So
3,14-18a ; Is 12 ; Ph 4,4-7 ; Lc 3,10-18
Chers
frères et sœurs,
L’Évangile
que nous avons entendu est important pour comprendre qui est Jésus et quelle
est sa mission, alors que les gens se demandent si le Messie tant attendu n’est
pas plutôt Jean-Baptiste ?
En
effet, comme nous l’avons vu dimanche dernier, Jean-Baptiste appelle chacun à
se convertir, à préparer sa vie à la venue du Seigneur, pour qu’il vienne la transformer
en vue du salut. Jean-Baptiste n’est pas n’importe qui : il appartient à
une famille de prêtres, peut-être même de grands prêtres. Aussi sa parole a-t-elle
du poids en Israël. C’est pourquoi Pharisiens et Sadducéens – c’est-à-dire les
prêtres de Jérusalem – le prennent très au sérieux.
Juste
avant le passage de l’évangile que nous avons lu, Jean-Baptiste s’adressait justement
à eux, en leur rappelant que l’appartenance à la descendance charnelle
d’Abraham ne suffisait pas pour être sauvé : il faut aussi accomplir un
service de Dieu qui soit digne de lui. D’ailleurs, expliquait-il, Dieu lui-même
peut susciter de nouveaux fils à partir des pierres que voici – annonçant déjà que
le salut pouvait être ouvert à tout
homme sur la terre. Jean-Baptiste leur annonçait aussi que le temps était
venu : Dieu ne se contente plus d’un entretien ordinaire de ses arbres,
mais il va maintenant en tailler les racines. Prêtres et Pharisiens sont donc
prévenus : l’hypocrisie doit cesser, car le temps de Dieu est venu.
Or,
c’est juste à ce moment que les foules s’adressent à Jean-Baptiste pour lui
demander : « Alors, Que devons-nous faire ? »
D’après saint Matthieu, cette question n’est posée d’abord que par les
Pharisiens et les Sadducéens ; mais pour Luc il s’agit des foules. Voyons
pourquoi cette différence.
Trois
groupes de gens posent à Jean-Baptiste la même question « Que
devons-nous faire ? » : d’abord les Pharisiens et les
Saducéens – ou les foules ; puis les Publicains, c’est-à-dire les
collecteurs d’impôts ; puis enfin les soldats. Pourquoi ces trois groupes
de gens, auxquels Jean-Baptiste semble répondre par des banalités ? :
« faites bien votre travail, avec honnêteté, et tout ira bien ! »
Ce n’est pas très original pour un Messie !
En fait, derrière ces exemples,
nous avons un rappel à l’observance de la Loi de Moïse : « Tu ne
tueras pas », pour les Soldats ; « Tu ne voleras pas » pour
les Publicains. Et pour les premiers nous aurions de manière imagée un rappel aux
commandements de l’amour de Dieu et du prochain. En effet, donner un vêtement à
celui qui n’en a pas, ne signifie pas seulement l’habiller, c’est aussi et
surtout lui donner le moyen d’accomplir son service de louange de Dieu. Car le
vêtement par excellence – surtout quand on s’adresse à des Pharisiens et à des
Sadducéens – c’est le vêtement liturgique pour accomplir le service de Dieu. Ainsi,
de cette manière, Jean-Baptiste rappelle que non seulement les prêtres doivent
assurer le service de Dieu mais ils doivent aussi permettre, à celui qui ne
sait pas ou ne peut pas de quelque façon, de pouvoir accomplir lui aussi sa
vocation. Donner un vêtement à quelqu’un c’est lui donner le moyen de louer
Dieu et lui permettre de pouvoir ainsi, lui aussi, d’honorer le premier
commandement. Donner à manger est un commandement semblable : de même que
les Prêtres de Jérusalem vivent des offrandes de nourriture faites au Temple,
de même eux aussi doivent partager ce qu’ils auront reçu par la grâce de Dieu.
Et, par-delà la nourriture du corps, il s’agit surtout de toute nourriture spirituelle :
la Loi de Moïse, les prophètes et les psaumes. Les prêtres et les pharisiens
doivent instruire le peuple et ne pas réserver pour eux-mêmes la connaissance
de Dieu.
Ainsi
donc, Jean-Baptiste appelle chacun : prêtre, administrateur et soldat – c’est-à-dire
tout le monde comme l’a bien compris saint Luc – à accomplir non seulement son
métier honnêtement, mais surtout à accomplir les commandements de la Loi, ici résumée
pour l’essentiel par le devoir de l’amour de Dieu et du prochain et par l’interdiction
du vol et du meurtre par intérêt. Voilà les conditions posées par Jean-Baptiste
pour se convertir et être baptisé par lui, pour se préparer à la venue du
Seigneur. Son message est tellement impressionnant – car il appelle à revenir
aux sources vives d’Israël – qu’on se demande s’il n’est pas lui-même le
Messie.
Mais
Jean va plus loin : « Il vient, celui qui est plus fort que moi.
Je ne suis pas digne de dénouer la courroie de ses sandales. Lui vous baptisera
dans l’Esprit Saint et le feu. » Jean répond qu’il n’est pas le
Messie. Le Messie est tel que lui – Jean – n’est même pas digne de défaire la
courroie de ses sandales. Ici, il compare le Messie au Grand-Prêtre dont on
défaisait la courroie des sandales avant qu’il entre dans le Saint des Saints.
Jean ne se sent même pas digne d’être un enfant de chœur ! D’ailleurs, le
Messie attendu va baptiser non pas dans de l’eau matérielle, mais dans l’Esprit
Saint et le feu. C’est-à-dire que le Messie attendu est Dieu lui-même. Le
baptême qui permet d’entrer dans le Royaume nouveau n’est pas un baptême en vue
de l’instauration d’un royaume terrestre, mais un baptême en vue de l’accomplissement
du royaume céleste. Le baptême de Jean n’est qu’une préparation, une prophétie
au mieux, du baptême réel – celui que Jésus inaugure – le baptême des
chrétiens, qui lui fait entrer dans la vie éternelle.
Finalement,
chers frères et sœurs, grâce à la prédication de Jean-Baptiste, on comprend
mieux qui est Jésus : il est le Messie véritable qui juge les cœurs selon
la justice de la Loi et qui, par son baptême dans l’Esprit Saint et le feu, fait
entrer tout homme juste dans la vie éternelle. Maintenant,
puisque nous en sommes les prémices, rendons grâce à Dieu !