Is
62,1-5 ; Ps 95 ; 1Co 12,4-11 ; Jn 2,1-11
Chers frères et sœurs,
« Ils n’ont pas de vin », dit Marie à Jésus. En
une phrase, nous avons tout le cri de l’humanité qui a besoin de la vie de Dieu
pour pouvoir exister, et nous avons la vocation de l’Église qui est de prier
Jésus, et par lui le Père, pour que cette humanité et l’univers entier reçoivent
de lui la vie, c’est-à-dire l’Esprit-Saint. « Ils n’ont pas de vin »,
c’est-à-dire : « Il n’ont pas l’Esprit de vie ».
Et c’est pourquoi Jésus répond à Marie « Mon heure n’est
pas encore venue ». Son Heure, c’est celle de sa Passion, de sa mort
et de sa Résurrection, par lesquelles Jésus priera son Père de nous faire
miséricorde et de nous donner cet Esprit de vie.
Ce don sera réalisé à la Pentecôte, où les disciples sont dits
« pleins de vin doux », et ce don se perpétue sans cesse, à la
prière de l’Église, pour chaque sacrement, en attendant le jour de la
manifestation totale de la gloire de Dieu, qui sera comme une grande Pentecôte.
Vous avez remarqué que cette demande de vin a été faite par Marie
au cours d’un repas de mariage. Et vous avez remarqué aussi que Jésus s’adresse
à sa mère en l’appelant « femme ».
Ce que Jésus nous révèle à l’occasion des noces de Cana, est que la
relation de Dieu par rapport à l’humanité est celle d’un mari à l’égard de son
épouse. Dieu est l’homme, l’humanité est la femme, et Marie en est la perle.
Dieu a la volonté d’épouser l’humanité pour partager avec elle sa vie éternelle.
C’est ce que disait déjà Isaïe, en parlant de Jérusalem :
« On ne te dira plus « Délaissée » !... Toi, tu seras
appelée « Ma préférence », cette terre se nommera
« L’Épousée »… Comme la jeune mariée fait la joie de son mari, tu
seras la joie de ton Dieu ».
Le mariage des noces de Cana, comme tous les mariages de la terre, est
l’image de l’union d’amour entre Dieu et l’humanité. Il n’y a pas de plus grand
signe qu’un mariage pour illustrer ce mystère d’amour : Dieu nous aime
comme un jeune marié aime sa jeune épouse.
Jésus change donc l’eau en vin pour montrer que, par son
intercession auprès du Père, notre humanité et notre univers vont être transformés
pour devenir la communion des saints et le royaume de Dieu. Et que, déjà
maintenant, ils sont la vraie vie et le vrai bonheur de l’humanité.
En effet, le maître du repas ne comprend pas pourquoi, alors qu’on
est arrivé à la fin de la noce, on apporte du bon vin. D’habitude, on le sert
au début, et non pas à la fin. Ceci s’explique très simplement, car à l’époque,
on ne conservait pas le vin comme aujourd’hui en bouteille, mais dans des
jarres sous forme de confiture de raisin fermentée. On versait alors l’eau sur
la confiture pour en percoler du vin, exactement comme on fait du café.
Évidemment, plus on passait d’eau dans la confiture de vin, moins le vin était
bon et plus il devenait de l’eau. Or, contre toute attente, Jésus a produit du
bon vin à la fin.
Saint Jean veut nous faire comprendre que le vin habituel est
comparable au don de la Loi fait à Moïse et que ce don, s’il est bien bon au
départ, il s’épuise avec le temps. Les prophètes envoyés par Dieu comme rappel
de la Loi, en réalité, ne faisaient que montrer l’épuisement de sa force
spirituelle, comme le vin – inéluctablement – finissait par se transformer en
eau.
Au contraire, avec Jésus, c’est l’eau qui est transformée en vin. C’est-à-dire
que Dieu prend ce que nous sommes, notre humanité, avec tous ses péchés – Jésus
va se servir des cuves des purifications rituelles, c’est-à-dire des récipients
les moins purs – pour en tirer le vin nouveau.
Le maître du repas dit à Jésus : « Toi, tu as gardé le
bon vin jusqu’à maintenant ». Oui, Jésus est venu à la fin des temps
pour que, par l’annonce de l’Évangile, par sa mort et par sa Résurrection, les
pécheurs soient pardonnés, les malades guéris, les prisonniers libérés et les
morts ressuscités. Tel est le vin nouveau offert par Jésus.
Chers frères et sœurs, nous qui sommes baptisés dans l’eau et
l’Esprit Saint, nous savons et nous n’oublions pas que nous avons accès aujourd’hui
à ce vin nouveau par les sacrements, et plus particulièrement par celui de
l’Eucharistie où le pain et le vin sont transformés en Corps et en Sang de
Jésus, pain de la Vie et vin du Royaume éternel. Nous savons, et nous
n’oublions pas, que nous sommes Sainte Église, l’épouse bien-aimée du Christ,
et que notre vocation est de le prier, comme la Vierge Marie l’a fait à Cana, pour
qu’il ne cesse jamais, par son intercession auprès du Père, de procurer du vin
à ceux qui en ont besoin.