Ac 2,14.22b-33 ; Ps 15 ; 1P
1,17-21 ; Lc 24,13-35
Chers frères et sœurs, les enfants,
Connaissez-vous
Cléophas ? D’après la tradition, c’est le frère de saint Joseph. Avec
Marie, sa femme, il a eu au moins trois enfants : Jacques dit « le
petit », qui est un des apôtres de Jésus, puis José ou Joseph, et Simon.
Simon deviendra le 2ème évêque de Jérusalem après Jacques le Juste.
Marie la femme de Cléophas était au pied de la croix avec Marie, la mère de
Jésus et Marie-Madeleine ; elle était aussi parmi les saintes femmes qui
sont venues au tombeau, le matin de la résurrection, ce matin.
Or
justement Cléophas est en grande discussion avec la personne qui l’accompagne
sur le chemin d’Emmaüs. D’après le texte grec cette discussion s’échauffe assez
vite. Au début ils « s’entretiennent », ensuite, ils
« discutent », et quand Jésus les interpelle, il leur dit :
« Quelles sont ces paroles que vous vous lancez entre vous en
marchant ? » ! Il était temps que Jésus intervienne pour calmer
le jeu.
En
effet, les deux disciples de Jésus sont vraiment dépités parce que le Messie
attendu, finalement, s’était fait démolir et crucifier par les autorités et par
la foule. Mais en même temps, contre toute attente et contre toute raison,
certains disciples affirmaient qu’il était ressuscité. Non seulement c’était
dangereux, mais c’était même tout à fait déraisonnable. Imaginez donc, un homme
mort il y a trois jours, qui est vivant aujourd’hui ! On comprend que la
discussion s’échauffe.
Jésus
ramène les disciples aux Ecritures, à toute l’histoire d’Israël, à commencer
par Moïse puis tous les prophètes. Et – dit saint Luc – « il leur
interpréta, dans toute l’Ecriture, ce qui le concernait ». L’enseignement
de Jésus a dû durer à peu près une à deux heures, le temps d’arriver à Emmaüs.
Et le cœur des disciples est tout brûlant tandis que Jésus leur parle de lui
dans les Ecritures. Jésus, c’est en même temps tout le peuple d’Israël, toute
son histoire, mais aussi le cœur des disciples. Il fait toujours bon d’être
avec Jésus.
Voilà
qu’ils arrivent à la maison. Saint Luc utilise un mot rare pour désigner le
jour qui baisse, le crépuscule. La seule fois où il est utilisé dans le Nouveau
Testament, c’est quand Jésus réalise la multiplication des pains. Il va se
passer quelque chose. Et de fait, Jésus prend le pain, le bénit, le partage et
leur remet, dans un geste ouvert, qui montre qu’il ne finit pas. Depuis que
Jésus a rompu le pain, toujours et jusqu’à la fin du monde, il sera avec nous
dans le pain rompu, c’est-à-dire dans son eucharistie, dans la communion.
Lorsque
Jésus disparaît, les disciples l’ont reconnu dit le texte. Mais le grec est
plus précis : « Eux aussi
racontent ce qui est arrivé sur le chemin et comment ils l’ont connu au partage
du pain ». « Comment ils
l’ont connu », c’est le même langage que celui de saint Jean :
avoir « connu » Jésus, c’est avoir été en communion intime avec lui.
Ils ne l’ont pas seulement reconnu, ils ont été en communion avec lui, et ils
l’ont en même temps découvert tout nouveau. Comme à la Transfiguration pour
Pierre, Jacques et Jean. Le même Jésus, mais Jésus ressuscité, transfiguré,
lumineux et paisible.
Chers
frères et sœurs, savez-vous ce que signifie le nom « Cléophas » ?
On sait que le disciple qui portait ce nom s’appelait avant « Alphée »,
c’est-à-dire « celui qui enseigne ». Mais maintenant il s’appelle « Cléophas »,
c’est-à-dire en araméen « Qlé-yaphâ ». Souvent lorsqu’on rencontre
Dieu, dans la Bible, on change de nom, comme au baptême, on reçoit un nom
nouveau. Hé bien celui qu’on appelait « Alphée » est devenu, avec une
sorte de jeu de mots, « Qlé-yaphâ ». C’est un nom double qui signifie
quelque chose comme « voix » ou « bruit léger » et « resplendissant,
rayonnant, brillant, lumineux ». Chers frères et sœurs, le nom de Cléophas
est celui de la vision qu’il a eue : « la douce voix de celui qui est
resplendissant », Jésus, notre seul Seigneur, et notre Dieu. Amen.