mardi 27 août 2019

24-25 Août 2019 - ARGILLIERES - CHEVIGNEY - 21ème dimanche TO - Année C


Is 66,18-21 ; Ps 116 ; Hb 12,57.11-13 ; Lc 12,22-30

Chers frères et sœurs,

Jésus est interrogé sur le nombre des sauvés, mais il répond en donnant un enseignement sur le jugement dernier.  Il a botté en touche : Jésus ne répond pas à la question et ne dit pas s’il y en a un petit nombre ou un grand nombre. Il refuse de faire un décompte, chose qu’en général le Bon Dieu n’aime pas, à cause de sa générosité et de sa miséricorde. La question du nombre des sauvés reste donc une question ouverte. En revanche Jésus invite ses interlocuteurs à la conversion. Car le monde va être bouleversé et les premiers d’aujourd’hui, demain seront les derniers. Et alors il sera trop tard pour inverser les choses.

Il y a deux manières de comprendre ce que dit Jésus. Soit, on le prend au premier degré, à savoir que le moment où le Maître de maison se lève pour fermer la porte correspond à la résurrection de Jésus ; Soit à un degré plus spirituel où ce moment correspond à la fin des temps. Dans l’un et l’autre cas, l’invitation à la conversion ne s’adresse pas exactement aux mêmes personnes.
Dans le premier cas, on peut comprendre que Jésus invite les Juifs à se convertir avant qu’il ne meure et ne ressuscite, car après sa résurrection, l’Esprit Saint répandu dans le monde va susciter l’Église, au sein de laquelle seront rassemblés des baptisés de toutes les nations. Ce sera la réalisation de la prophétie d’Isaïe. Ceux-là prendront la première place, et les Juifs qui ne seront pas devenus chrétiens la dernière. Et ce n’est pas le rappel du fait que le Seigneur les a connus les premiers qui leur conservera un droit d’aînesse. Plus encore, le Seigneur rejettera ceux qui commettent l’injustice. On peut penser à la condamnation injuste de Jésus au supplice de la croix.
Mais dans le second cas, si on place la fermeture de la porte à la fin des temps, alors les chrétiens aussi doivent être comptés comme les Juifs. Ce n’est pas seulement le fait d’avoir été au caté et à la messe qui nous sauvera, mais aussi le fait de nous comporter comme des justes durant notre vie. Car, le jugement de Dieu ne nous appartient pas et, dans sa grande miséricorde, il peut ouvrir le ciel à tous les hommes qui auront vécu avec une conscience droite. Et eux seront les premiers, et nous, qui nous croyons déjà arrivés, les derniers.

Alors comment faire pour savoir quelle lecture sera la bonne ? Je pense que les deux lectures sont bonnes, mais il faut les lire comme des prophéties.
Oui, la mort et la résurrection de Jésus fonctionnent comme une porte dans l’histoire de l’humanité : il y a un avant et il y a un après. Avant, il y avait le peuple de Dieu, qui se réduisait à Israël, et après, grâce à l’Esprit Saint, il y a l’Église dont les membres proviennent d’Israël et aussi de toutes les nations. Comme l’a dit Isaïe, le Seigneur mettra en elles un signe – celui du baptême ; elles seront évangélisées jusqu’aux îles lointaines ; les baptisés deviendront une offrande au Seigneur, qui prendra même des prêtres et des lévites parmi eux. Et de fait, s’il y a des évêques et des prêtres dans l’Église, tous les baptisés ont été faits prêtres, prophètes et rois.
Et justement, si les baptisés sont prêtres, ils sont aussi prophètes. L’Église d’aujourd’hui, composée d’hommes de toutes les nations, annonce prophétiquement le grand rassemblement final de tous les hommes justes, à la fin des temps. Mais inversement, comme il sera beaucoup demandé à ceux à qui il a été beaucoup donné, ce qui est arrivé aux membres du peuple d’Israël qui ne se sont pas convertis avant la résurrection de Jésus, peut aussi nous arriver si nous ne vivons pas conformément à notre baptême, avant que la fin du monde arrive. Ce n’est pas tant que le ciel nous sera totalement fermé, mais plutôt que nous serons relégués en seconde division. On a une idée ici du purgatoire comme salle d’attente avant d’être reçu, ou comme oral de rattrapage, au bac.

Il reste quand même une question : sur quoi serons-nous donc jugés ? Jésus dit : « Éloignez-vous de moi, vous tous qui commettez l’injustice ! ». Mais quelle est cette injustice ? Dans un commentaire juif traditionnel du psaume 10, on raconte l’histoire d’un voyageur arrivé trop tard aux portes de la ville. Celles-ci sont fermées pour la nuit, pour des raisons de sécurité. D’après le commentaire, la raison du retard du voyageur provenait soit de sa négligence, soit de son orgueil : soit il n’a pas fait attention à l’heure, en s’amusant en route, soit il a cru qu’étant donné son importance on lui ouvrirait, ou bien que – présumant de ses forces – il arriverait avant l’heure. Mais cette explication, qui est proche de celle de Jésus, ne se comprend vraiment que dans un sens spirituel : il s’agit de négligence ou d’orgueil vis-à-vis de Dieu, qui sont des empêchements pour accéder à son Royaume. « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit, et ton prochain comme toi-même » : voilà au contraire ce qui fait l’homme juste, vertueux et humble, qui a sa place dans la maison de Dieu dès aujourd’hui, dans l’Église, mais aussi demain, dans la Jérusalem du ciel.

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