Is 52,7-10 ; Ps
97 ; Hb 1,1-6 ; Jn 1,1-18
Chers
frères et sœurs,
Le
Verbe – ou la Parole de Dieu – et Jésus, c’est la même personne. C’est par son
Verbe, par sa Parole, que Dieu le Père a tout créé, et la perfection de la
création, c’est l’homme : l’homme fait à l’image et à la ressemblance de
Dieu.
Aussi
bien, lorsque nous sommes devenus pécheurs par un mauvais usage de notre
liberté, nous avons perdu la ressemblance avec notre créateur. Mais nous
demeurons toujours et pour toujours à son image. En quelque sorte, nous sommes
comme la carrosserie d’une voiture, qui a été emboutie. Elle demeure toujours
une carrosserie, mais elle est abîmée.
Aujourd’hui,
à Noël, la Parole de Dieu par qui le Père nous a créé, Jésus, s’est fait homme.
Pourquoi ? Pour rétablir notre ressemblance avec Dieu. C’est comme si on
remettait la carrosserie abîmée dans la presse qui l’avait formée au départ,
pour lui redonner sa forme première. Tel est le rôle de Jésus : en se
faisant homme, il redonne à l’homme la possibilité de retrouver la ressemblance
de Dieu, la possibilité de retrouver sa beauté première.
La
difficulté, aujourd’hui comme hier, et demain, c’est que le monde qui nous
entoure nous propose mille autres formes de carrosseries à adopter. Et nous
nous prenons à rêver : et si nous faisions de nous des hommes-dieu ?
Et si nous nous transformions en créatures mi-hommes mi-machines, « l’homme
augmenté » ? Et si être véritablement homme, c’était profiter de la
vie, faire ce que nous voulons de notre vie, de notre corps, selon les idées à
la mode, selon nos sentiments du moment, voire même selon nos pulsions généralement
égoïstes ? Mais aucune de ces formes n’est semblable à celle qui nous a
marqué à l’origine, la seule qui nous corresponde vraiment et qui peut nous
rendre véritablement heureux. Cette unique forme, c’est le Verbe de Dieu, la
Parole de Dieu, c’est Jésus lui-même parce que nous avons été créés par lui. Comment,
au milieu des milliers d’autres formes et contrefaçons toutes plus attirantes
les unes que les autres, pouvons-nous donc reconnaître celle de Jésus avec
certitude ? De faux prophètes avant lui et après lui, il y en a eu des
centaines et il y en aura d’autres. Comment donc le reconnaître avec certitude,
lui, le Verbe de Dieu, Jésus, par qui nous avons été créés et qui a le pouvoir
de nous restaurer dans notre intégrité première ?
C’est
là le rôle de Jean-Baptiste, l’envoyé de Dieu venu rendre témoignage à Jésus,
pour le désigner avec assurance : « Voici l’Agneau de Dieu, celui
qui enlève le péché du monde ». Jean-Baptiste est celui qui, dans le
monde, est le seul véritable témoin fidèle. Comment cela ?
Jean-Baptiste
était l’aboutissement et le sommet des prophètes de l’Ancien Testament ;
il les récapitulait tous. Comme eux, et plus qu’eux, il était préparé par
l’Esprit Saint à voir en Jésus le Verbe de Dieu fait chair.
Étonnante
chose que d’observer, d’un côté Jean-Baptiste qui voyait la divinité qui était
invisible dans l’humanité de Jésus ; et de l’autre, les scribes et grands
prêtres – normalement les plus habilités à le faire – mais qui pourtant ne
voyaient pas et ne comprenaient pas. Parce qu’ils n’avaient pas l’Esprit Saint
en eux. Sans l’Esprit Saint rien n’est possible. Avec lui, tout est possible.
Chers
frères et sœurs, nous avons toujours besoin aujourd’hui de Jean-Baptiste pour
savoir reconnaître Jésus, le Verbe de Dieu agissant dans nos vies, pour le
laisser nous restaurer dans notre sainteté originelle. Jean-Baptiste pour nous,
c’est l’Église pauvre, qui prie et qui témoigne, fidèle à la foi des Apôtres,
par la proclamation de l’Évangile, par sa liturgie et ses sacrements, son
enseignement et ses institutions, ses saintes et ses saints, et toutes ses
œuvres de charité.
Celui
qui s’en écarte, s’écarte de Jésus, et prend le risque de se perdre. Au
contraire, celui qui se trouve au cœur de l’Église, avec la grâce de l’Esprit
Saint, ressemble de plus en plus à Jésus et se rapproche immanquablement du
cœur de Dieu, de sa joie, de sa lumière et de sa paix.
Si
nous avons compris cela, alors nous pouvons aussi comprendre que tout chrétien,
restauré par la Parole de Dieu, par Jésus, dans sa forme première, devient aussi
un Jean-Baptiste pour les autres. Tel est le mystère de notre vocation de
baptisés : ressembler de plus en plus à Jésus pour être en communion avec
Dieu, et ressembler de plus en plus à Jean-Baptiste pour permettre à notre
prochain de retrouver à son tour la source d’amour et de toute joie.