S
1b.6-7.10-13a ; Ps 22 ; Ep 5,8-14 ; Jn 9,1-41
Chers
frères et sœurs,
Le combat de l’Aveugle-né contre les
pharisiens est le même que celui de Jésus durant sa Passion, le même que celui
des martyrs face à leurs persécuteurs, et le même que le nôtre aujourd’hui face
à de plus en plus de gens qui n’aiment pas Jésus.
Dans tous les cas, les opposants ne veulent
pas reconnaître que Jésus est Dieu, mais d’abord ils refusent d’accepter la
réalité des faits. Il s’agit, ici, de la guérison de cet homme aveugle de
naissance, et pour ce qui concerne Jésus, de sa résurrection d’entre les morts.
Ce qui caractérise les pharisiens, c’est leur
volonté de fabriquer la réalité selon leurs propres idées, par tous les moyens y
compris l’intimidation et jusqu’à la violence. Ils ont décidé que Jésus est un
pécheur, donc il ne peut pas être le Messie, et donc il ne peut pas y avoir eu
un miracle. Ils font passer leurs idées d’abord et ils se ferment à la réalité
qu’ils ont pourtant sous les yeux.
Au contraire, l’Aveugle-né explique qu’il ne
sait pas qui est Jésus, ni où il est. Il ne sait pas si il est juste ou
pécheur. En revanche, ce qu’il sait, c’est : « Il m’a mis de la boue sur les yeux, je me suis lavé, et je vois ».
L’aveugle-né n’a pas d’idées sur les circonstances, il ne porte pas de jugement
sur Jésus, mais il témoigne simplement de ce qui lui est arrivé : avant il
était aveugle, et maintenant il voit. Il en va de même pour le témoignage des
Apôtres : avant, Jésus était mort, et maintenant, il est vivant. C’est tout.
C’est un fait.
Devant la réalité, les idéologies se
fracassent. Les pharisiens eux-mêmes s’emmêlent dans leurs discours : ils
disent une chose et son contraire. A l’Aveugle-né, ils disent, à propos de
Jésus : « Nous savons, nous,
que cet homme est un pécheur » et, à la fin : « Celui-là, nous ne savons pas d’où il est » !
Or l’Aveugle-né n’est pas stupide, il relève tout de suite la
contradiction : « Voilà bien
qui est étonnant ! Vous ne savez pas d’où il est ! », alors
qu’ils avaient dit « Nous savons que
cet homme est un pécheur », et il ajoute, avec son bon
sens : « Dieu, nous le
savons, n’exauce pas les pécheurs ». La fausseté des pharisiens est dévoilée.
Ils se mettent aussitôt en colère et jugent l’Aveugle-né avec mépris :
« Tu es tout entier dans le péché
depuis ta naissance, et tu nous fais la leçon ? » Et ils le
jettent dehors. Quand on ne veut pas voir la réalité, on la cache, on chercher
à la transformer, ou on la détruit.
Pour l’Aveugle-né, c’est l’inverse : les
faits sont là en premier, les idées et le sens des événements viennent après.
D’ailleurs, il ne comprend pas tout de suite ce qu’il se passe. Au premier
interrogatoire, les pharisiens lui demandent : « Et toi, que dis-tu de lui ? ». Il répond « C’est un prophète ». Il a compris
que Jésus était quelqu’un qui était habité par la puissance de Dieu, mais il
n’a pas encore compris que Jésus est Dieu.
C’est pourquoi Jésus le rencontre à nouveau.
Il lui demande s’il croit au « Fils de l’Homme » ? La réponse est
extraordinaire : « Qui est-il
pour que je croie en lui ? ». L’homme a besoin de reconnaître
Dieu pour pouvoir croire en lui. Et Jésus lui répond : « Tu le vois, et celui qui te parle, c’est lui ».
Jésus répond trois choses : d’abord, constate quel homme je suis ;
ensuite, écoute ma parole ; et alors, tu pourras me reconnaître par ma
signature particulière : « c’est
lui » ; qui rappelle cet instant où Dieu a donné lui-même son Nom
à Moïse au Sinaï : « Je suis
celui qui suis ». Dieu « c’est lui ». La réponse de
l’Aveugle-né est immédiate : « Je
crois, Seigneur », et il se prosterne devant Jésus, car il a vu, puis il
a compris dans son intelligence et dans son âme que ce Jésus, qui est là devant
lui : c’est Dieu.
Chers frères et sœurs, l’Evangile n’est pas
une idéologie. Il est d’abord l’histoire de Jésus qui se raconte. Si les Apôtres
et les évangélistes nous ont raconté l’histoire de Jésus, c’est pour que nous
voyions les faits avec eux. Et ensuite, toujours avec eux, que nous en
comprenions le sens. Alors nous sommes prêts, lorsque Jésus vient nous visiter,
avec sa grâce, à croire qu’il est Dieu et qu’il est réellement vivant
maintenant.
Chers frères et sœurs, nous vivons dans un
monde où les idées passent avant la réalité, comme dans la tête des pharisiens.
Nous-mêmes, nous réagissons souvent comme eux, sans nous en rendre compte.
C’est pour cela qu’il y a de moins en moins de chrétiens. Alors, demandons au
Seigneur la grâce du bons sens, celle qui fait voir et accepter la réalité
d’abord, pour essayer de la comprendre ensuite. Et à la fin, trouver la joie de
la foi en Jésus ; Dieu qui est toujours, à chaque instant de notre vie,
vivant avec nous, pour nous faire entrer tous ensemble dans sa vie éternelle.