2Chr
36,14-16.19-23 ; Ps 136 ; Ep 2,4-10 ; Jn 3,14-21
Chers
frères et sœurs,
Lorsque
nous célébrons l’Eucharistie, nous écoutons la lecture des Écritures et de
l’Évangile. Nous pouvons aussi le faire chez nous, lorsque nous ouvrons notre
Bible personnelle. Nous nous mettons alors à l’écoute de la Parole de Dieu, qui
se fait entendre dans notre intelligence et jusqu’à notre cœur. Il est très
difficile de faire vraiment silence pour écouter ce que Dieu a à nous dire.
Nous faisons souvent l’inverse en utilisant les Écritures et l’Évangile pour
leur faire dire ce que nous voulons entendre, pour leur faire dire des choses
que le Seigneur n’a pas dites.
Nous
sommes alors un peu comme ces Hébreux qui multipliaient les infidélités à Dieu
en imitant les abominations des nations païennes. Il est en effet plus facile
de suivre les idées du monde plutôt que d’écouter la Parole de Dieu. C’est
ainsi que – dit Jérémie – « ils profanaient la Maison que le Seigneur
avait consacrée à Jérusalem ». Si nous avons bien compris la leçon de
dimanche dernier, la Maison du Seigneur, le Temple de Jérusalem, est une image
du Corps du Christ, c’est-à-dire aussi de l’Église, qui est l’assemblée des
saints de la terre et du Ciel. Ainsi donc, suivre les idées du monde plutôt que
d’écouter la Parole de Dieu revient à porter la main sur le Corps du Christ, à
attenter à la sainteté de son Église, le peuple de Dieu.
Le
Seigneur, nous le voyons, s’afflige de cette fermeture des hommes à son égard.
Il envoie des prophètes. Mais ceux-ci sont violemment rejetés : tournés en
dérision, méprisés et moqués, parce qu’ils ne marchent pas selon l’esprit du
monde. Saint Paul a eu des paroles pour dénoncer cela lorsqu’il écrivait à
Timothée : « Un temps viendra où les gens ne supporteront plus l’enseignement
de la saine doctrine ; mais, au gré de leurs caprices, ils iront se chercher
une foule de maîtres pour calmer leur démangeaison d’entendre du nouveau. Ils
refuseront d’entendre la vérité pour se tourner vers des récits mythologiques. »
Et il l’encourageait à faire son travail d’évangélisateur : « Proclame
la Parole, interviens à temps et à contretemps, dénonce le mal, fais des
reproches, encourage, toujours avec patience et souci d’instruire. »
Nous
avons entendu la suite de cette histoire : « Les Babyloniens
brûlèrent la Maison de Dieu ». Le Peuple, ayant tout perdu, fut
déporté à Babylone : ce fut l’Exil et l’entrée dans un nouvel esclavage.
Alors le chant d’allégresse qui était celui des fidèles s’est éteint :
« Comment chanterions-nous un chant du Seigneur sur une terre
étrangère ? » Voilà à quoi aboutit celui qui n’écoute pas la
Parole du Seigneur pour se mettre trop facilement à la remorque des idées à la
mode : il perd tout, jusqu’à la joie de son cœur.
Heureusement,
nous savons que le Seigneur, lui, est fidèle. Ainsi fait-il savoir au peuple
déporté à Babylone qu’il y aura à nouveau une Maison du Seigneur à Jérusalem.
Le Corps du Christ, après beaucoup de souffrances, peut bien mourir en croix,
il va ressusciter glorieux. L’Église terrestre peut être réduite à un troupeau minuscule
et méprisé, elle ne cesse jamais d’être dans l’éternité l’assemblée de tous les
saints dans la communion d’amour de Dieu. Cela n’est pas notre œuvre, mais
c’est l’œuvre de miséricorde du Seigneur. Comme dit saint Paul : « Il
a voulu ainsi montrer, au long des âges futurs, la richesse surabondante de sa
grâce, par sa bonté pour nous dans le Christ Jésus. » C’est ainsi que
tous ceux qui sont en communion avec Jésus – dès maintenant ; tous ceux
qui ont foi en Jésus, sont déjà sauvés : ils appartiennent à la lumière et
non pas aux ténèbres de ceux qui se croient des lumières.
Et
justement, avez-vous vu – chers frères et sœurs – l’inversion entre la chute de
Jérusalem et la venue du Christ sauveur ? Dans le premier cas,
Nabuchodonosor est venu porter à son comble l’apostasie du peuple en détruisant
jusqu’à la Maison de Dieu. Dans le second Jésus est venu porter à son comble la
foi des justes, en restaurant pour eux la Maison de Dieu, c’est-à-dire la
communion de son amour.
Nous
sommes en carême, chers frères et sœurs, et nous avons toujours devant les yeux
les chemins possibles, et la liberté intérieure de faire les choix qui
conduisent à la destruction et à la tristesse ou bien à la sainteté et au
bonheur. C’est l’enseignement du premier psaume, qui a toujours été la première
catéchèse des Juifs et des premiers chrétiens :
Heureux est l'homme qui n'entre pas au conseil des méchants,qui ne suit pas le chemin des pécheurs,ne siège pas avec ceux qui ricanent,mais se plaît dans la loi du Seigneuret murmure sa loi jour et nuit !Il est comme un arbre planté près d'un ruisseau,qui donne du fruit en son temps,et jamais son feuillage ne meurt ;tout ce qu'il entreprend réussira,tel n'est pas le sort des méchants.Mais ils sont comme la paille balayée par le vent :au jugement, les méchants ne se lèveront pas,ni les pécheurs au rassemblement des justes.Le Seigneur connaît le chemin des justes,mais le chemin des méchants se perdra.