vendredi 19 août 2022

13-14 août 2022 - COURCUIRE - MONTAGNEY - 20ème dimanche TO - Année C

 Jr 38,4-6.8-10 ; Ps 39 ; Hb 12,1-4 ; Lc 12,49-53
 
Chers frères et sœurs
 
Les lectures de ce jour nous rappellent que les bons serviteurs de Dieu ne sont pas différents des autres hommes : ils sont fragiles et pécheurs. Mais la fidélité de Dieu à leur égard, et sa promesse de vie, demeurent quoi qu’il arrive : Jérémie a été retiré de son puit ; saint Paul nous encourage à garder les yeux fixés sur Jésus quand nous sommes tentés de nous décourager dans les épreuves ou face à notre péché. Parce que Jésus a donné sa vie humaine pour que nous recevions sa vie éternelle.
Il reste que l’évangile de ce dimanche est un peu curieux. On ne comprend pas bien : Jésus est-il venu détruire la création par le feu ? Est-il angoissé par ce qu’il va arriver ? Est-il venu semer la division sur la terre, alors qu’il nous a enseigné de nous aimer les uns les autres, comme il nous a aimé ? Que la belle-mère et la belle-fille se disputent, ce n’est pas nouveau… mais est-il vraiment venu détruire les relations familiales, lui qui a fait inscrire dans la Loi de Moïse : « Honore ton père et ta mère, afin d’avoir longue vie sur la terre que te donne le Seigneur ton Dieu » ?
Si l’on veut comprendre ce que nous dit vraiment Jésus, il faut lire correctement au moins deux mots. De quoi parle-t-il quand il parle de feu ? Et de quelle paix parle-t-il ?
 
« Je suis venu apporter un feu. » Quand Jésus parle ici de feu, il ne parle ni des feux de forêt, ni du feu de l’enfer. Il parle du Saint-Esprit. Ce feu est celui que vit Moïse au buisson ardent : feu qui illumine le buisson sans le détruire pour signaler la présence de Dieu. C’est le même qui illumine le sanctuaire du Temple, le chandelier à sept branches, que nous avons-nous aussi : ce sont les bougies qui illuminent l’autel. Ce feu est aussi celui dont les disciples ont parlé : « Notre cœur n’était-il pas tout brûlant en chemin, tandis qu’il nous ouvrait les Écritures ? » Car, pour un araméen, c’est le même mot « nour » qui signifie le feu, et la passion de l’amour. Voilà le feu dont parle Jésus, qu’il est si impatient de voir allumé en nous : celui de l’amour de Dieu, le don de l’Esprit Saint.
Quand Jésus dit cela, il le dit en tant que Dieu : « Je suis venu apporter un feu sur la terre. » Mais quand il ajoute : « Je dois recevoir un baptême », il le dit en tant qu’homme. En fait, il répond à la promesse du feu d’amour divin par le cri de l’homme qui espère : « Je dois recevoir un baptême, et quelle angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli. » Oui, nous sommes pressés et anxieux dans l’attente du baptême dans l’Esprit et le feu, par lequel nous accomplirons enfin totalement notre vocation à la communion d’amour, pour l’éternité. Jésus n’a pas peur du baptême pour lui-même, mais il est tendu dans l’attente de ce moment, comme des parents au moment d’une naissance par exemple.
Voyez ce mouvement extraordinaire : en tant que Dieu Jésus dit qu’il est venu apporter un feu d’amour, et en tant qu’homme il répond qu’il est dans l’attente de cet accomplissement. Saint Irénée le disait si bien : « Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu. »
 
Maintenant, dit Jésus : « Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? » Ici il y a un petit piège, difficile à identifier si on ne sait pas. En araméen, il y a deux mots pour dire paix : « shyna », qui veut dire « terre cultivée », « tranquillité », prospérité » ; et « shelma », qui a donné « Shalom » ou « Jérusalem », qui est une paix intérieure profonde, une paix qui vient de Dieu. L’araméen fait donc la différence entre la paix humaine, la vie paisible sur la terre, et la paix qui vient de Dieu, une paix immense. Or le grec ne connaît qu’un seul mot pour dire « paix » : « Eirenè », qui a donné les prénoms Irénée et Irène. Du coup, de quelle paix parle ici Jésus ? Non, il n’est pas venu apporter la paix humaine, la tranquillité et la prospérité de celui qui veut accumuler du blé dans ses greniers, mais oui, il est venu apporter la paix profonde de Dieu. C’est d’ailleurs le feu dont il vient juste de parler.
 
Par conséquent, on comprend mieux la suite : le feu d’amour – celui de la Pentecôte, le don de l’Esprit Saint, ne vient pas apporter une tranquillité humaine, une vie pépère, mais il aura deux conséquences pour nous. D’un point de vue pratique, il va créer des divisions entre ceux qui ont la foi et ceux qui ne l’ont pas. Et d’un point de vue spirituel, il va purifier en nous ce qui est conforme à l’homme nouveau et brûler ce qui est de l’homme ancien. « Cinq personnes de la même famille », ce sont des gens qui vivent ensemble mais qui – du fait de la foi – ne vivent plus sur la même longueur d’onde, et ce sont aussi nos dispositions intérieures à chacun d’entre nous, qui se divisent lorsque nous sommes déjà attirés par la lumière de Dieu, mais encore tentés par les ténèbres, par les séductions des démons. Alors qu’avant, nous ne le savions pas et nous vivions entièrement dans les ténèbres, la venue du feu d’amour, nous révèle notre état réel de pécheur et en même temps nous attire vers la gloire lumineuse.
 
Voilà donc chers frères et sœurs quel est l’enseignement de Jésus aujourd’hui. Retenons que Dieu est impatient que nous soyons embrasés par le feu de son Esprit Saint, et c’est bien pourquoi, nous qui sommes chrétien, malgré les épreuves du temps, nous sommes tendus dans l’attente de ce jour de joie.

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