Baptiste est le plus grand parmi eux. Parce qu’il est celui qui
témoigne de la Parole, vie et lumière de Dieu.
Vous
voyez comment nous avons fait un pas par rapport au premier paragraphe. Là,
toute chose et toute personne porte en lui ou elle la marque de fabrique de la
Parole de Dieu ; et ici il se peut que cette Parole viennent les éclairer
de l’intérieur, pour leur donner une intensité encore plus forte. C’est la
différence entre une ampoule éteinte et une ampoule allumée par le courant
électrique.
Alors,
troisième paragraphe, nous passons à quelque chose de nouveau et de tout à fait
étonnant. C’est que cette Parole créatrice, ne laisse pas seulement sa marque
dans ce qui existe ; elle ne fait pas qu’illuminer de l’intérieur ce qui
existe, de manière spirituelle ; tout à coup elle devient elle-même une
réalité existante, visible et palpable, accessible aux sens : la Parole
créatrice, la vie et la lumière, c’est Jésus de Nazareth, lui et personne ou
rien d’autre. Et le témoignage de Jean – sa force – lui qui est illuminé
intérieurement par cette vie et cette Parole de Dieu, est de le désigner
nommément : « le Verbe de Dieu, par qui tout a été créé, et qui illumine
les prophètes et les enfants de Dieu, c’est lui : c’est Jésus. »Et
donc, du coup, ce qui était invisible au commencement, tout à coup est devenu
visible : « Dieu, personne ne l’a jamais vu ; le Fils unique,
lui qui est Dieu, lui qui est dans le sein du Père, c’est lui qui l’a fait
connaître. »
Au
bout du compte, et pour finir, nous voyons comment Dieu se révèle à nous :
par le fait que nous existons dans la création en portant sa marque de
fabrique ; par l’Esprit qui le fait habiter en nous et nous
illumine ; et enfin directement par lui-même dans le monde, charnellement,
physiquement. Et ce dernier pas, cette révélation ultime de Dieu pour l’homme,
c’est justement Noël, quand Jésus naît comme un petit enfant.