dimanche 22 septembre 2024

21-22 septembre 2024 - FRESNE-SAINT-MAMES - VALAY - 25ème dimanche TO - Année B

 Sg 2, 12.17-20 ; Ps 53 ; Jc 3, 16 – 4, 3 ;  Mc 9, 30-37
 
Chers frères et sœurs,
 
Dimanche dernier, nous avons entendu Jésus annoncer sa passion prochaine, sa mort et sa résurrection. Ce programme n’avait pas vraiment plu à saint Pierre qui s’était rebellé et Jésus avait dû le rembarrer publiquement. On comprend aujourd’hui pourquoi – tandis que Jésus renouvelle ses propos : « Le Fils de l’homme est livré aux mains des hommes ; ils le tueront et, trois jours après sa mort, il ressuscitera » – cette fois-ci les disciples… « avaient peur de l’interroger ».
En réalité, le malentendu entre les gens et Jésus est profond, et même entre ses disciples et lui : « ils ne comprenaient pas ses paroles. » Pour eux, en effet, Jésus était le Christ, le Messie, envoyé et consacré par Dieu pour être le sauveur d’Israël, qui devait donc faire advenir le royaume du ciel sur la terre.
Et c’est la raison pour laquelle, les disciples discutent – ou plutôt se disputent – pour savoir lequel d’entre eux sera le plus grand dans le futur royaume de Jésus. Ils ne sont certes pas ni les premiers ni les derniers à vouloir faire partie d’un gouvernement ! Mais bon, autant tout à l’heure les disciples n’osaient pas questionner Jésus par peur, autant maintenant ils se taisent, par honte… Jésus va essayer de leur faire comprendre quelque chose.
 
Il doit répondre à leur deux inquiétudes : d’une part qu’il ne faut pas avoir peur, et d’autre part il faut expliquer qui est grand dans le royaume. Les deux choses vont ensemble. Jésus agit alors comme un prophète : il accomplit un signe tout en l’accompagnant d’une parole.
Le signe est celui de l’enfant. Si on lit cette phrase sans réfléchir : « Prenant alors un enfant, il le plaça au milieu d’eux, l’embrassa et leur dit… » alors on ne comprend pas le signe. On voit que Jésus est attentionné et affectueux pour les enfants, et nous nous attendrissons d’avoir un bon pasteur bienveillant et protecteur pour les petits. On en déduit qu’il faut être fragiles et innocents comme des enfants pour être de bons disciples. C’est assez juste, mais si on en reste là, on manque la leçon de Jésus.
Pour comprendre, il faut s’arrêter sur chaque mot. Jésus prend un enfant : il le choisit ; il l’appelle. Ensuite, il le place au milieu des disciples. Quand on colle au texte grec ou hébreu sous-jacent, on doit lire que Jésus « se fait tenir debout » l’enfant, « entre eux », entre les disciples. Ce vocabulaire-là n’est pas du tout innocent : il désigne la pierre d’autel qu’on dresse – qu’on fait se tenir debout – sur laquelle on va offrir un sacrifice d’alliance « entre eux », par exemple entre Jacob et Dieu, sur la pierre dressée à Béthel. Et la suite est parfaitement cohérente. Notre évangile dit que Jésus « embrassa » l’enfant ; la traduction est aussi un peu neutralisée : en fait Jésus soit « regarda en lui » en syriaque – il le scrute, soit il « le prit dans ses bras » en grec, ce qui correspond plus à notre traduction. L’idée qui est derrière est la même : il y a une action de l’Esprit Saint, soit qui vient habiter dans l’enfant, soit qui vient l’envelopper, le protéger. Dans tous les cas, il s’agit d’une bénédiction, d’une onction. On sait qu’une onction d’huile sur une pierre pénètre aussi bien dans la pierre qu’elle ruisselle tout autour.
 
Donc, cet enfant, pour Jésus n’est pas n’importe quel enfant. C’est un enfant qu’il a mis debout – en langage chrétien, qui l’a ressuscité ; il en a fait un autel consacré à Dieu par l’Esprit Saint, au moyen duquel est conclue une alliance entre lui et ses disciples. Comprenez bien : cela veut dire que Jésus a établi une alliance nouvelle entre lui et les hommes, qui sont ses disciples, et que celui qui est ressuscité et qui a reçu l’onction de l’Esprit Saint en est le témoin. Une pierre d’autel est toujours une pierre de témoignage. Et le sacrifice qui sera offert à Dieu sur cet autel, c’est celui de Jésus lui-même.
Voilà pourquoi Jésus dit : « Quiconque accueille en mon nom un enfant comme celui-ci » - « comme celui-ci », qui est très particulier puisque qu’il est témoin de l’alliance nouvelle – ce n’est pas n’importe quel enfant. C’est un baptisé ; c’est un chrétien.
Aussi bien on comprend ce propos : « Quiconque accueille en mon nom un baptisé, c’est moi qu’il accueille. Et celui qui m’accueille, ce n’est pas moi qu’il accueille, mais Celui qui m’a envoyé » - c’est-à-dire le Père. C’est normal puis qu’il y a alliance entre le baptisé et le Père, par l’intermédiaire de Jésus.
 
Par conséquent, Jésus dit à ses disciples que, certes, sa passion, sa mort et sa résurrection se présentent comme un sacrifice qui fait peur. Mais il s’agit du sacrifice de la nouvelle alliance entre Dieu et l’humanité. Les disciples en seront les témoins : ils seront des pierres qui se tiendront debout, consacrées par l’Esprit Saint – comme cet enfant, qui est là au milieu d’eux et que Jésus a béni. Étant devenus les pierres d’autel de la nouvelle alliance, les Apôtres ne seront certainement pas dévalorisés dans le royaume des cieux : au contraire, ils sont les pierres de fondation de l’Église, parce qu’ils sont les pierres d’autel, les pierres du témoignage.
Ainsi nous comprenons, nous qui sommes baptisés et confirmés par le don de l’Esprit, que nous sommes aussi des pierres de témoignage de la nouvelle alliance. Il est certain que Dieu nous voit comme des pierres très précieuses et qu’il veut prendre de nous un soin tout particulier. Il n’y a donc pas lieu d’avoir peur, ni de savoir si on est ou sera petits ou grands. Grands, nous le sommes… avec humilité !

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