Jr
1,4-5.17-19 ; Ps 70 ; 1Co 12,31-13,13 ; Lc 4,21-30
Chers frères et sœurs,
Ce qu’il vient de se passer à Nazareth est assez dramatique. Jésus
vient de se faire rejeter violemment par son clan familial, qui n’a pas compris
ni qui il est vraiment, ni ce qu’il est venu faire dans le monde. Sa famille ne
voit en lui que le fils de Joseph alors qu’il est le Fils de Dieu, et elle
espère qu’il va devenir roi d’Israël alors que son Règne va s’étendre, bien
au-delà d’Israël, à l’univers tout entier. Il y a une très grosse
incompréhension.
N’oublions pas qui sont les gens de Nazareth. Ce sont les
descendants du roi David, qui au retour de l’exil à Babylone, se sont installés
là, assez pauvrement. Ils sont humbles mais ils savent que c’est dans leur
clan, un clan royal, que naîtra un jour le Sauveur promis par Dieu, selon les
promesses faites autrefois à leur ancêtre David. L’Ancien Testament est pour eux,
non seulement la Loi du Peuple d’Israël, mais aussi leur histoire de
famille : ils le connaissent par cœur. Et ils savent que Marie a donné un
fils à Joseph de manière étonnante, et que l’Esprit de Dieu est descendu sur
Jésus lors de son baptême par Jean-Baptiste : il a été consacré
directement par Dieu. Et Jésus a reçu le pouvoir de guérir les malades, de
pardonner aux pécheurs. N’est-il donc pas le Messie attendu depuis si
longtemps ? N’est-ce donc pas lui qui va rétablir la royauté de David et
rendre à son clan sa dignité de famille royale ?
Mais quelle incompréhension ! Qu’avait donc lu Jésus dans le
livre d’Isaïe, dont il dit « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de
l’Écriture que vous venez d’entendre » ? Il avait lu :
« L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré
par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux
captifs leur libération, aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, et remettre
en liberté les opprimés ». Mais qui sont les pauvres, les captifs, les
aveugles et les opprimés ? Les gens de Nazareth croyaient que Jésus
parlait d’eux. Mais Jésus, qui est Dieu, voyait plus loin : les pauvres
sont ceux qui sont privés de l’Esprit de Dieu, les captifs ceux qui sont
prisonniers dans l’enfer de leur péché, les aveugles ceux dont le regard n’est
pas illuminé par la lumière de la gloire de Dieu, et les opprimés sont ceux qui
sont justes dans leur cœur et qui attendent avec une grande espérance, dans un
monde qui les méprise, la venue de leur Sauveur. Et tous ces gens-là, en
réalité, ce sont tous les hommes du monde et de tous les temps, dont nous-mêmes
faisons partie.
C’est pourquoi Jésus explique à sa famille qu’il n’est pas venu
spécialement pour eux mais pour tous. Il prend alors l’exemple de la veuve de
Sarepta, une veuve étrangère, à qui Elie va procurer du pain et de l’huile en
abondance, au moment d’une grande famine. Terrible exemple, alors que la Vierge
Marie sa propre mère est elle-même veuve de saint Joseph depuis peu de temps.
Et Jésus ajoute l’exemple de Naaman le Syrien, général étranger, qui sera guéri
de sa lèpre tandis que les lépreux d’Israël ne sont pas guéris. Jésus a l’air
de traiter de lépreux son propre clan. Mais ce n’est pas parce que Dieu fait
miséricorde aux autres et les bénit qu’il ne fait pas miséricorde et ne bénit
pas son peuple bien-aimé en même temps ! Dieu a décidé d’étendre son amour
à tous les hommes. C’est cela la bonne nouvelle : il est le Dieu de tous
et il offre sa communion d’amour à tous.
Par quel moyen le fait-il ? Naaman le Syrien a été purifié en
se baignant dans un bain d’eau, et la veuve de Sarepta a été nourrie avec du
pain et de l’huile. Chers frères et sœurs, Dieu ne fait jamais rien par
hasard : c’est par l’eau du baptême que l’on est guéri de son péché et que
l’on entre dans le peuple de Dieu ; c’est par le pain eucharistique que
l’on est nourri pour ne pas faillir en chemin jusqu’au jour de Dieu ; et
c’est par l’huile sainte que nous est conférée la force de l’Esprit, pour que
nous accomplissions notre vocation : aimer Dieu et aimer notre prochain.
Jésus nous a donné tous les moyens pour être riches des grâces de
Dieu, pour être libres en sa présence, pour que nos yeux se rassasient de sa
beauté et que notre intelligence le connaisse, et pour que notre cœur soit
comblé de bonheur, éternellement, dans la communion des saints.