vendredi 1 novembre 2024

01 novembre 2024 - GY - Solennité de Tous les Saints - Année B

 Ap 7, 2-4.9-14 ; Ps 23 ; 1 Jn 3, 1-3 ; Mt 5, 1-12a
 
Chers frères et sœurs,
 
Un épisode évangélique, un sacrement, tout événement spirituel est toujours à trois dimensions : le passé, le présent, et l’avenir, où le présent est caché dans le passé, et l’avenir est caché dans le présent. Voici comment.
 
Dans l’évangile d’aujourd’hui, l’attitude de Jésus qui monte sur la montagne, s’assied et ouvre la bouche pour enseigner les Béatitudes rappelle évidemment à tous l’épisode de Moïse qui monte sur la montagne pour y entendre la Parole de Dieu qui lui enseigne les dix commandements de la Loi. C’est le rappel du passé.
Nous tous, qui comme les foules sommes rassemblés dans cette église comme sur la montagne pour y écouter l’évangile proclamé au nom de Jésus, nous rendons actuelle cette Parole de Dieu. Nous voilà devenus contemporains des foules de Galilée. Les Béatitudes nous sont données à nous aussi, aujourd’hui : c’est le présent.
Ce que le livre de l’Apocalypse nous apprend, c’est qu’à notre mort, nous monterons au ciel, avec les hommes de tous les lieux et de tous les temps, tous les baptisés, pour être réunis autour du trône de l’Agneau pour y connaître le Seigneur, pour entrer dans sa communion et en vivre. Alors la Loi, commandements extérieurs et les Béatitudes appels intérieurs, seront comme intégrés à tout nous-mêmes par l’Esprit Saint, comme une nouvelle nature, la nature divine qui nous habitera : c’est l’avenir.
Un épisode évangélique comme une célébration liturgique ne sont donc pas laissés à notre libre interprétation, ou à notre créativité, car ils sont mémoire, action actuelle efficace, et prophétie de l’avenir. La Parole de Dieu agit hier, aujourd’hui et demain, portant le même message mais en l’approfondissant, jusqu’à nous conduire jusqu’à l’intérieur d’elle-même, ou d’habiter elle-même en nous, pour faire une communion.
 
Ainsi, dans l’évangile des Béatitudes, Jésus révèle à ses disciples ce qui est caché à l’intérieur de la Loi de Moïse. La Loi formulait plutôt des interdits : « tu ne tueras pas » ; « tu ne voleras pas »… ces interdits sont comme la clôture d’un jardin : si tu passes outre, tu sors du jardin et tu te perds.
Les Béatitudes indiquent au contraire ce qu’il y a dans le jardin : ce sont des affirmations. Elles disent qu’il y a un arbre de bonheur, un arbre de vie, dans le jardin : « Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des cieux est à eux » ; « Heureux ceux qui pleurent car ils seront consolés ». Pour ceux qui sont dans le jardin, et qui ne pensent même pas à en sortir, en transgressant la Loi de Moïse, il est proposé un arbre de vie qui donne plusieurs fruits : les pauvres de cœurs sont ceux qui sont innocents comme des agneaux ; ceux qui pleurent sont ceux qui sont contrits par leur péché, meurtris par le mal et les souffrances qui traversent le monde ; les doux sont si humbles et si abandonnés que, ne possédant rien, en réalité, ils sont libres de tout ; les cœurs purs – le cœur étant chez les Hébreux le siège de l’intelligence – ont des pensées droites et pures, et sont donc en capacité de voir Dieu ; les artisans de paix sont habités d’une paix profonde, le repos, qui rayonne de manière apaisante autour d’eux. Voilà les fruits de l’arbre de vie qui est dans le jardin délimité par la Loi. Mais évidemment, cette vie qui irrigue l’arbre semble demeurer cachée aux yeux des disciples qui écoutent parler Jésus sur la montagne. Jésus leur donne envie de vivre de cette vie qui rend innocent, priant, humble, intelligent, paisible… qui rend saint, qui rend comme Jésus, qui rend comme Dieu lui-même. En effet, que sont les Béatitudes sinon les traits de la personnalité de Jésus, les traits du visage de Dieu ? Dieu personne ne l’a jamais vu ? Mais Jésus nous en a donné le portrait !
Or, le troisième secret qui est caché dans les Béatitudes, c’est que cette vie qui vient de Dieu, qui peut nous transformer en Dieu, nous rendre comme Dieu, c’est l’Esprit Saint. À l’intérieur donc de la Loi de Moïse, il y a les Béatitudes, comme l’arbre dans un jardin. Et la vie de l’arbre c’est l’Esprit Saint. Or l’Esprit Saint nous a été acquis par la mort, la résurrection et l’ascension de Jésus au ciel et nous a été donné à la Pentecôte. L’Esprit Saint, nous l’avons reçu à notre baptême et il s’est répandu en nous à notre confirmation. Rien ne nous empêche de nous abandonner à lui jour après jour pour le laisser nous transformer jour après jour en rayonnement de sainteté, à la ressemblance de Dieu.
 
Chers frères et sœurs, lorsque Moïse reçut la Loi sur la montagne puis ordonna la liturgie du temple à l’image de ce dont il avait eu la vision au ciel, il reçut un jardin dans lequel il y avait un arbre de vie et la vision de ce que vit saint Jean dans l’Apocalypse.
Ensuite, Jésus révéla à ses disciples quels étaient les fruits de l’arbre de vie, les Béatitudes, et il dévoila le cœur de la liturgie du temple qui est à l’image de la liturgie céleste : le sacrifice de sa vie par amour pour son prochain, comme un pain rompu et partagé, et un sang d’agneau répandu. Et il leur a dit : « Vous ferez cela en mémoire de moi. »
Et finalement à sa prière, notre Père nous donna tout, c’est-à-dire la vie qui féconde l’arbre et qui irrigue le jardin, son Esprit de sainteté qui nous fait entrer et vivre dans la communion de Dieu, à sa ressemblance, avec tous les saints, cette communion de l’avenir, que nous allons déjà recevoir maintenant.

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