mercredi 22 mars 2017

19 mars 2017 - RAY-SUR-SAONE - 3ème dimanche de Carême - Année A

Ex 17,3-7 ; Ps 94 ; Rm 5,1-2.5-8 ; Jn 4,5-42

Chers frères et sœurs,

Il est toujours possible de se rendre à Naplouse, en Palestine, pour boire de l’eau vive au Puit de Jacob. Là, depuis des siècles, dans ces montagnes semi-désertiques de Samarie, l’eau coule et rafraichit hommes et troupeaux. Sans cette eau, il ne serait pas possible de vivre dans cet endroit. Comme partout et toujours, l’eau est un élément nécessaire à la vie.
La rencontre entre Jésus et la Samaritaine est tout sauf anodine. D’abord parce qu’elle se passe à midi, en plein « cagnard », ce qui est inhabituel ; ensuite, parce que les juifs et les samaritains ne se parlent pas. Et surtout, parce qu’il est interdit à un homme, surtout un rabbi, de parler avec une femme en public. Mais pour quelqu’un qui est familier des Ecritures, de l’Ancien Testament, cette rencontre fait ressortir des histoires anciennes qui lui donnent un goût particulier.

C’est au bord d’un puit que Jacob a rencontré Rachel, un puit qui servait à abreuver tous les troupeaux. D’ailleurs, Rachel est un nom qui signifie « brebis ». Et Jacob aimait tendrement Rachel.
C’est aussi au bord d’un puit que Moïse rencontra Séphora sa femme, un puit vers lequel les sept filles de Jéthro conduisaient le troupeau de leur père. Il avait fallu que Moïse chasse des mauvais bergers qui les en empêchaient, pour que leur troupeau puisse enfin être abreuvé.
Et c’est encore au bord d’un puit qu’Eliezer, le serviteur d’Abraham, découvrit la très jolie Rébecca, qui sera donnée en épouse à Isaac. Cela vaut le coup de relire la rencontre d’Eliezer et de Rébecca, et de la comparer à celle de Jésus avec la Samaritaine. Rébecca est jeune et vierge, quand la Samaritaine est une femme qui a connu plusieurs hommes dans sa vie, Eliezer est le serviteur d’Abraham, quand Jésus est le Fils du Père ; et Rébecca s’empresse de donner à boire à Eliezer et à ses chameaux, quand les Apôtres de Jésus se scandalisent de le voir parler avec une femme… les chameaux ! J

Mais comprenons qu’à travers toutes ces rencontres, il se joue quelque chose de très important, qui nous concerne nous aussi. Le puit est le lieu de la rencontre entre un homme et une femme, qui va devenir une épouse et qui va donner la vie. Dans la tradition spirituelle des juifs, la femme est liée à l’eau. En elle, se trouve la source de la vie.
Or voilà que Jésus trouve près d’un puit, une femme qui est comme une brebis perdue, autour de laquelle tournent des hommes qui l’empêchent d’être réellement une épouse pour donner la vie. Ces maris successifs, cet homme qui n’est pas son mari, ces apôtres qui n’aiment pas trop voir Jésus discuter avec elle. Or Jésus lui annonce la venue de l’époux véritable qui fera couler en elle une source d’eau vive, jaillissant pour la vie éternelle. La Samaritaine a entendu parler du Messie. Elle l’attend. Et Jésus lui réponds : « Je le suis, moi qui te parle ».
Là Jésus lui dit en même temps qu’il est Dieu – il parle comme Dieu parle à Moïse au Buisson ardent : « Je suis celui qui suis » - et en même temps il lui dit qu’il est son sauveur, ou son époux véritable qui fera d’elle enfin une femme qui donne la vie. D’ailleurs c’est ce qu’elle fait immédiatement : elle se précipite à la ville pour annoncer : « Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait. Ne serait-il pas le Christ ? ». Elle est devenue disciple et apôtre, remplie de la vraie vie, de la grâce de l’Esprit Saint.

Chers frères et sœurs, ne tournons pas autour du puit. Ce puit, source de vie, c’est le baptistère, où ceux qui avaient soif jusqu’à en mourir trouvent l’eau vive pour la vie éternelle. La femme qui puise, qui est la belle épouse toujours féconde, en laquelle se trouve cette vie éternelle, c’est l’Eglise.
Lorsque nous allons près d’une cuve baptismale, nous sommes au bord du puit où Rachel, Séphora et Rébecca venaient abreuver leurs troupeaux, comme la femme Samaritaine qui va revivre et devenir disciple, épouse de cœur et apôtre de Jésus auprès des siens, pour les abreuver de la vie nouvelle.
Au bord du puit, assis sur la margelle, se trouve Jésus. Jacob avait fait bouger la pierre qui couvrait le puit, pour faire boire les brebis de Rachel. Moïse avait frappé le rocher pour qu’il puisse en sortir de l’eau. Il y a une histoire de margelle, de pierre, de rocher, qui est liée à ce puit, à cette eau vive. Or le rocher frappé au moyen du bois, c’était le Christ. Jésus est celui qui est attaché au bois planté sur le rocher du Golgotha, et qui est frappé, et de son côté transpercé sont sortis du sang et de l’eau, son côté, la véritable source de vie éternelle.

Chers frères et sœurs, vous avez compris. C’est comme une poupée russe : extérieurement, il y a la rencontre d’un homme et d’une femme, avec un troupeau, au bord d’un puit. A l’intérieur, il y a l’amour entre l’homme et la femme féconde qui donne la vie. Et au cœur, il y a Jésus attaché au bois, sur le rocher, qui donne sa vie ; vie recueillie par son Eglise, l’épouse aimée, belle et fidèle, qui la transmet à la multitude, pour que celle-ci communie et vive à son tour de la vie éternelle. Amen.

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