dimanche 19 novembre 2023

19 novembre 2023 - VALAY - 33ème dimanche TO - Année A

 Pr 31, 10-13.19-20.30-31 ; Ps 127 ; 1Th 5,1-6 ; Mt 25,14-30
 
Chers frères et sœurs,
 
En première analyse de cet enseignement de Jésus, nous comprenons que le Seigneur donne à chacun d’entre nous des talents, qu’il nous revient de faire fructifier sous peine de nous voir condamnés durement. Cela place sur nos épaules une lourde responsabilité, selon ce que l’on estime avoir reçu de lui, et en regard des vies bien modestes que nous pouvons lui présenter en retour.
Mais il s’agit de ne pas se tromper de talents. Car il n’est pas d’abord question de dons naturels que nous aurions pu développer ou pas. Il y a certainement ici des Mozart qui s’ignorent… Mais si personne ne leur a révélé leur don musical exceptionnel, comment pourraient-ils être tenus pour responsable de ne pas l’avoir développé ? Ou bien, la vie aura fait qu’il n’était pas possible de le développer, et ils ne peuvent pas ici non plus être tenus pour responsables. Non, dans l’Évangile, il s’agit de toute autre chose.
En Orient, il est de coutume d’attribuer les cinq talents aux évêques, les deux talents aux prêtres et le talent aux diacres. Ce n’est probablement pas ce qu’a voulu dire Jésus, mais cela nous donne une piste. On voit ici que le Seigneur attend davantage de ceux à qui il a donné – non pas des honneurs – mais des charges d’âmes : les talents, ce sont en même temps les autres, et l’Évangile qu’on doit leur porter, qui est leur nourriture pour qu’ils puissent vivre et développer leur foi. En fait, pour saint Éphrem, le talent donné par le Seigneur est la foi elle-même, qu’il attend de voir se développer et de donner du fruit. De fait, nous pouvons faire deux observations.
 
La première est que le Maître ne s’intéresse pas au nombre de talents qu’il aura pu récolter à son retour, mais il s’intéresse au fait que les serviteurs leur auront fait produire du fruit, chacun selon sa capacité. Il répond d’ailleurs exactement la même chose à celui qui a produit deux talents qu’à celui qui en a produit cinq. En revanche, il reproche au dernier d’avoir caché son talent et de ce fait, de ne lui avoir rien fait produire, même pas les intérêts d’un dépôt en banque.
Ainsi, le Seigneur se réjouira au ciel autant de l’arrivée de sainte Thérèse de Lisieux ou de saint Vincent de Paul que de la petite dame qui a mis cinq centimes dans le tronc du Temple de Jérusalem ou du lépreux samaritain qui est revenu simplement le remercier pour sa guérison. À chacun selon ses capacités. En revanche aux prêtres, par exemple, qui ont beaucoup reçu en matière de connaissance des choses divines, en pouvoir de gouvernement des communautés, en capacité de célébrer les sacrifices ou les sacrements, et qui en ont enfouis l’usage, ou pire, l’ont détourné à des fins mauvaises, ceux-là perdront tout puisqu’ils seront chassés de la salle des noces de l’Agneau, tout prêtre qu’ils auront pu être.
 
Mais ne pensons pas trop vite que, plus on a reçu de catéchisme, de séminaire ou de sacrements, plus on a reçu de talents. C’est plutôt une question d’état d’esprit. Comparons donc – et c’est ma deuxième observation – les qualificatifs que le maître attribue à chacun des serviteurs. Les deux premiers sont qualifiés de bons et fidèles ; et le dernier de mauvais et paresseux.
Celui qui est bon, c’est Dieu lui-même. Ainsi le serviteur bon agit comme Dieu lui-même agirait. Ce n’est pas qu’il a reçu une bonne note, le serviteur bon, c’est qu’il a agi avec bonté, qu’il a fait du bien, gratuitement et sans compter, autour de lui. Et il est dit aussi de lui qu’il est fidèle, c’est-à-dire qu’il a la foi. Le bon et fidèle serviteur, c’est celui qui accomplit la Loi : celui qui aime Dieu et son prochain, réellement.
À l’inverse se trouve le serviteur mauvais et paresseux. Dans la bouche de Jésus, la référence au paresseux n’est pas un hasard, c’est une référence directe au Livre des Proverbes où est décrit quinze fois ce qu’est être paresseux : le paresseux manque de sagesse – c’est-à-dire qu’il n’écoute pas la Parole de Dieu ; il s’est endormi ; il n’a pas mis en pratique les commandements ; et surtout : il a peur devant la tâche à accomplir ! D’ailleurs, le mauvais serviteur le dit lui-même : « J’ai eu peur. » Car le contraire de la foi, ce n’est pas le doute, c’est la peur !
La femme parfaite décrite dans la première lecture – extraite justement du Livre des Proverbes –, est le miroir inversé du mauvais paresseux. Cette femme, c’est l’Église, elle qui craint le Seigneur – elle a la foi –, qui travaille avec ardeur, est attentive aux pauvres, et dont on chante publiquement les louanges pour ses œuvres bonnes.
 
Chers frères et sœurs, à nous qui sommes baptisés – prêtres, prophètes et roi – qui avons reçu le don de la foi, avec un peu capacité pour prier le Seigneur, un peu de catéchisme pour annoncer l’Évangile, et un peu de responsabilités familiales, sociales ou communautaires, le Seigneur attend de nous que nous fassions fructifier tout cela de bon cœur, comme lui : en aimant et Dieu et notre prochain, c’est-à-dire en nous offrant pour eux autant que nous pouvons et jusqu’à toute notre vie. Alors, nous pourrons un jour entendre le Seigneur nous dire : « Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton seigneur ! »

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