Ac 14,
21b-27 ; Ps 144 ; Ap 21, 1-5a ; Jn 13, 31-33a.34-35
Chers
frères et sœurs,
Aujourd’hui les textes que nous avons lus nous
permettent d’aller au cœur de notre foi. Je vous emmène en pèlerinage :
attachez vos ceintures !
Depuis la chute d’Adam et Eve, nous savons
que le Paradis, le ciel, la communion parfaite, avec Dieu et entre nous, nous
est inaccessible. Cette désunion, nous la partageons tous : c’est ce péché
fondamental qui fait que nous ne faisons pas le bien que nous aimerions faire,
et que nous faisons le mal que nous ne voudrions pas faire. Il y a comme un mur
ou plutôt un rideau entre Dieu et nous, qui nous sépare et qui est gardé par
les anges.
La volonté de Dieu est que nous revenions à
lui pour retrouver sa communion d’amour. Mais il nous est impossible de faire
le chemin du retour par nos propres forces. Seul Dieu peut par sa grâce faire
en sorte que nous arrivions à franchir le rideau pour le retrouver. C’est ce
qu’il fait par l’incarnation, la mort et la résurrection de Jésus : Dieu
se fait homme pour que nous les hommes nous puissions accéder à Dieu. Lorsque
Jésus franchit le rideau, de l’Annonciation à Noël dans un sens, puis de Pâques
à l’Ascension dans l’autre sens, vous aurez remarqué, dans les Evangiles, la
présence des anges.
Vous vous souvenez que, lorsque Jésus meurt
sur la croix, le rideau du Temple de Jérusalem se déchire en deux. Ce rideau
marquait la séparation entre les hommes et Dieu. Aussi bien, depuis que Jésus
est mort et ressuscité le rideau est déchiré et l’accès au ciel nous est
redevenu possible. C’est la raison pour laquelle saint Etienne disait avant de
mourir « Je vois les cieux ouverts
et le Fils de l'homme debout à la droite de Dieu » et saint Jean a pu nous
rapporter, dans l’Apocalypse, sa vision de la Jérusalem céleste.
Ainsi donc, par la mort et la résurrection de
Jésus, nous avons accès, nous les hommes, à la communion d’amour de notre Dieu.
Et désormais, par cette déchirure dans le rideau, passe dans le monde la
lumière de la grâce de Dieu. Cette lumière c’est le don de l’Esprit Saint,
rendu visible à la Pentecôte, qui est offert en permanence au monde dans
l’Eglise.
Dans cette lumière, en effet, il y a les
sacrements qui bâtissent l’Eglise. C’est pourquoi d’une part, Jésus
dit qu’après avoir été glorifié, ses disciples devront et pourront avec sa
grâce garder le commandement nouveau de l’amour. L’Eglise est elle-même la
communion d’amour de Dieu qu’elle reçoit à travers la déchirure du rideau et
dont elle vit. Et c’est pourquoi d’autre part, Paul et Barnabé peuvent après
avoir eux-mêmes reçu l’imposition des mains à Antioche, imposer à leur tour les
mains à des Anciens qui sont rendus de cette façon évêques des Eglises de
Lystre, Iconium et Antioche de Pisidie. L’imposition des mains est le signe de
la grâce de Dieu qui passe par la déchirure du rideau, l’amour de Dieu qui se
répand dans le monde et qui bâtit l’Eglise, la Jérusalem nouvelle, le corps du
Christ.
Il me reste une dernière chose à expliquer.
J’ai parlé du Temple de Jérusalem tout à l’heure, et de son rideau. Il a été
donné à Moïse, par la grâce de Dieu, au mont Sinaï, de voir au-delà du rideau
et de comprendre le mystère de l’amour de Dieu. Et Dieu lui a demandé
d’organiser son culte à partir de ce qu’il avait vu dans sa vision.
C’est ainsi que Moïse a bâti la Tente de la
Rencontre qui est devenu le Temple de Jérusalem. Dans ce Temple, il a organisé l’espace
en deux pièces séparées par un rideau : le « Saint » et le « Saint
des Saints ». Dans le Saint, il y avait le chandelier à sept branches rappelant
le buisson ardent, l’autel de l’encens qui signifie les prières qui montent
vers Dieu et la table des offrandes où se trouvaient douze pains symbolisant
les douze tribus d’Israël. Dans le Saint des Saints se trouvait initialement l’Arche
d’Alliance protégée par des chérubins, sur laquelle reposait la Présence de
Dieu.
Le culte de Dieu était très simple : il
fallait d’abord que le grand prêtre se purifie au moyen d’offrandes, de sacrifices
et d’ablutions pour entrer dans le Saint, puis exceptionnellement, une fois par
an, il passait le rideau et entrait dans le Saint des Saints où, avec le sang
d’un bélier, il aspergeait l’Arche. Il revenait ensuite hors du Temple pour
asperger le peuple par le même sang. Et c’est ainsi que le peuple était
pardonné de ses péchés et que l’alliance entre Dieu et lui était confirmée.
Maintenant vous comprenez que ce culte du
Temple était la prophétie du vrai culte réalisé par Jésus : c’est Jésus le
vrai Grand Prêtre qui passe le rideau et c’est aussi lui le bélier qui par son
sang – par sa grâce – nous communique le pardon définitif du péché d’Adam et nous
établit dans l’alliance nouvelle et éternelle. Lorsque le Grand Prêtre entrait
dans le Saint des Saints, c’était déjà une image de Pâques et de l’Ascension,
et lorsqu’il en sortait pour asperger le peuple et le bénir, c’était déjà une
image de la Pentecôte.
Ce mouvement d’offrande et de bénédiction,
c’est exactement ce que nous vivons lors de l’eucharistie où le pain et le vin
deviennent le corps et le sang de Jésus qui est d’abord offert au Père, et qui ensuite
nous est donné en communion.
Il y a une unité totale entre la communion
d’amour que Jésus nous offre, la bénédiction par l’imposition des mains qui
fait les évêques, et les sacrements, à commencer par celui de l’eucharistie que
nous célébrons aujourd’hui. Tout cela grâce au sacrifice de Jésus sur la croix,
par lequel le rideau qui séparait la terre et le ciel a été déchiré et la
communion entre les hommes et Dieu, et entre eux, a été rétablie pour toujours.
Amen, Alléluia !