mardi 19 août 2025

17 août 2025 - GRAY - 20ème dimanche TO - Année C

Jr 38, 4-6.8-10 ; Ps 39 ; He 12, 1-4 ; Lc 12, 49-53
 
Chers frères et sœurs,
 
Le choix des lectures de ce dimanche nous conduit à penser qu’être porteurs de la Parole de Dieu – que ce soit comme prophète ou comme Messie, et donc aussi comme chrétien – n’est pas sans danger… Jérémie se retrouve au fond du puits, enfoncé dans la boue, et Jésus est cloué en croix, voué à la mort. On nous fait entendre dans le psaume la supplication du juste dans l’épreuve et, dans l’Évangile, l’angoisse de Jésus à l’approche de son baptême – de sa passion. Le rédacteur de l’Épître aux Hébreux – c’est-à-dire les chrétiens d’origine juive – les invites à courir « avec endurance l’épreuve qui nous est proposée » ; il parle des persécutions.
Cependant, contrairement à ce que nous pourrions croire, ces lectures ne nous ont pas été proposées pour alimenter notre désespoir, mais elles nous rappellent la fidélité et la bonté de Dieu en toutes circonstances, pour que soient renforcées notre foi et notre espérance, en vue de la joie. Pour mieux comprendre cela, lisons attentivement l’Évangile selon saint Luc.
 
« Je suis venu apporter un feu. » Quand Jésus parle ici de feu, il ne parle ni des feux de forêt, ni du feu de l’enfer. Il parle du Saint-Esprit. Ce feu est celui que vit Moïse au buisson ardent : feu qui illumine le buisson sans le détruire pour signaler la Présence de Dieu. C’est le même feu qui, porté par le chandelier à sept branches, illumine le sanctuaire du Temple, que nous avons nous aussi dans l’église : ce sont les bougies qui clairent sur l’autel. Ce feu est aussi celui dont les disciples ont parlé : « Notre cœur n’était-il pas tout brûlant en chemin, tandis qu’il nous ouvrait les Écritures ? » Car, pour un araméen, c’est le même mot « nour » qui signifie le feu, et la passion de l’amour. Voilà le feu dont parle Jésus, qu’il est si impatient de voir allumé en nous : celui de l’amour de Dieu, le don de l’Esprit Saint.
 
Quand Jésus dit cela, il le dit en tant que Dieu : « Je suis venu apporter un feu sur la terre. » Mais quand il ajoute : « Je dois recevoir un baptême », il le dit en tant qu’homme. En fait, il répond à la promesse du feu d’amour divin par le cri de l’homme qui espère : « Je dois recevoir un baptême, et quelle angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli. » Oui, nous sommes pressés et anxieux dans l’attente du baptême dans l’Esprit et le feu, par lequel nous accomplirons enfin totalement notre vocation à la communion d’amour, pour l’éternité. Jésus n’a pas peur du baptême pour lui-même, mais il est tendu dans l’attente de ce moment, comme des parents au moment d’une naissance, par exemple.
Voyez ce mouvement extraordinaire : en tant que Dieu Jésus dit qu’il est venu apporter un feu d’amour, et en tant qu’homme il répond qu’il est dans l’attente de cet accomplissement. Saint Irénée le disait si bien : « Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu. »
 
Maintenant, dit Jésus : « Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? » Ici il y a un petit piège, difficile à identifier si on ne sait pas. En araméen, il y a deux mots pour dire paix : « shyna », qui veut dire « terre cultivée », « tranquillité », prospérité » ; et « shelma », qui a donné « Shalom » ou « Jérusalem », qui est une paix intérieure profonde, une paix qui vient de Dieu. L’araméen fait donc la différence entre la paix humaine, la vie paisible sur la terre, et la paix qui vient de Dieu, une paix profonde. Or le grec ne connaît qu’un seul mot pour dire « paix » : « Eirenè », qui a donné les prénoms Irénée et Irène. Du coup, de quelle paix parle ici Jésus ? Non, il n’est pas venu apporter la paix humaine, la tranquillité et la prospérité de celui qui veut accumuler du blé dans ses greniers, mais oui, il est venu apporter la paix profonde de Dieu. C’est d’ailleurs le feu dont il vient juste de parler.
 
Par conséquent, on comprend mieux la suite : le feu d’amour – celui de la Pentecôte, le don de l’Esprit Saint, ne vient pas apporter une tranquillité humaine, une vie pépère, mais il a deux conséquences pour nous. D’un point de vue pratique, il va créer des divisions entre ceux qui ont la foi et ceux qui ne l’ont pas. Et d’un point de vue spirituel, il va purifier en nous ce qui est conforme à l’homme nouveau et brûler ce qui est de l’homme ancien. « Cinq personnes de la même famille », ce sont des gens qui vivent ensemble mais qui – du fait de la foi – ne vivent plus sur la même longueur d’onde ; et ce sont aussi nos dispositions intérieures, en chacun d’entre nous, qui se divisent lorsque nous sommes déjà attirés par la lumière de Dieu, mais encore tentés par les ténèbres, par les séductions diverses. Alors qu’avant nous ne le savions pas, et nous vivions entièrement dans les ténèbres, dans une fausse unanimité d’esprit en raison de notre aveuglement, la venue du feu d’amour nous révèle notre état réel de pécheur et en même temps nous attire vers la gloire lumineuse.
 
C’est ainsi, chers frères et sœurs, que lors de sa venue l’Esprit Saint sera comme un feu : il divisera les choses de ce monde, brûlera ce qui est péché et illuminera ce qui est justice, en donnant sa paix profonde. Nous pouvons être habités par la crainte devant les épreuves – Jésus est passé par là lui aussi –, mais nous devons être entraînés par l’impatience avec laquelle Dieu veut que nous soyons réconfortés. Derrière le feu, l’Esprit Saint se fait rosée.
  

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