Is 25,6a, 7-9, Ps
121 ; Lc 12,35-40
Chers
frères et sœurs,
C’est
l’expérience commune que nous avons tous, que certaines morts arrivent comme
une libération au bout d’une longue maladie, tandis que d’autres surviennent
comme par effraction, par surprise. Dans le premier cas on peut s’attendre à
l’issue fatale et s’y préparer, dans le second le choc est très brutal, parfois
trop, et on se trouve déstabilisé, parfois durablement. Car nul n’a prévu ni
annoncé un tel événement. Et on est bouleversé.
Jésus
nous invite donc, à nous mettre en état de veille. Pour lui, il s’agit d’une
activité très concrète qui consiste à être en « tenue de service »,
« la ceinture autour des reins », et « la lampe allumée ».
La
« tenue de service », n’est-ce pas celle du serviteur de Dieu,
c’est-à-dire son vêtement de baptême ? Se trouver en « tenue de
service », cela suppose donc que l’on est conscient d’être prêtre,
prophète et roi, et d’en accomplir les fonctions ; d’être fils ou fille de
Dieu et de se comporter comme tel. Ainsi, par tout notre cœur, toute notre âme
et tout notre esprit, par toute notre activité, il s’agit de rendre grâce à
Dieu. Bien sûr, nous sommes pécheurs et cette « tenue de service »
n’est sans doute pas immaculée comme au jour de notre baptême. Mais l’important
est d’être habillé et de se tenir prêt à servir, c’est-à-dire à chanter la
gloire de Dieu, à annoncer l’Évangile, à mener notre vie avec droiture, le tout
avec un cœur généreux et dans la joie. Telle est la « tenue de service ».
Mais
cela ne suffit pas : Jésus ajoute qu’il faut avoir « la ceinture
autour des reins ». C’est déjà bien d’être en tenue de service, mais « la
ceinture autour des reins », cela fait référence à la nuit de la
Pâque, où les Hébreux encore esclaves en Égypte ont veillé la nuit en attendant
de pouvoir prendre la route pour la Mer Rouge, afin d’acquérir la liberté.
Avoir « la ceinture autour des reins », cela veut dire :
ne pas être attaché aux bien terrestres, mais être prêt à partir pour gagner
les biens célestes. Pour Jésus, un disciple, c’est quelqu’un qui a les pieds
sur terre et la tête au ciel, le regard tourné vers Dieu. Et cela ne peut pas
se faire – il faut le reconnaître – sans un combat intérieur, sans un combat
qui ressemble à la Passion, à la mort et à la résurrection de Jésus. Avoir
« la ceinture autour des reins », c’est être prêt – quelles
que soient les circonstances – à partir, et à effectuer des travaux de force, à
combattre éventuellement, dans la foi.
Enfin
Jésus ajoute qu’il faut « garder sa lampe allumée ». Garder
une lampe allumée, c’est garder vive la flamme de la foi, la lumière de
l’espérance, la chaleur de la charité. Au fond, c’est là l’essentiel de
l’attitude de veille que doit conserver un disciple de Jésus. Garder sa lampe
allumée, c’est faire mémoire de lui et de son amour pour nous, en tout temps et
en toutes circonstances. C’est là une grâce qu’il faut lui demander sans cesse.
Alors tout le reste devient plus facile. Chacun peut comprendre que quand on
aime et qu’on sait qu’on est aimé, on est impatient de voir arriver celui qu’on
aime. On a alors évidemment tout préparé pour le recevoir, et on a tout mis en
ordre dans la maison. C’est plus facile d’avoir une ceinture autour des reins
et d’être en tenue de service quand la lumière est allumée.
Ainsi
donc « restez en tenue de service, votre ceinture autour des reins, et
vos lampes allumées » est une description d’une vraie vie chrétienne,
d’une attitude spirituelle et morale particulière, qui est prête à s’exprimer
par l’action. Alors heureux seront ceux qui seront trouvés dans ces
dispositions au moment où Jésus viendra leur rendre visite. Car le Seigneur
Jésus se regardera en eux comme dans un miroir. Et il s’y reconnaîtra. N’est-il
pas le premier à garder constante sa lampe allumée, la lampe de l’amour du Père ?
N’est-il pas le premier à avoir une ceinture autour des reins pour partir, pour
partir au ciel, en vivant d’abord sa Passion et le combat qui va
avec ? N’est-il pas le premier à être en tenue de service ? En effet,
c’est par le lavement des pieds de ses disciples que l’histoire de la Passion a
débuté. Alors Jésus était prêt, quand l’heure de passer de ce monde à son Père fut
venue.
Chers
frères et sœurs, nous ne connaissons ni le jour ni l’heure, mais Jésus nous
invite à nous y préparer. Et non seulement pour nous-mêmes mais aussi pour nos
proches. Il ne s’agit pas de s’arrêter de vivre et de préparer notre
enterrement, mais de vivre notre vie d’aujourd’hui très intensément, en nous
laissant guider et illuminer par l’Esprit Saint. Il ne s’agit pas de regarder
le monde, les personnes et les choses avec un regard dépressif, mais au
contraire de tout préparer, et des fois de tout réparer, pour accueillir Jésus
qui vient. Alors en accueillant Jésus, nous accueillerons avec lui notre
bonheur, le profond bonheur de retrouver dans la paix et la joie tous ceux et
celles que nous aimons, dans une communion d’amour qui ne finira pas.