Sg 18,6-9 ; Ps
32 ; He 11,1-2.8-19 ; Lc 12,32-48
Chers frères et sœurs,
La situation est simple. Nous sommes tous comme
des serviteurs du Maître, et nous attendons son retour, non pas en nous
croisant les bras, mais en nous activant paisiblement dans l’attente de sa
venue. Pour ceux à qui le Seigneur a confié une charge de pasteur dans son
Église, dans sa maison, l’attente du Seigneur sera plus importante car, dit
Jésus, « à qui l’on a beaucoup donné, on demandera beaucoup, et à qui
l’on a beaucoup confié, on réclamera davantage ». C’est pourquoi il
est bon de prier particulièrement pour les évêques et pour les prêtres !
Une parole de Jésus est un peu énigmatique et
elle pose problème aux traducteurs, pourtant elle nous donne une clé pour
comprendre ce que Jésus nous enseigne. Il est noté ici que le Maître « écartera »
le mauvais serviteur et « lui fera partager le sort des infidèles ».
En fait, Luc a écrit que le Maître « coupera en deux » le
serviteur mauvais et il « mettra sa part avec les serviteurs
infidèles ». Dans le texte parallèle, saint Matthieu a écrit « il
mettra sa part avec les preneurs de visages », c’est-à-dire avec les
hypocrites.
Là nous avons la clé. Il ne s’agit pas de
comprendre que les infidèles sont des incroyants. Non, les infidèles sont des
hypocrites, c’est-à-dire des gens qui se font passer pour des croyants, mais
qui en fait n’en sont pas. C’est pour cela qu’ils sont doubles, et que le
Maître peut facilement les couper en deux.
La leçon de Jésus porte donc sur la qualité de
notre foi. Il y a deux solutions.
La première est celle des serviteurs infidèles.
Ce sont des gens qui ont perdu la foi dans la venue prochaine du Maître et qui,
tout en assurant un service de façade, se comportent comme des gens sans
espérance, vivant sur terre comme si le ciel n’existait pas. Ce sont des gens
qui murmurent contre le Seigneur dans leur cœur, et qui suivent la voie de
Judas. Judas écoutait Jésus ; il était l’un des douze Apôtres ; Jésus
lui a lavé les pieds comme aux autres ; il lui a donné la communion. Et
pourtant le cœur de Judas était ailleurs et il a fini par trahir Jésus. Voilà
le serviteur infidèle, qui mène une vie double.
La seconde solution au contraire est celle des
serviteurs fidèles, c’est-à-dire qui vivent dans la foi. Ceux-là attendent le
retour du Maître. Et ils sont tellement certains de sa venue prochaine, qu’ils
s’en réjouissent déjà comme l’enseigne le livre de la Sagesse : « Assurés
des promesses auxquelles ils avaient cru, ils étaient dans la joie […] Dans le
secret de leurs maisons, les fidèles descendants des justes offraient un
sacrifice, et ils consacrèrent d’un commun accord cette loi divine : que
les saints partageraient aussi bien le meilleur que le pire, et déjà ils
entonnaient les chants de louange des Pères ». Nous reconnaissons ici
le visage de l’Église au lendemain de la Pentecôte, où les premiers chrétiens
célébraient l’eucharistie, mettaient leurs biens en commun et chantaient les
louanges du Seigneur, dans la joie. Nous en sommes les descendants directs.
Pour nous donner une bonne illustration de
l’esprit de joie qui habite les serviteurs fidèles, il faut penser à la finale
d'une coupe du monde de football. Une équipe a trois points d’avance sur l’autre,
et c’est le temps des prolongations. Cette équipe est sûre de gagner et elle
est déjà dans la joie de la victoire. Ainsi sont les chrétiens : depuis
que Jésus est ressuscité, le match contre le diviseur et contre la mort a été
gagné définitivement : le temps de l’Église n’est que le temps des
prolongations, avant le coup de sifflet final.
Réjouissons-nous donc, et continuons de marquer
des buts contre l’adversaire en nous offrant nous-mêmes dans la joie au service
du Seigneur et de nos frères. Ainsi heureux serons-nous quand le Seigneur
viendra : il mettra sa ceinture autour des reins, nous fera passer à table
et nous servira lui-même un repas de fête. N’est-ce pas déjà ce que nous allons
vivre maintenant ?