Is
55,1-11 ; Cant. Is 12 ; 1Jn 5,1-9 ; Mc 1,7-11
Chers
frères et sœurs,
La
situation actuelle, qui est la nôtre, n’est pas enviable. A-t-on déjà vu des
peuples entiers vivre derrière des masques, sans visages et sans sourires, y
compris pour les enfants ; des peuples qui renoncent à leurs lieux de
convivialité, de culture, de commerce ? Et lentement leur économie qui s’asphyxie,
tandis que ferment – jusqu’à quand, peut-être définitivement – nombre
d’entreprises et de commerces. Cela débouchera-t-il sur de la violence ? Bientôt
nous nous prenons à nous renfermer sur nous-mêmes, nous-aussi, peut-être à
déprimer : le monde est plus fort que nous. Le monde nous domine à
l’extérieur, mais aussi de plus en plus à l’intérieur, dans nos têtes, et
peut-être aussi dans nos cœurs, quand nous commençons à avoir peur.
On
a entendu dire certains, parfois, que le christianisme avec ses dogmes était
une prison, un enfermement – l’opium du peuple – et que la société moderne, le
progrès, c’était au contraire enfin l’émancipation et la liberté. Mais
aujourd’hui nous voyons bien que c’est exactement l’inverse.
Écoutez
le Seigneur qui parle par la bouche du prophète Isaïe : « Vous
tous, qui avez soif, venez, voici de l’eau » ; « Mes
pensées ne sont pas vos pensées, et mes chemins ne sont pas vos chemins –
oracle du Seigneur. Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant mes
chemins sont élevés au-dessus de vos chemins, et mes pensées, au-dessus de vos
pensées. » Écoutez ce que dit ce que dit saint Jean : « Tout
être qui est né de Dieu est vainqueur du monde. » Écoutez ce que dit
saint Marc, dans l’Évangile : « Et, remontant de l’eau, Jésus vit
les cieux se déchirer et l’Esprit descendre sur lui comme une colombe. »
L’Ancien
et le Nouveau Testament, dont nous sommes les héritiers, nous enseignent
qu’au-dessus des nuages de notre monde actuel, au-delà de nos déprimantes
pensées, il y a le Seigneur qui veut pour nous la vie et la liberté : un
grand bol d’oxygène, d’air frais, de soleil et de ciel bleu, et un grand repas
de famille, avec des rires d’enfants, un repas de communion.
En
effet, les cieux, au-dessus de Jésus, se déchirent comme on ouvre une porte de
prison. Tout être qui est né de Dieu est vainqueur du monde et de son
enfermement, car il appartient déjà à la vie et à la liberté de Dieu, celle du
Royaume des cieux. Certes, nous sommes toujours des hommes et des femmes de
cette terre, mais la foi en nous est un germe de cette vie éternelle et de
cette liberté véritable, que le monde cherche et dont il a tant besoin pour
vivre.
Pour
cette raison, comme Jésus, tout chrétien est une lumière dans la nuit, un phare
dans la tempête : il est l’étoile de l’espoir pour les égarés, pour les
désespérés. Nous ne pouvons pas nous-mêmes comprendre la profondeur et la
puissance de ce mystère de vie et de liberté qui est en nous : il nous
dépasse, car les chemins et les pensées de Dieu sont bien au-delà de nos
capacités de compréhension. Mais nous savons – nous le savons avec
certitude – que le Seigneur donne à boire à ceux qui ont soif, et à manger à
ceux qui ont faim : car en lui est la vraie vie éternelle. C’est notre
foi.
Chers
frères et sœurs, le baptême de Jésus, qui annonce le nôtre, est un coup
d’aiguille dans le ballon de baudruche d’un monde qui se renferme sans cesse sur
lui-même, avec notre tête et notre cœur, de plus en plus avec lui. Au contraire
la Parole qui sort de la bouche de Dieu, Jésus, vient féconder la terre pour lui
redonner vie ; non pas une vie terrestre limitée, mais la vie céleste, la
vie éternelle et bienheureuse.
C’est
le même Esprit-Saint que nous avons reçu nous aussi, lorsque nous sortions des
eaux de notre baptême : l’Esprit Saint a fait de nous comme de multiples
et différents petits Jésus, avec la même mission : féconder la terre qui
nous environne pour lui rendre le goût de la vie, de la liberté, de la joie,
d’un bonheur qui ne finit pas. Telle est notre vocation. Plus que jamais
aujourd’hui, dans un monde de brouillard, avec la force que nous donne l’Esprit
Saint, nous devons être chrétiens.