Ac
1,1-11 ; Ps 46 ; He 9,24-28 et 10,19-23 ; Lc 24,46-53
Chers
frères et sœurs,
L’événement de l’Ascension est le miroir de
celui de l’Annonciation. Ce qui s’est passé autrefois à Nazareth nous aide à
comprendre ce qui se passe aujourd’hui à Béthanie.
Souvenez-vous : l’Ange Gabriel s’était
présenté à Marie, et il avait prié celle-ci d’accepter de devenir la mère de
Jésus. Cela paraissait impossible. Comment Dieu pouvait-il aussi se faire
homme ? Mais Marie a dit « oui », et Jésus, deuxième personne de
la Trinité, tout en restant Dieu a épousé notre nature humaine. Et il est né
dans notre monde comme un vrai fils d’homme.
A l’Ascension, c’est Jésus qui se présente
devant son Père et il le prie de devenir aussi, comme il l’a promis à Abraham
et à sa descendance, le Père de tous les hommes. Cela parait impossible.
Comment un homme pourrait-il devenir aussi fils de Dieu ? Mais Dieu a dit « oui »,
et chacun d’entre nous, tout en restant homme, peut désormais être revêtu de la
nature divine. Et dès lors que nous appartenons à Jésus, et que nous recevons
l’Esprit Saint, par le baptême et la confirmation, nous sommes renés dans le
Royaume des cieux comme de vrais fils de Dieu.
Le « oui » divin du Père à la
prière de Jésus correspond au « oui » humain de la Vierge Marie à la
prière de l’Ange. Ce « oui » n’était pas gagné ; il n’était pas
dû : il est, en même temps que l’accomplissement de sa promesse, un don
gratuit de Dieu, une marque essentielle de son Amour.
Je voudrais maintenant que vous compreniez
que cet événement de l’Ascension, cette prière de Jésus à son Père, nous la
vivons à chaque messe.
Nous savons que, durant la prière
eucharistique, le pain et le vin que nous apportons deviennent le Corps et le
Sang de Jésus. Le pain et le vin sont les « fruits de la terre et du travail des hommes » : ils
représentent l’humanité. Par l’Esprit Saint, ils reçoivent la divinité :
ils deviennent le Corps et le Sang de Jésus. Jésus est en même temps homme et
en même temps Dieu.
Or, la messe n’est pas seulement que le pain
et le vin deviennent le Corps et le Sang de Jésus, ce serait s’arrêter à
l’Annonciation et à la naissance de Jésus. Il faut aller jusqu’à sa mort et sa
résurrection et ensuite par son Ascension jusqu’à la Pentecôte.
C’est ce qu’il se passe lorsque nous redisons
les paroles de Jésus : « Ceci
est mon corps, livré pour vous » ; « Ceci est mon sang versé pour vous ». Là Jésus est mort sur la
croix. C’est pourquoi le prêtre se met à genoux en silence. Mais aussitôt nous proclamons
sa résurrection : « Il est
grand le mystère de la foi ! ».
Il faut maintenant aller plus loin : il
faut vivre l’ascension de Jésus. Que se passe-t-il ?
Avec Jésus, nous demandons au Père quelque
chose d’humainement impossible : que nous soyons remplis de l’Esprit
Saint, que nous ne fassions qu’un seul corps et un seul esprit devant lui en
appartenant à Jésus ressuscité, que nous obtenions la vie du Royaume des cieux
avec tous les saints, dont tous nos défunts, que nous vivions éternellement heureux
et en paix et, déjà ici-bas, que notre foi soit renforcée et notre charité
affermie. En fait, ce que nous demandons au Père, c’est que, de la même manière
que Dieu est venu habiter chez nous, nous les hommes nous puissions maintenant
habiter chez lui, comme il l’avait promis à Abraham.
Et pour cela nous lui offrons le Corps et le
Sang de Jésus, c’est-à-dire non seulement notre humanité, tout ce que nous
avons, toute notre histoire, tout ce que nous sommes, mais en même temps le
plus beau cadeau que Dieu nous a fait : Jésus lui-même : « Par lui, avec lui et en lui, à toi
Dieu le Père tout-puissant, dans l’unité du Saint-Esprit, tout honneur et toute
gloire pour les siècles des siècles ». C’est l’Ascension.
Immédiatement, nous enchaînons avec le Notre-Père
pour que, par la brèche ouverte par Jésus dans le ciel, passent toutes nos
demandes : « Que ton règne
vienne, que ta volonté soit faite. Donne-nous notre pain de ce jour ».
Et nous sentons combien nous sommes indignes pour faire de telles demandes :
« Pardonne-nous nos offenses, comme
nous pardonnons aussi », et au bout du bout : « Père, délivre-nous du mal ! »
Et le prêtre reprend : « Libère-nous
Seigneur ! ». Nous demandons aussi à Jésus d’intercéder auprès du
Père : « Donne-nous toujours ta
paix ».
Là, il y a comme un temps d’arrêt, un temps
de silence. Que va répondre le Père ? Va-t-il nous répondre « oui » ?
Nous sommes dans ce temps entre l’Ascension et la Pentecôte, où Jésus a comme
disparu.
Dans cette attente, nous sentons qu’il nous
faut faire la paix entre nous avant que le Père prenne la parole. L’Eglise de
Jérusalem avait élu Mathias entre l’Ascension et la Pentecôte. Il faut se
préparer à la réponse du Père. « Agneau
de Dieu, prends pitié de nous. Agneau de Dieu, donne-nous la paix »…
Et enfin, voici la réponse du Père :
« Heureux les invités aux repas du
Seigneur ! » Notre Père a dit « oui » ! Voilà que
notre prière, portée par Jésus, est acceptée : sa réponse est la communion
à son Corps et à son Sang. Dans la communion, nous recevons plus que ce que nous
demandions : nous recevons tout l’Amour du Père, nous sommes reçus comme
des fils au repas des noces, nous héritons du Royaume des cieux, et nous sommes
remplis de l’Esprit Saint. La communion, c’est justement notre participation à
la Pentecôte.
Voilà pourquoi, chers frères et sœurs, la
messe est si importante. Elle nous fait passer avec Jésus de ce monde à son
Père et elle nous donne la communion à son Amour. La messe, c’est le don de
Dieu aujourd’hui sur la terre. Amen.