Is 2,1-5 ; Ps
121 ; Rm 13,11-14a ; Mt 24,37-44
Chers
frères et sœurs,
C’est
alors qu’il était à Jérusalem, quelque temps avant sa Passion, que Jésus a
donné cet enseignement. Il s’agissait pour lui d’indiquer à ses disciples
quelle attitude tenir après sa mort et sa résurrection. En effet, conformément
aux annonces du prophète Daniel, le Fils de l’homme – c’est-à-dire Jésus
lui-même – viendra s’asseoir à la droite de son Père qui est au cieux, et c’est
alors qu’il inaugurera son règne. Ce sera le signal de la transformation du
monde, de sa mort et de sa résurrection, comme cela s’est passé pour Jésus,
pour devenir le monde nouveau du Royaume de Dieu. Cette transformation sera
opérée par l’Esprit Saint.
Ainsi,
Jésus lit l’histoire de Noé comme une prophétie : là où Noé est entré dans
l’Arche, le Fils de l’homme est entré dans le ciel, pour s’asseoir à la droite
du Père, et c’est alors que le déluge a commencé, comme l’Esprit Saint a été
envoyé pour transformer le monde.
Et
les gens ne se sont doutés de rien. En effet, qui a changé sa vie après la
résurrection de Jésus ? Personne. Ce n’est que lorsque l’Esprit Saint a
été envoyé à la Pentecôte, que deux mondes ont commencé à apparaître : le
monde nouveau, celui qui constitue l’Église, et le monde ancien, celui qui est
destiné à mourir. Ainsi, en effet, comme Jésus l’avait annoncé, dans une même
famille l’Évangile de la résurrection divisera les gens. L’un deviendra
croyant, et l’autre pas.
À
ceux qui sont devenus croyants, Jésus fait encore une mise en garde. Ce n’est
pas parce qu’on est passé à travers les eaux du baptême comme à travers celles
du déluge, et qu’on est entré dans l’arche de la maison de Dieu, que l’on doit
se croire dispensé d’être vigilant. D’ailleurs, saint Paul – quand il
s’adresse aux Romains pour les avertir de sortir de leur sommeil –
s’adresse bien à des chrétiens. Il y a un risque à être un chrétien endormi.
Jésus
prévient donc ses disciples, qu’ils doivent veiller. En fait, le texte araméen
est plus précis, il dit la même chose que Paul : il ne s’agit pas de « veiller »,
mais de se « réveiller », de sortir de son sommeil. Il faut un
changement d’attitude : pas une veille passive, mais une veille active. C’est
toute la différence qu’il y a entre un veilleur de nuit, qui regarde de temps
en temps sur ses écrans pour voir si tout va bien, et un sapeur-pompier de
garde, qui est tout habillé et prêt à sauter dans son camion au moment de l’alerte.
Il faut en effet se « tenir prêt » dit Jésus, exactement comme les
hébreux se sont tenus prêts, tout habillés, la ceinture autour des reins, dans
la nuit de Pâque, pour partir d’Égypte et marcher vers la terre promise.
Il
faut alors préciser ce que signifie « se tenir prêt » pour un chrétien.
Jésus nous a déjà prévenu que cela demandait une attitude un peu plus dynamique
que celle de mener une vie tranquille.
Saint
Paul nous dit : « rejetons les œuvres des ténèbres, revêtons-nous
des armes de la lumière » et aussi « revêtez-vous du Seigneur
Jésus-Christ ». Saint Paul nous renvoie à la renonciation à Satan de
notre baptême, à la confession de foi que nous y avons exprimée, et aux dons
que nous y avons reçu. Avec la lumière de la vie éternelle et le vêtement blanc
du monde nouveau nous avons notamment reçu l’onction qui nous a consacrés au
Christ comme prêtres, prophètes et rois. Se « tenir prêt », c’est
agir comme Jésus, en son nom, comme prêtres du Seigneur, comme prophètes de
l’Évangile du Royaume des cieux et comme rois de justice et de paix. Voyez
qu’il y a de quoi faire, si l’on veut bien faire attention à ce que tout cela
signifie. Or telle est la vocation de tous les baptisés.
Enfin,
le prophète Isaïe a annoncé que, lorsque le Fils de l’homme prendrait
possession de son règne, toutes les nations afflueraient vers la montagne du
Seigneur, vers la maison du Dieu de Jacob. Notre horizon, le but de notre vie,
se trouve là. C’est aussi ce que dit le Psaume : « Quelle joie
quand on m’a dit : nous irons à la maison du Seigneur » ;
« C’est là que montent toutes les tribus, les tribus du Seigneur »,
etc. Je voudrais attirer votre attention sur le fait qu’il s’agit ici d’une
marche qui ne se fait pas tout seul, individuellement, mais en tribus, peuples
et nations. On n’accède pas au Royaume des cieux tout seul, mais dans l’Église,
dans le peuple de Dieu, la communauté que nous formons. Il doit y avoir une
solidarité : s’il y en a un qui traîne la patte, les autres doivent être
là pour l’aider, à commencer par la prière. Aussi le jugement qui a lieu à la
fin des temps n’est pas seulement un jugement individuel, il est aussi tenu
compte des solidarités communautaires. On ne se sauve pas tout seul, mais
ensemble.
Chers
frères et sœurs, nous sommes dans un monde qui s’endort dans la nuit. Plus que
jamais l’appel de Jésus doit nous réveiller : « Tenez-vous prêts ».
Et se tenir prêts, c’est vivre en prêtres, en prophètes et en rois, le regard
fixé sur le ciel, et en aidant nos frères et sœurs qui peinent en chemin. C’est
ainsi qu’on vécu tous les saints.