Ac
1,1-11 ; Ps 46 ; Ep 1,17-23 ; Mt 28,16-20
Chers
frères et sœurs,
Nous savons que Jésus est apparu à de
nombreuses reprises à ses disciples depuis sa résurrection. Mais qui dit
apparition dit aussi – bien sûr – disparition. L’ascension n’est que la toute
dernière disparition, au bout de quarante jours.
D’un côté les disciples sont maintenant pratiquement
prêts à rendre témoignage à la face du monde et jusqu’au bout de la terre, il
ne leur manque plus que la puissance de l’Esprit Saint, qui leur sera donné à
la Pentecôte. Tout tendus vers le ciel, ils attendent avec impatience le don de
Dieu.
De l’autre, Jésus se présente maintenant tout
de bon devant son Père, revêtu de l’humanité qu’il partage avec nous depuis l’Annonciation,
et il la lui présente en offrande d’action de grâce. C’est lorsque le Père aura
agréé cette offrande que l’Esprit sera répandu sur les disciples et sur le
monde, pour les transfigurer.
Bien sûr, nous savons que l’Ascension a eu
lieu et que la Pentecôte a eu lieu aussi : les Apôtres ont reçu le don du
Saint-Esprit. C’est lui qui leur a donné la force de porter l’Evangile jusqu’au
bout du monde, et c’est grâce à eux et à leurs successeurs qu’aujourd’hui nous
sommes chrétiens. Cela veut dire que l’offrande qu’a faite Jésus de son humanité
à son Père a été agréée et qu’il est maintenant assis à sa droite. Cela veut
dire que Jésus est égal à son Père dans la dignité divine et en lui, notre
humanité a été revêtue du manteau royal de la divinité.
Mais il est bon que nous comprenions aussi
que le mystère de l’Ascension ne cesse jamais tant que la fin du monde n’est
pas arrivée. La « fin du monde » est une traduction ambiguë. Il
serait préférable de dire la « plénitude du monde », comme dit saint
Paul aux Ephésiens.
Ainsi donc, jusqu’à la plénitude du monde,
jusqu’à la plénitude des temps, Jésus se présente face à son Père pour lui
présenter en offrande toute l’humanité et toute la création. Jésus est vraiment
– en permanence – notre Défenseur dans les cieux, notre avocat. Il ne cesse de prier son Père
de nous donner la plénitude de son amour, de sa miséricorde, de son Esprit. En
quelque sorte, la plénitude des temps, la plénitude du monde, sera une grande Pentecôte
où toute l’humanité et toute la création seront entièrement transfigurées et
renouvelées dans l’Esprit Saint.
Et en même temps, jusqu’à ce jour de
plénitude des temps, de grande Pentecôte sur l’univers, les disciples de Jésus
prient et veillent avec lui dans l’attente de l’Esprit Saint ; toute leur
attention est tournée vers le ciel dans l’attente du don total de la vie de
Dieu ; et en même temps, ils sont envoyés dans le monde comme témoins de
la vie et de la résurrection de Jésus. Le temps qui nous est donné d’ici la
plénitude des temps, est un temps de prière, un temps de conversion et un temps
d’évangélisation.
Chaque messe est la participation au geste
d’offrande de Jésus et l’anticipation de la plénitude des temps. Lorsque le
prêtre chante « Par lui, avec lui et
en lui, à toi Dieu le Père tout-puissant, tout honneur et toute gloire pour les
siècles des siècles », c’est Jésus qui présente à son Père son Corps
et son Sang en offrande, implorant le Père de les agréer et de donner au monde
son Esprit et sa vie. A cette prière intense de Jésus, le peuple de Dieu donne
un assentiment profond et vibrant en chantant le « Amen » : c’est toute l’Eglise en prière, tendue avec
Jésus dans l’attente de la réponse du Père.
Or la réponse du Père, la voici, c’est quand
le prêtre dit : « Heureux les
invités au repas du Seigneur, voici l’Agneau de Dieu, celui qui enlève le péché
du monde » ; et la plénitude des temps, c’est quand le peuple des
fidèles vient communier au Corps du Christ et au Sang du Christ. Alors tout est
accompli ; tout est renouvelé : c’est déjà la plénitude des temps qui
s’accomplit.
Chers frères et sœurs, la Messe, c’est un
geste et un moment unique au monde, où nous vivons avec Jésus, en communion
avec lui, sa grande prière d’intercession pour le salut du monde, et nous
anticipons et hâtons sa venue, à la plénitude des temps.
La vocation des baptisés est une vocation de
prophètes pour annoncer l’Evangile ; elle est aussi une vocation de
prêtres, pour demander l’Esprit ; et enfin, elle est une vocation de
roi : il n’y a pas plus grand sur la terre que l’Eglise humble et servante
qui célèbre l’eucharistie. Amen.