lundi 7 avril 2025

06 avril 2025 - PESMES - 5ème dimanche de carême - Année C

Is 43, 16-21 ; Ps 125 ; Ph 3, 8-14 ; Jn 8, 1-11
 
Chers frères et sœurs,
 
Le passage de l’évangile que nous venons d’entendre a une histoire compliquée. Nous le lisons dans l’évangile de Jean, alors qu’il y a peu de doutes qu’il se trouvait originellement dans celui de Luc. On y retrouve en effet beaucoup des expressions de ce dernier, que n’emploie pas Jean. En soit, cela a peu d’importance, mais en fait, c’est presque une clé de lecture. Je vais essayer d’ouvrir la porte pour vous.
 
Les lectures de ce jour ont été choisies pour nous inciter à interpréter l’Évangile, et donc le jugement de Jésus, comme une dévalorisation de la Loi de Moïse pour magnifier la « Loi nouvelle » de l’Évangile : celle de la miséricorde. Ainsi nous lisons en Isaïe : « Voici que je fais toute chose nouvelle » et en saint Paul : « non pas de la justice venant de la Loi de Moïse, mais de celle qui vient de la foi au Christ. » Certes, Jésus apporte du nouveau, mais certainement pas en invalidant la Loi de Moïse, dont il est lui-même le Maître. Car, dans notre cas, c’est bien par la Loi de Moïse qu’il va sauver la femme pécheresse. D’ailleurs, à la fin, personne chez les Juifs, qu’ils soient prêtres, scribes ou pharisiens, ne va s’opposer à son jugement. Comment a-t-il donc fait ?
 
Commençons par l’exposé du problème, en deux points. L’Évangile est très précis. Premier point : la femme adultère est présentée à Jésus, qui se trouve dans le Temple. Le cadre général est donc celui de la « loi de la jalousie » qui se trouve au livre des Nombres, où l’on fait subir à une femme soupçonnée d’adultère une ordalie. La femme doit être présentée au prêtre qui se trouve dans le Temple, lequel mélange de la poussière du sol du Temple avec de l’eau sainte pour en faire de l’eau amère. Il inscrit ensuite sur un papier la sentence de la condamnation, puis il le lave avec l’eau amère, et fait boire cette eau, chargée de la sentence, à la femme. Si elle dépérit, elle est coupable ; si elle reste en bonne santé, elle est innocente.
On voit tout de suite que les scribes et les pharisiens qui ont amené la femme adultère à Jésus lui posent un problème ambigu, car si ils avaient respecté la loi du Lévitique sur les femmes adultères, cette la femme de l’évangile aurait été mise à mort immédiatement, sans qu’on ait recours à la loi de la jalousie. Si donc s’ils s’engagent dans cette procédure, c’est qu’ils ont un doute. Sur le fond, ils ne cherchent pas à mettre à mort cette femme, mais ils veulent éprouver Jésus. C’est le véritable objectif.
Et ils vont être, en effet, particulièrement abjects avec lui. Car, précisent-ils : « Moïse nous a ordonné de lapider ces femmes-là. » C’est le second point. Ces « femmes-là », ce ne sont pas toutes les femmes adultères, mais très expressément les jeunes filles ou femmes vierges. Il n’y a que pour ces « femmes-là » que la mise à mort doit se faire par lapidation. Vous avez bien compris l’insulte et le piège qui a été tendu à Jésus : selon la Loi, il doit condamner lui-même une jeune fille vierge dont on soupçonne qu’elle a commis un adultère. Et comme celui-ci est avéré, la sentence est théoriquement mécanique. Voilà pour le piège. Or, tout le monde à Jérusalem a compris que le cas de la pauvre femme qui se trouve devant Jésus correspond parfaitement aux ragots colportés partout de la naissance de Jésus d’une jeune fille vierge promise en mariage à un homme du nom de Joseph, dont elle a eu un enfant avant qu’ils aient habité ensemble… donc forcément, selon eux, par adultère. Voilà pour l’insulte.
Jésus va-t-il condamner sa mère ? Et par conséquent, va-t-il aussi se condamner lui-même avec elle ?
 
Jésus revient à la loi de la jalousie, et il écrit sur le sol, le sol du Temple. Il prononce la sentence – qui confirme la loi de la mise à mort par lapidation pour adultère d’une jeune fille vierge : « Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre. » La femme boit l’eau amère de la parole de Jésus : soit quelqu’un lui jette une pierre et elle est coupable : elle meurt ; soit personne ne lui jette de pierre et elle est jugée innocente : elle vit. Mais Jésus a ajouté : « Celui d’entre vous qui est sans péché… » Par ces mots, il a rendu impraticable la sentence, car aucun homme n’est sans péché. Sur terre, il n’y en a que deux qui sont sans péchés : lui-même, Jésus, et la Vierge Marie, sa mère. Marie condamnerait-elle sa sœur, une femme qui lui ressemble tellement par l’accusation que ces hommes portent contre elle ? Certainement pas. Il reste donc Jésus…
Avez-vous remarqué, chers frères et sœurs, que les scribes et les pharisiens appellent Jésus « maître », et que la femme l’appelle « Seigneur » ? Ils n’ont voulu voir en lui qu’un homme comme eux. Mais elle, elle a vu qu’il était son Dieu. Et c’est pourquoi, ayant confessé sa foi en lui, il ne l’a pas condamnée. Il s’est souvenu de ce que par l’Esprit Saint il avait dit par le prophète Ézéchiel : « Prendrais-je donc plaisir à la mort du méchant – oracle du Seigneur Dieu –, et non pas plutôt à ce qu’il se détourne de sa conduite et qu’il vive ? » C’est pourquoi à la femme, il ajoute : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus. »
 
Voilà chers frères et sœurs, ce qui s’est passé ce matin-là dans le Temple de Jérusalem, où Dieu a innocenté une jeune fille vierge, accusée de péché par des hommes. Comment, nous autres qui sommes pécheurs de bien des manières, ne nous réjouirions-nous pas de nous savoir un tel juge, si miséricordieux, pourvu que nous ayons foi en lui, et en l’intercession de notre bienheureuse et toute sainte Vierge Marie.

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