Ac
2,1-11 ; Ps 103 ; Ga 5,16-25 ; Jn 15,26-27 ; 16,12-15
Chers
frères et sœurs,
La
fête de la Pentecôte est l’aboutissement de tout le chemin que nous avons
parcouru depuis… le mercredi des cendres, en passant par Pâques, bien
sûr ! En effet, nous avons commencé par nous reconnaître pécheurs en ce
monde. Puis Jésus est venu d’auprès du Père, prendre sur lui le poids de nos
fautes. Par sa croix et par la libre offrande de sa vie, il nous a obtenu le
pardon. Et la réalité de ce pardon – c’est-à-dire la communion retrouvée avec
Dieu et entre-nous – c’est justement la Pentecôte, le don de l’Esprit Saint.
Nous sommes réunis, nous sommes réconciliés, et c’est pourquoi nous sommes
remplis de joie. D’une certaine façon, c’est la fin du film : le
« Happy End ».
À
la Pentecôte, il y a donc un accomplissement, un couronnement. En effet, les
cinquante jours après Pâques, se calculent de la manière suivante : sept semaines
de sept jours, sept fois sept – perfection des temps – plus un jour pour
marquer le premier jour de la nouvelle création.
En
effet, nous devons être bien conscients que la Pentecôte n’est pas tant la fin,
l’aboutissement de l’histoire de notre réconciliation avec Dieu, c’est aussi et
surtout le premier jour de notre vie nouvelle et éternelle avec lui, dans son
royaume.
Ainsi,
la Pentecôte est-elle aussi une prophétie : la prophétie du dernier jour
du monde, qui sera aussi le premier jour de la création entièrement renouvelée.
Et c’est la raison pour laquelle nous voyons des juifs de toutes les nations se
regrouper autour des Apôtres, comme à la fin des temps, tous les hommes de tous
les temps et de tous les pays se retrouveront autour du trône de l’Agneau, en
présence des Apôtres et de tous les saints. Et ce sera le début du Règne
éternel de Dieu pour tous.
Mais,
vous me direz : la Pentecôte, elle a déjà eu lieu, à l’époque des Apôtres !
Elle n’est pas seulement aujourd’hui, ou à la fin du monde ! Et c’est
vrai : vous avez entièrement raison. La Pentecôte est déjà commencée, et
l’Esprit Saint ne cesse pas d’être répandu dans le monde pour faire grandir la
création nouvelle du Règne de Dieu.
Alors,
où voyons-nous l’Esprit Saint à l’œuvre et cette nouvelle création ? Dans
l’Église elle-même, qui est vivifiée par les sacrements qui ne peuvent pas
exister sans l’Esprit Saint. Par l’Esprit Saint, un homme pécheur devient un fils
de Dieu ; du pain et du vin deviennent le Corps et le Sang de Jésus ;
un homme est configuré à Jésus pour manifester sa présence jusqu’à la fin des
temps ; un homme et une femme deviennent Un pour l’éternité, réalisation
de l’alliance éternelle entre Dieu et l’humanité ; les péchés sont
pardonnés car le règne de l’amour est plus fort que la mort ; une personne
malade est configurée à Jésus en sa Passion pour ressusciter avec lui dans sa
vie nouvelle. Les sacrements transforment le monde en création nouvelle. Et
l’Église elle-même est déjà cette nouvelle création, rendue visible. Une
célébration, une messe, c’est toujours une petite Pentecôte, en attendant la
Pentecôte définitive.
Pour
finir, je veux vous mettre en garde à propos d’une chose très importante. Ce ne
sont pas les Apôtres, ou nous-mêmes, qui faisons l’Église : l’Église n’est
ni une association Loi de 1901, ni un parlement. Parce que nous sommes
incapables de nous donner l’Esprit Saint à nous-mêmes. Au contraire, les
Apôtres prient et attendent l’Esprit promis par Jésus. L’Église, nous ne la
bâtissons pas par nous-mêmes : nous la recevons de l’Esprit Saint.
L’Église,
c’est exactement l’inverse de la tour de Babel. Babel, ce sont les hommes qui
s’unissent par la force de leurs bras, de leur volonté, pour bâtir un monde à
leur idée, avec une langue unique, une pensée unique, une action unique :
monter le plus haut possible vers le Ciel pour prendre la place de Dieu. Vous
voyez comme ce projet est toujours actuel. Or, nous le savons, Babel s’est
écroulée.
Lorsque
l’Esprit vient, il ne nous moule pas dans une langue unique, une pensée unique,
une action unique : l’Esprit Saint, l’Esprit de l’Église n’est pas
totalitaire. Au contraire, il exalte la diversité des langues, des esprits et
des vocations – comme dit Saint Paul – pour en faire une harmonie, comme un
orchestre, au service de la partition dirigée par Dieu : celle de la
communion d’amour, de la vie éternelle, dans la joie, la lumière et la paix.