Jb
7, 1-4.6-7 ; Ps 146 ; 1 Co 9, 16-19.22-23 ; Mc 1, 29-39
Chers
frères et sœurs,
Après
avoir appelé ses premiers disciples Pierre et André, Jacques et Jean, Jésus
s’est rendu à la synagogue de Capharnaüm où il s’est fait remarquer par sa
parole d’autorité, supérieure à celle des scribes, capable même d’en imposer
aux esprits impurs. C’était le jour du sabbat, donc un samedi.
Sortant
de la synagogue, Jésus s’est rendu à la maison de Pierre et André où il guérit
la belle-mère de Pierre. Ce n’est qu’après le coucher du soleil, quand le temps
du sabbat fut terminé, que les gens vinrent à Jésus pour se faire guérir. En
effet, pour un juif pieux, soigner des malades est une activité humaine qu’on
ne pratique pas durant le temps du sabbat. Puis est arrivée la nuit à la fin de
laquelle Jésus s’est retiré dans un
endroit désert pour prier. Le dimanche matin, les disciples l’ont cherché, et
quand ils l’eurent retrouvé, Jésus leur dit : « Allons ailleurs,
dans les villages voisins afin que là aussi je proclame l’Évangile. »
Voilà donc ce qu’il s’est passé. Il y a deux observations à faire.
La
première est que le récit s’articule autour du passage du samedi au dimanche,
du jour du sabbat au jour de la résurrection. Et de fait, on peut et on doit
lire ce récit en ayant à l’esprit ce qu’il se passe durant la passion, la mort
et la résurrection de Jésus.
Le
plus explicite est ce qu’il se passe le dimanche matin : Jésus a disparu
et les disciples – à commencer par Pierre – le recherchent, tout comme ils vont
chercher Jésus au tombeau vide le dimanche de la résurrection. « Tout
le monde te cherche », dit Pierre : en effet ! Mais quand
ils ont retrouvé Jésus, c’est comme à la Pentecôte : pour aller dans les
villages voisins, pour aller jusqu’au bout du monde.
La
seconde observation que l’on peut faire du récit de saint Marc, est qu’il y a
une progression qui part de la Synagogue de Capharnaüm, puis à la maison de
Pierre, avec un temps d’intimité, avant d’y accueillir la ville entière. Et
puis, après la nuit du samedi au dimanche, on quitte Capharnaüm pour parcourir
la Galilée.
Cette
progression annonce parfaitement la mission de Jésus adressée d’abord aux
hommes pieux d’Israël, Grand prêtres, scribes et pharisiens – les hommes du
Temple ou de la Synagogue.
Ensuite,
Jésus s’adresse au peuple d’Israël, dans l’intimité de sa maison ou de son
cœur. Il est remarquable ici qu’il va y guérir une vieille femme – l’âme de la
maison, de la famille, sa mémoire. La belle-mère de Pierre est comme la vieille
prophétesse Anne qui était nuit et jour à prier dans le Temple. Elle est aussi
Marie qui priait : « Il relève Israël, son serviteur, il se
souvient de son amour, de la promesse faite à nos pères, en faveur d'Abraham et
de sa race, à jamais. »
Et
il est normal qu’ayant guéri le cœur, le reste du corps vienne aussitôt
demander lui aussi sa guérison. Ainsi
tous les habitants de Capharnaüm, de la ville – c’est-à-dire l’image de
Jérusalem, de l’ensemble d’Israël – viennent à Jésus pour trouver auprès de lui
le réconfort. Ce faisant, Jésus chasse aussi les démons – et on se souvient de
ses controverses avec certains scribes et pharisiens qui ne comprennent pas ou
qui s’opposent à sa mission. Il les renvoie, leur ferme la bouche. Nous le
savons, la confrontation est si violente qu’elle conduit Jésus à sa
Passion : vient la nuit et Jésus se retire dans le désert, comme après sa
mort il descend aux enfers.
Arrive
alors la dernière étape, celle de la résurrection et, avec les Apôtres, la
proclamation de l’Évangile à toute la Galilée, c’est-à-dire au-delà de la
Synagogue, au-delà de la famille d’Israël et de Jérusalem, en direction de
toutes les nations.
Ainsi
donc, la première prédication de Jésus à Capharnaüm puis en Galilée fonctionne
soit comme une prophétie de la grande mission de Jésus pour toute l’humanité,
d’abord pour le Peuple d’Israël puis ensuite à toutes les nations, mais aussi
comme une forme de répétition générale, où l’on commence d’abord par faire en
petit ce qu’on va ensuite faire en grand.
Il
y a là un enseignement pour nous. Nous autres baptisés, nous avons vocation à
annoncer l’Évangile au monde entier. C’est la mission que nous avons reçue de
Jésus depuis la Pentecôte. Évidemment, nous ne sommes pas tous ni saint Ferreol
et saint Ferjeux, ni saint Colomban, ni saint François-Xavier… mais nous
pouvons faire en petit, à notre mesure, ce que eux ont fait en grand. Ce sont
les deux piécettes déposées par la vieille femme dans le tronc du Temple de
Jérusalem. Elles avaient plus de valeur que les fortunes laissées en oboles par
des gens bien plus riches qu’elle. Si donc nous annonçons l’Évangile de grand
cœur, servant le Seigneur comme la belle-mère de Pierre, jour et nuit comme la prophétesse Anne, et faisant du bien à
notre prochain, à le guérir et à chasser ses démons, alors ce que nous faisons
en petit aura autant de valeur, si ce n’est plus avec l’aide de l’Esprit Saint,
que ce que peuvent faire les plus grands apôtres.