Is 62,1-5 ; Ps 95 ; 1Co 12,4-11 ; Jn 2,1-11
Chers frères et sœurs,
« Ils n’ont pas de vin ». Voilà ce que dit Marie à son fils
Jésus. Et celui-ci lui répond : « Femme,
que me veux-tu ? Mon Heure n’est pas encore venue ». Remarquez
que ce n’est pas Jésus qui a le dernier mot, mais sa mère : « Tout ce qu’il vous dira – dit-elle aux
serviteurs – faites-le ».
Quel curieux dialogue entre Jésus
et Marie ! Comme les disciples présents au repas, nous sommes un peu
interloqués. Mais saint Jean nous donne la clé du texte : « Il manifesta sa gloire, et ses disciples
crurent en lui ».
Quand est-ce que Jésus « manifesta sa gloire » et que « ses disciples
crurent en lui » ? A la résurrection. Pensons à l’apparition du 8ème
jour à Thomas, qui finit par dire à
Jésus ressuscité : « Mon
Seigneur et mon Dieu ! ». Si donc nous voulons vraiment
comprendre ce que Marie et Jésus se disent réellement, il faut penser à la
résurrection de Jésus.
Marie dit : « Ils n’ont pas de vin ». Ils n’ont
pas de vin pour vivre heureux. La joie s’est tarie. Le vin préparé pour la fête
est épuisé et il en faut plus. De même dans notre vie terrestre, nous les
hommes, nous pouvons faire beaucoup pour notre bonheur : des maisons, des
piscines, des voitures, des cinémas, des bons repas… mais au bout
d’un moment, tout cela s’épuise et il nous en faut plus. Il nous faut une
joie que seul Dieu peut nous donner. Marie, c’est l’Eglise qui prie et qui
demande à Jésus du vin – du vrai vin – pour la vraie vie, bienheureuse, de
l’homme.
Et Jésus lui répond :
« Femme, que me veux-tu ? Mon
Heure n’est pas encore venue ». Marie est l’anti-Eve. Eve avait pris
d’elle-même du fruit de l’arbre défendu pour le résultat qu’on connaît, Marie
demande à Jésus le fruit de sa croix pour la sanctification de l’homme. C’est
pourquoi Jésus l’appelle « femme » et il lui rappelle que l’Heure,
l’Heure de la croix et de la résurrection, n’est pas encore arrivée.
Mais Marie dit aux
serviteurs : « Faites tout ce
qu’il vous dira ». Marie, c’est l’Eglise qui voit et qui sait par la
foi. Certes, à Cana, ce n’est pas encore l’Heure, mais Marie sait que Jésus
peut anticiper cette Heure par un Signe. La prière de Marie peut obtenir de
Dieu des grâces, que les serviteurs, évêques, prêtres, diacres, et tous les
baptisés, sont chargés de recevoir et de transmettre aux hommes de ce monde. La
seule condition préalable : « Faites
tout ce qu’il vous dira ». Et que nous a dit Jésus ? Expressément
au moins trois choses, très simples : « Comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres » ;
« Faites-ceci en mémoire de
moi » et « Allez donc, de toutes les nations faites des
disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit ».
Voilà le vrai vin qu’à la prière de l’Eglise Jésus donne et que nous avons,
nous les baptisés-serviteurs, à donner au monde : l’amour de Dieu, la vie
de Dieu, la communion avec Dieu.
Maintenant nous comprenons le
Signe que donne Jésus à Cana : il annonce que son Règne sera celui d’une
fête, comme d’une noce, où la terre et le Ciel s’épouseront. Dieu lui-même
donnera le vin : le vin de son amour, de sa vie, de sa communion. Ce Règne
sera celui de la résurrection. D’ailleurs, l’eau transformée en vin, c’est
l’homme transformé en Dieu. C’est la même puissance qui est à l’œuvre. Mieux
encore, souvenons-nous que cette eau est versée dans des jarres pour la
purification. Cette eau, devenue impropre à la consommation, c’est elle qui
devient du vin. De même, ces hommes, salis par le péché en ce monde, ce sont
eux qui, par Jésus, deviennent des saints.
Comprenons donc maintenant notre
situation sur la terre. Nous sommes des migrants et des gens divisés. Nous
avons besoin de retrouver notre vraie terre : celle du Ciel. Nous avons
besoin de retrouver la vraie fraternité : celle de la communion d’amour en
Dieu.
Et en même temps, nous sommes
baptisés : l’Eglise, c’est nous. Nous avons les pieds sur la terre mais
déjà la tête dans le Ciel. Il nous revient de faire comme Marie et de dire sans
cesse à Jésus : « Ils n’ont pas
de vin ». Seigneur, les hommes ont soif de ton amour, de ta vie et de
ta communion avec toi et entre nous : « Que ton règne vienne ». Et de dire aussi : « Faites tout ce qu’il vous dira » :
et nous rappeler sans cesse l’Evangile. Car ce n’est qu’en vivant l’Evangile
que le bon vin de Dieu peut être servi à la noce. Le Seigneur peut générer une
multitude de grâces, il ne peut pas les distribuer ici-bas sans nous. Dire : « Faites tout ce qu’il vous dira »,
c’est dire aussi : « Que
ta volonté soit faite, sur la terre comme au ciel ».
Chers frères et sœurs, à Cana,
Jésus a commencé à ouvrir le Ciel sur la terre. Et ce fut là une déclaration
d’amour de Dieu à l’humanité : « Toi,
tu seras appelée « Ma Préférence », cette terre se nommera
« l’Epousée ». Car le Seigneur t’a préférée, et cette terre deviendra
« l’Epousée ». Comme un jeune homme épouse une vierge, ton Bâtisseur
t’épousera. Comme la jeune mariée fait la joie de son mari, tu seras la joie de
ton Dieu ».
A cette déclaration, avec Marie, nous ne pouvons que répondre :
« Magnificat ».