dimanche 29 décembre 2024

28-29 décembre 2024 - CUGNEY - LAVONCOURT - Sainte Famille - Année C

1 S 1, 20-22.24-28 ; Ps 83 ; 1 Jn 3, 1-2.21-24 ; Lc 2, 41-52
 
Chers frères et sœurs,
 
En dehors des récits de sa naissance et de la fuite en Égypte, nous n’avons pas, dans les évangiles, de témoignages sur la jeunesse de Jésus, sauf ce passage de saint Luc, qui raconte son escapade au Temple. Il ne faut pas s’étonner de trouver dans Luc cette histoire, car il est bien connu qu’une part de ses informations provient directement de la Vierge Marie, ce pourquoi il dit : « sa mère gardait dans son cœur tous ces événements. »
Cependant si la Vierge Marie attachait de l’importance à cette histoire et si saint Luc l’a jugée également importante pour nous la rapporter, c’est qu’elle contient un enseignement remarquable. En fait, on peut distinguer deux niveaux d’enseignement. Le premier niveau est celui du souvenir de la Vierge Marie, et le second est celui de l’interprétation qu’en donne saint Luc, en faisant comme à son habitude, des liens avec des mots ou des expressions clés.
 
Marie a eu peur, quand avec Joseph, ils ont cherché Jésus pendant trois jours. Dans le texte araméen, le terme qui évoque la souffrance de Marie et de Joseph est le même que celui qui est employé pour dire la souffrance des disciples à Gethsémani, alors que Jésus est entré dans sa Passion. Ainsi, pour les parents de Jésus, le soulagement arrive lorsqu’ils le retrouvent au Temple, au milieu des docteurs de la Loi ; pour les disciples, le soulagement arrive lorsqu’ils le retrouvent au Cénacle, et qu’il apparaît au milieu d’eux.  Déjà, en faisant ce parallèle, on comprend que, pour saint Luc, le Temple nouveau est l’Église réunie au Cénacle, dont les nouveaux docteurs, sont les Apôtres. Et Jésus est présent au milieu d’eux.

Mais Marie reproche à son fils : « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois comme ton père et moi, nous avons souffert en te cherchant ! » Et Jésus de lui répondre : « Comment se fait-il que vous m’ayez cherché ? Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? » Il y a deux remarques à faire sur cet échange.
La première est que Marie parle de Joseph quand elle dit : « Vois comme ton père et moi, nous avons souffert » ; mais Jésus lui, parle de son Père qui est aux Cieux quand il répond : « il me faut être chez mon Père ». Ici, Jésus marque clairement une rupture avec sa famille charnelle, comme il le fera plus tard en d’autres occasions, par exemple lorsqu’on l’a interpellé : « Ta mère et tes frères sont là dehors, qui veulent te voir. » À quoi il a répondu : « Ma mère et mes frères sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et la mettent en pratique. »
La seconde remarque est qu’il s’agit de la dernière mention de Joseph dans l’évangile, et de la toute première parole de Jésus. Il y a une forme d’entrée dans l’âge adulte pour Jésus, qui a alors douze ans. Pour les Juifs, c’est justement à partir de cet âge qu’on doit pratiquer tous les commandements de la Loi.
En somme Jésus, semble s’affirmer en rupture avec ses parents mais aussi son clan, qui voyageait avec eux depuis Nazareth. Je dis « semble » car Jésus n’ignorait pas ce commandement de la Loi : « Tu honoreras ton père et ta mère », et c’est pourquoi il revient avec eux, « soumis », à Nazareth. Il ne s’agit pas d’une crise d’ados de la part de Jésus, mais à l’occasion de sa maturité, l’affirmation de son origine divine, de par la référence à son Père qui est aux cieux. Et cela correspond bien au fait que les gens s’extasiaient sur son intelligence et sur ses réponses concernant l’interprétation de la Loi. Jésus, comme Verbe de Dieu est Maître de la Loi.
 
Cependant, saint Luc, discrètement, fait un pas de plus dans la compréhension de l’événement du Temple, et c’est pourquoi nous avons lu un passage du livre de Samuel en première lecture. En effet la phrase « Quant à Jésus, il grandissait en sagesse, en taille et en grâce, devant Dieu et devant les hommes » est pratiquement une citation du premier livre de Samuel : « Quant au jeune Samuel, il continuait de grandir en taille, aussi agréable au Seigneur qu’aux hommes. »
Nous devons donc comprendre ici que Jésus est comme un nouveau Samuel, qui a été consacré à Dieu par sa mère, du fait qu’elle l’ait eu en réponse à sa prière. Samuel, comme Jésus, était un premier-né et, par conséquent, il devait être consacré à Dieu. Mais si Marie pouvait bien se comparer à Anne du fait qu’elle est devenue mère de manière inespérée, et son Magnificat ressemble beaucoup, justement, à celui d’Anne, saint Luc, lui, voit probablement davantage que Samuel a succédé au prêtre Eli et à ses fils, au sanctuaire national de Silo. Il lui a succédé parce que les fils d’Eli, tous deux prêtres, se comportaient mal aux yeux du Seigneur, et pour cette raison, ils sont morts. Ainsi, pour saint Luc, Jésus apparaît comme le véritable Samuel, prêtre du Seigneur, qui succède et remplace l’ancienne dynastie sacerdotale.
 
Pour conclure, on doit retenir que, dans notre évangile, Jésus se manifeste comme Fils de Dieu, Maître de la Loi nouvelle dans le Temple de Dieu, l’Église, entouré de ses Apôtres. Nouveau Samuel, il est le aussi prêtre de la nouvelle alliance, celui qui intercède pour son peuple, pour nous, auprès de notre Père.

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