Ac
13,14.43-52 ; Ps 99 ; Ap 7,9.14b-17 ; Jn 10,27-30
Chers
frères et sœurs,
Etre chrétien aujourd’hui n’est pas plus
compliqué qu’hier. On le voit bien dans l’épisode que nous raconte saint Luc de
la prédication de Paul et Barnabé à Antioche de Pisidie.
Paul et Barnabé sont venus annoncer
l’Evangile d’abord aux juifs, ensuite aux païens. Au début, tout semble aller
pour le mieux puisque presque toute la ville est rassemblée pour les écouter.
Mais ensuite l’opposition se forme, les autorités s’en mêlent, et les apôtres
sont obligés de partir. Ils laissent alors, dans cette ville, une petite
communauté de nouveaux chrétiens qui doit très certainement se faire assez
discrète, mais qui n’en est pas moins profondément joyeuse d’avoir reçu
l’Evangile.
Cette histoire appelle au moins deux
remarques :
La première est que le moteur de
l’évangélisation est la foi, dont les signes sont l’assurance et la joie. Ils
n’ont pas peur de parler, Paul et Barnabé ! Ils n’ont pas peur d’annoncer le
Christ ressuscité ! Cette assurance de leur part est d’autant plus
déterminante que, parmi leurs auditeurs, il y a des gens assoiffés qui
attendent l’Evangile, comme une terre sèche attend la pluie. Ainsi, c’est une
grande joie qui monte dans le cœur de certains quand ils entendent la Bonne
Nouvelle, car elle est la libération qu’ils attendaient, qu’ils recherchaient
obscurément.
Nous devons être conscients, nous chrétiens,
que nous sommes porteurs d’une vie extraordinaire qui nous dépasse, à laquelle
aspirent de toutes leurs forces des gens qui, aujourd’hui, ont le sentiment de
vivre une vie sans but ou enfermée, ou qui sont en danger.
La seconde remarque concerne l’opposition des
notables. Des notables, il y en a toujours eu, il y en aujourd’hui et il y en
aura toujours. Ce sont les responsables et les premiers bénéficiaires du
système politique, médiatique et religieux en place dans toute société. L’Evangile
les dérange parce qu’il introduit une espérance, une force critique qui
déstabilise leur pouvoir : le règne de Dieu n’est pas de ce monde, et donc,
tous les pouvoirs de ce monde sont soumis à l’épreuve critique du règne de Dieu,
qui leur est supérieur. D’un simple point de vue humain, les notables ont
raison d’expulser Paul et Barnabé : parce qu’ils perturbent l’équilibre de
la cité dont ils sont les responsables et les maîtres. Car justement, par
l’Evangile, les Apôtres libèrent les gens de leur soumission, de leurs divers asservissements.
Nous devons être conscients, nous chrétiens,
que l’Evangile dont nous sommes porteurs, constitue un danger pour les pouvoirs
de ce monde : parce qu’il est une force critique des systèmes inhumains,
et en même temps une puissance libératrice pour les esprits et les cœurs.
Jésus nous le dit dans l’Evangile de ce
jour : « Mes brebis écoutent ma
voix ; moi, je les connais et elles me suivent. Je leur donne la vie
éternelle ». L’Evangile que nous proclamons par nos paroles et nos actes,
c’est la voix de Jésus. Toutes les personnes que l’Esprit Saint travaille en
leur cœur et qui entendent cette voix doivent pouvoir reconnaître à travers
elle Jésus. Alors Jésus les « connait ».
Dans le langage de saint Jean, cela veut dire que Jésus vient habiter en elles,
et les fait habiter en lui : Jésus entre en communion avec elles. C’est
pourquoi, d’une part il est impossible que ces personnes, ces brebis, ne se
mettent pas à vouloir demeurer sans cesse avec Jésus ; et d’autre part,
que Jésus ressuscité ne leur assure pas dès maintenant la vie éternelle.
Chers frères et sœurs, nous sommes, nous les
chrétiens, la voix de Jésus dans notre monde. Si nous nous taisons, si nous
n’agissons pas au nom du Christ, nous étouffons la voix du Christ !
Mais alors, quel est cet Evangile que nous
devons annoncer ? Il est tout simple : par sa Résurrection, Jésus a
ré-ouvert le ciel aux hommes, l’accès au Paradis qui était fermé depuis la
chute d’Adam et Eve. C’est ce que voit saint Jean dans sa vision. Dans le
langage du culte du Temple de Jérusalem, qui est le sien, il nous dit que le
grand enfermement dans lequel nous sommes actuellement : limites personnelles,
physiques, morales, intellectuelles ; limites familiales et
communautaires ; limites temporelles et spatiales : tout cela explose
et se régénère nouvellement avec la résurrection de Jésus.
Si nous acceptons d’entrer dans notre baptême
et de « blanchir nos robes par le
sang de l’agneau », comme dit Saint Jean, alors, à partir des petits germes
d’amour, de vérité, de beauté, et de bonté, qui se trouvent en nous et que nous
cultivons par la grâce de l’Esprit Saint, Jésus nous régénère, en hommes
nouveaux dans son monde à lui ; monde nouveau qui est en même temps le
lieu de notre plus grand bonheur et de notre plus grande joie, et la participation
à la communion des saints.
Jésus est le bon berger qui conduit ses
brebis aux sources des eaux de la vie. Et, comme dit saint Jean « il essuiera toute larme de leurs yeux ».
L’Evangile que nous annonçons, chers frères
et sœurs, n’est pas à proprement parler un message, il est d’abord une vie, un
style de vie, une vie partagée avec Jésus, qui prend sa source dans sa vie
éternelle et qui nous est donnée par l’Esprit Saint. C’est lui qui nous donne
l’assurance et la joie, la force d’annoncer l’Evangile qui bouscule les
puissances de ce monde et libère les prisonniers, et qui nous donne le bonheur
de nous savoir pour toujours, portés dans la main de notre Père des cieux.
« Seigneur
Jésus, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle ».
Amen.