Gn 14,18-20 ; Ps 109 ; 1Co
11,23-26 ; Lc 9,11b-17
Chers frères et sœurs,
Qu’est-ce
que le « Saint Sacrement » ?
D’abord, interrogeons-nous sur ce mot « sacrement ». Le terme latin «
sacramentum », qui a donné
« sacrement », provient du vocabulaire militaire romain. Il
signifiait le lien de sang qui liait un soldat à son général. Le soldat offrait
une obéissance totale au général, et le général devait assurer la victoire – et
donc la vie sauve, le salut – à son soldat.
Les
premiers chrétiens ont voulu désigner par ce mot « sacrement » le
lien de sang qui unit chaque chrétien à son Chef, Jésus dans une confiance
totale, la foi, pour un salut, une victoire totale sur la mort et l’accès au
Royaume nouveau. Mais alors, revenons à notre question initiale :
« Qu’est-ce que le Saint Sacrement ? ».
Nous
le savons, depuis Adam, l’homme vivait séparé de Dieu. Tout en lui-même le
poussait à chercher Dieu, puisqu’il a été créé à son image, mais comment
rétablir la communion ? Par son Incarnation, sa Passion, sa mort et sa
résurrection, et par son ascension, Jésus nous a dévoilé le mystère de l’amour
miséricordieux de Dieu, la Sainte Trinité, et il nous en a fait le don : il
a rétabli par lui-même l’union entre l’homme et Dieu. Jésus est le sacrement
qui rétablit et renouvelle le lien entre l’humanité et la divinité. Et comme Jésus
est appelé le « Saint de Dieu », on peut parler de « Saint
Sacrement » pour parler de Jésus. Il s’agit bien d’un lien de sang, parce
que Jésus a donné son Sang sur la Croix et qu’il a aussi répandu ce même Sang à
la Pentecôte, en répandant le don de l’Esprit sur ses disciples.
Car
Jésus ne s’est pas manifesté à tous les hommes, mais seulement à ceux qui ont
été choisis et qui lui ont été donnés par le Père : ceux qui sont
baptisés. Il a fait d’eux son Eglise. Saint Paul a utilisé une image :
Jésus est la tête, et les baptisés forment son corps, comme Jésus serait le
général et les baptisés ses soldats. Mais alors quel est le lien de sang, le
sacrement entre Jésus et les baptisés ? Vous le savez bien, c’est l’Eucharistie :
c’est le pain et le vin qui deviennent le Corps et le Sang de Jésus auxquels
nous communions. Par le Saint Sacrement de l’autel, que nous recevons, nous pouvons
dire : « Ce n’est plus moi qui
vit, c’est le Christ qui vit en moi ». Ainsi, dans le récit de la
multiplication des pains, nous avons vu Jésus donner les pains et les poissons
d’abord à ses disciples. Pour qu’ils les distribuent ensuite à la foule.
Jésus
est le Saint Sacrement entre Dieu et l’humanité, l’Eucharistie est le Saint
Sacrement entre Jésus est certains hommes baptisés qui forment l’Eglise, son
Corps. Il reste à faire un lien entre Jésus et tous les hommes. Mais
comment ? Et quel est ce lien, ce troisième Saint Sacrement ? C’est
l’Eglise elle-même, l’assemblée des baptisés qui vivent de l’Eucharistie. Ce
lien de sang entre Jésus et tous les hommes se réalise par le sang du martyre
ou celui de la charité, celui du témoignage évangélique. L’Eglise est elle-même
un sacrement saint. Le lien qui unit Jésus et tous les hommes, c’est
l’Eglise : le Corps de Jésus alimenté et vivifié par l’Eucharistie.
La
solennité du Saint Sacrement que nous fêtons aujourd’hui est donc une triple
fête : celle de Jésus qui par son sang lie éternellement l’humanité à la
divinité ; celle de l’Eucharistie, Corps et Sang de Jésus, qui lie Jésus
aux baptisés qui forment son Corps ; et enfin celle de l’Eglise qui par
son témoignage – parfois jusqu’au sang – lie chaque homme à Jésus et par lui à Dieu.
Chers
frères et sœurs, le pain et les poissons peuvent se multiplier à l’infini parce
qu’ils sont vivants. Ce sont les baptisés eux-mêmes que Jésus donne en
nourriture aux gens affamés, aux affamés de la vie de Dieu. C’est pourquoi
Jésus dit à ses disciples : « Donnez-leur
vous-mêmes à manger ». Arrêtons-nous quelques instants pour essayer de
réaliser ce que nous sommes, nous chrétiens, dans le plan de Dieu, et
réjouissons-nous d’avoir été choisis pour une telle vocation. Amen.