jeudi 14 avril 2022

10 avril 2022 - GY - Dimanche des Rameaux et de la Passion - Année C

 Lc 19,28-40
Chers frères et sœurs,

La procession des Rameaux qui ouvre la liturgie de ce dimanche de la Passion de Jésus ne peut vraiment se comprendre qu’en superposant cinq processions semblables.

La première est celle du rite traditionnel du couronnement du roi en Israël qui, après avoir reçu l’onction au Jourdain, monte à Jérusalem assis sur un âne, acclamé par les foules.

Ce rite est bien celui qu’accomplit Jésus, qui, après avoir reçu une onction à Béthanie des mains de Marie-Madeleine, monte aujourd’hui à Jérusalem sur un petit âne, acclamé par la foule de ses disciples. Jésus se présente donc en roi, et on comprend la fureur des pharisiens qui hurlent à la provocation.

Cette procession royale permet de comprendre les trois autres processions qui vont suivre.

La première est celle conduit Jésus du palais de Pilate jusqu’au Golgotha, où tout est inversé. Jésus n’est plus porté sur un âne, mais c’est lui qui porte la croix. La foule ne met plus des vêtements sur son chemin, elle ne l’acclame plus, mais elle lui crache dessus et le couvre d’injures. Les pharisiens ne veulent plus la faire taire, mais au contraire ils l’excitent encore davantage. Les disciples criaient de joie, et maintenant ils se cachent et se taisent. La procession du couronnement de Jésus est devenue celle de sa Passion, et son trône royal est devenu une croix de bois.

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Il reste encore deux autres processions. 

Il y a celle de l’Ascension, où Jésus ressuscité, sortant de son tombeau comme de l’eau du Jourdain, est élevé dans sa chair – comme sur un âne – pour monter dans la Jérusalem céleste, acclamé par les anges, et à la grande confusion des démons. C’est bien pour cela que saint Luc a écrit que les foules de Jérusalem criaient : « Paix dans le ciel et gloire au plus haut des cieux », car c’est exactement ce que chantaient les anges pour la naissance de Jésus, à la grotte de Bethléem.

Alors vous comprenez maintenant le sens de la dernière procession, celle des Rameaux que nous célébrons aujourd’hui : car vous êtes le peuple de Dieu qui acclame son roi ; vous êtes la foule des disciples qui accompagne Jésus pour son entrée à Jérusalem ; et vous êtes les anges qui exultent de joie lors de son Ascension dans le ciel. Telle est la procession des Rameux qui nous fait passer de la terre au ciel et qui nous apprend à lire la Passion de Jésus avec les yeux de la foi, non pas comme une malédiction, mais comme une véritable bénédiction où le mal est transfiguré en bien. 

Maintenant, mettons-nous en route joyeusement, et avançons vers l’église, avançons vers le ciel, à la suite de Jésus, notre Seigneur.


Is 50,4-7 ; Ps 21 ; Ph2,6-11 ; Lc 22,14–23,56

Chers frères et sœurs,

Avec un grand recueillement, nous avons écouté de nouveau, comme chaque année, le grand récit de la Passion de Jésus. Mais pourquoi faisons-nous cela ?

D’abord parce que Dieu, notre Dieu, n’est pas un concept théorique : il est le Dieu vivant qui crée les conditions de possibilité de notre histoire, qui en fait partie et qui lui donne un sens. Non seulement à notre histoire humaine, mais aussi à notre histoire communautaire, et même à notre histoire personnelle. Une histoire sans la présence de Dieu, c’est un bateau sans quille, c’est une boussole qui n’a pas de Nord.
C’est donc bien pour cela qu’on se replonge chaque année dans l’histoire de Jésus –comme un GPS – pour recaler la nôtre sur la sienne et retrouver le bon chemin de la vie.

Mystérieusement, la Passion de Jésus que nous avons entendue, est une histoire difficile à entendre. C’est celle de la condamnation injuste et horrible d’un innocent. Et même, – si on s’arrêtait aujourd’hui sans aller jusqu’à Pâques, puis l’Ascension et la Pentecôte – ce serait une histoire qui se terminerait mal. Pourquoi donc se faire de la peine avec cette histoire ? 
D’abord parce que c’est la nôtre, à chacun. Nous le savons bien. Nous pouvons tous nous identifier tantôt à Jésus, tantôt aux disciples, tantôt aux foules, et même à Pilate et aux pharisiens ! Notre histoire humaine est souvent dramatique, on le voit sur tous les écrans de télé en ce moment. Jésus n’a pas fait semblant : il a assumé entièrement l’histoire des hommes, jusque dans la souffrance et jusqu’à la mort.
Mais son Père l’a-t-il voulu ainsi ? C’est une critique qui est souvent faite à la Passion de Jésus. Dieu a-t-il voulu cela ? Non, jamais le Père n’a voulu une telle mort pour son fils unique, son fils bien-aimé. Ce qu’il voulait, c’est l’amour. L’amour, qui consiste à tout donner et se donner soi-même. Et tout recevoir et se recevoir soi-même, de celui ou celle qu’on aime. Voilà ce que voulait le Père, parce que c’est la clé de la vie. 

Mais comment cela pouvait-il se faire pour Jésus ? Les hommes qui l’ont condamné ont décidé que cela passerait par la Passion et la crucifixion. Et Dieu s’y est soumis par amour pour eux. Le Père leur a donné son Fils, et le Fils a donné son obéissance au Père, par amour lui et pour tous les hommes. Voilà pourquoi la Passion de Jésus est un acte d’amour infini de Dieu pour nous.
Alors cela vaut bien le coup qu’on prenne le temps de revivre cette histoire chaque année, pour nous souvenir que notre Dieu est toujours avec nous et qu’il nous aime à en mourir.

Dans les temps qui sont les nôtres, éprouvés par le virus, aujourd’hui bouleversés par la guerre russo-ukrainienne – dont nous sommes partie prenante –, nous avons perdu nos repères habituels, au moins ceux sur lesquels nous nous sommes construits depuis trente ou quarante ans. Le monde de demain ne sera pas le même. Cela crée des formes d’incompréhension, d’angoisse, de colère, peut-être même de violence parfois. 
Mais pour nous qui sommes chrétiens, nous devons entendre à travers ce brouillard ou ce chaos l’appel de Dieu à retrouver le sens de son histoire pour y retrouver le sens de la nôtre, et par ce retour aux sources notre liberté et notre joie de vivre. Notre fidélité à Dieu est la condition de notre bonheur et de celui des générations futures.
Nous voulons toujours que Dieu se souvienne de nous, surtout quand nous sommes en difficultés ou éprouvés, pour qu’il nous aide ou qu’il nous sauve. Commençons donc par nous souvenir de lui, de ce qu’il a déjà fait de bon pour nous, en le remerciant, comme aujourd’hui en faisant mémoire de lui. Nous saurons alors trouver les marques de sa présence aujourd’hui et demain : jamais nous ne sommes seuls, car toujours et partout il nous aime, jusqu’à donner sa vie par amour pour nous.








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