lundi 2 mai 2022

30 avril - 1er mai 2022 - LEFFOND - NEUVELLE-lès-LA CHARITE - 3ème dimanche de Pâques - Année C

 Ac 5, 27b-32.40b-41 ; Ps 29 ; Ap 5,11-14 ; Jn 21,1-19
 
 Chers frères et sœurs,
 
La première partie de l’Évangile que nous venons de lire est étonnant. À travers ce récit de pêche miraculeuse et de repas pris avec Jésus au bord du lac, il apparaît deux enseignement importants pour nous.
 
Le premier correspond à la volonté du Seigneur que l’Évangile soit adressé à toutes les nations, c’est-à-dire au-delà d’Israël. Cela est indiqué de multiples manières. Par exemple, les disciples assemblés au bord du lac sont au nombre de sept, comme sept diacres avaient été ordonnés afin que ne soient pas lésés dans le service des tables les chrétiens de langue grecque. Ensuite, le filet est jeté dans la mer pour en ramener 153 poissons. Que l’on suive les Écritures – ici le second livre des Chroniques – ou les auteurs anciens, selon saint Jérôme, l’indication est pratiquement la même : pour le premier 153.600 est le nombre des étrangers qui résident à l’époque de David en Israël ; pour les second, il existait en tout dans le monde 153 espèces de poissons. Il s’agit donc de rassembler non seulement ceux qui sont étrangers en Israël, mais aussi toutes les nations qui sont dans le monde. L’Évangile précise que le filet ne s’est pas déchiré. Mais nous savons, au chapitre 13 de l’Évangile selon saint Matthieu, qu’une fois le filet ramené à terre, les pêcheurs trient les poissons.
Il faut ajouter à cet enseignement sur la vocation évangélisatrice de l’Église, qu’il ne suffit pas que Pierre et les autres disciples veuillent aller à la pêche pour trouver du poisson. Ce n’est pas parce que le pape et les évêques désirent absolument une nouvelle évangélisation, ou aller aux périphéries, que la mission va réussir. Car, dit l’Évangile, « cette nuit-là, ils ne prirent rien ». Il faut attendre le lever du jour – c’est-à-dire celui de la lumière et de la paix de la Résurrection – et surtout l’ordre de Jésus : « Jetez le filet à droite de la barque » pour qu’enfin la pêche soit abondante. Cela signifie qu’on ne peut être vraiment missionnaire que dans la foi en Jésus ressuscité, l’âme illuminée par la gloire de Dieu et le cœur en paix, et si Jésus – par son Esprit Saint – conduit les poissons dans le filet. Plus encore, quand la masse des poissons est trop grande, il est impossible aux apôtres de tirer le filet vers eux. Ce n’est que quand ils veulent se diriger vers Jésus qu’ils peuvent le faire. 
Ceci est une leçon pour nous : pour évangéliser, il faut être familier de Jésus ressuscité et vouloir venir à lui, en répondant à son appel.
 
Le second enseignement correspond à la volonté du Seigneur que cette évangélisation soit également une eucharistie. Ainsi, tout commence quand les disciples sont assemblés. Notre traduction dit : « Il y avait là, ensemble », mais les manuscrits anciens disent : « Ils étaient assemblés, tous ensemble ». L’idée est la même : en grec, « assemblée » se dit « ekklesia », c’est-à-dire « Église ». C’est le début de la messe. Pierre et les disciples partent ensuite à la pêche, durant le temps de la nuit, sans Jésus, puis celui du jour, avec Jésus. C’est le temps des Écritures et de l’Évangile : le temps des lectures.
Quand le disciple que Jésus aimait s’écrie : « C’est le Seigneur ! » – le reconnaissant ressuscité comme au matin de Pâques – alors Pierre, qui est nu, revêt son vêtement. Il fait comme Jésus après le lavement des pieds, qui se revêt de son vêtement, la tunique sacerdotale, pour célébrer la sainte Cène. Dans le judaïsme, la nudité n’est pas tolérée car elle fait fuir la Présence de Dieu, elle ne permet pas la prière. Pour la liturgie, il faut revêtir le vêtement des noces, le vêtement blanc des baptisés, qui est celui des prêtres du Seigneur. Ce geste de Pierre nous introduit donc dans la prière eucharistique.
C’est alors que les autres disciples arrivent avec le filet rempli de poissons. Or, dans l’une des plus anciennes prières eucharistiques connues, celle de la Didachè, nous avons cette formule : « Comme ce pain rompu, d’abord dispersé sur les montagnes, a été recueilli pour devenir un, qu’ainsi ton Église soit rassemblée des extrémités de la terre dans ton royaume, car à toi appartiennent la gloire et la puissance pour les siècles. » Dans notre Évangile d’aujourd’hui, l’image n’est pas celle du pain, mais des poissons, mais le sens de la prière est le même.
Les disciples arrivent donc près de Jésus et découvrent devant lui un feu de braise, avec déjà quelques poissons dessus. Pour Saint Éphrem ce feu de braise rappelle celui auprès duquel Pierre s’était réchauffé au moment de son reniement. Aujourd’hui il sera celui de sa confession. Mais pour la tradition syriaque, ce feu de braise est aussi celui qui se trouve dans le Temple, sur lequel on fait griller de l’encens en Présence du Seigneur, pour signifier la prière universelle des saints. On découvre aussi, près de Jésus, du pain. Et c’est normal, dans le Temple se trouvent aussi les pains qui servent à l’offrande. Nous sommes donc à l’offertoire : Pierre apporte les 153 poissons, qui sont – comme nous l’avons vu – pesés et comptés. Les Apôtres font leur profession de foi : « Ils savaient que c’était le Seigneur ». Jésus fait alors la prière de l’offrande : il prend le pain et – selon les manuscrits anciens – dit la bénédiction, et le donne à ses disciples : c’est consécration, l’offrande à Dieu, puis la communion.
 
Et voilà, chers frères et sœurs, comment célébrer l’eucharistie et évangéliser sont deux actions inséparables, qui ne peuvent aboutir sans Jésus lui-même, ressuscité et présent à ceux qui sont rassemblés en son nom, partout et en tout temps.

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