Mc 11, 1-10
Chers
frères et sœurs,
Quand
nous entrons en procession dans l’église, que nous remontons l’allée centrale
jusqu’à l’autel nous revivons la montée de Jésus à Jérusalem, en nous souvenant
que cette montée avait deux significations.
La
première est un rappel des temps anciens où les rois d’Israël étaient oints par
de l’huile sainte avant de monter à Jérusalem assis sur un petit âne. Au temps
de Jésus, ce rituel du couronnement n’avait pas été célébré depuis très
longtemps. Un peu comme si aujourd’hui quelqu’un se faisait sacrer roi à la
cathédrale de Reims. Jésus a enthousiasmé les foules, qui voyaient en lui l’homme
providentiel, le vrai roi d’Israël, tant espéré et tant attendu. Mais il a
aussi alarmé les pouvoirs politiques et religieux, qui finalement ont décidé de
le tuer. Il devenait trop dangereux.
La
seconde signification est une annonce de l’avenir, où selon la prophétie du
prophète Daniel, le Fils de l’Homme montera dans les cieux acclamé par les
anges après avoir vaincu les démons, pour s’asseoir sur son trône à la droite
du Père. En montant à Jérusalem, acclamé par les foules, et après avoir en
avoir chassé les marchands à coups de cordes, Jésus va entrer dans le Temple de
Dieu, son Père. Jésus indique ainsi que le Fils de l’Homme dont il était
question dans la prophétie, c’est lui. Mais sa véritable montée dans les cieux
pour s’asseoir à la droite du Père, c’est à l’Ascension.
Jésus
est donc le vrai roi d’Israël, le Bon Berger du peuple de Dieu, et il est aussi
le Fils de l’Homme qui va s’asseoir à la droite du Père, c’est-à-dire le vrai
Messie, le vrai Sauveur, celui qui enlève les péchés du monde.
Et
nous, voilà qui nous sommes, avec nos rameaux : les acclamateurs du roi
d’Israël qui monte à Jérusalem et du Fils de l’Homme qui monte dans les cieux. Avec
les saints et tous les anges, acclamons avec joie Jésus, notre roi et notre
Dieu !
Is 50, 4-7 ; Ps
22 ; Ph 2, 6-11 ; Mc 14, 1 – 15, 47
Chers
frères et sœurs,
À
partir de Gethsémani, l’histoire de Jésus est laissée aux mains du Mauvais et
tout s’inverse jusqu’à la Résurrection.
Ainsi,
les Apôtres qui avaient juré de ne pas renier Jésus ne sont pas capables de
veiller une heure – bientôt ils vont s’enfuir en courant ; Judas trahit et
livre Jésus… avec un baiser ; les Grands Prêtres jugent avec mépris l’homme
Jésus et le condamnent, ne se rendant pas compte qu’ils passent eux-mêmes à ce
moment même au tribunal de Dieu, et ils sont pardonnés ; Pierre qui avait
osé tirer son épée contre le serviteur du Grand Prêtre au beau milieu d’une
troupe en armes, maintenant a peur d’une petite servante désarmée ; Pilate,
l’occupant romain, qui aurait dû être le plus intraitable contre Jésus, cherche
à défendre sa vie contre les Grands Prêtres – ses compatriotes – qui veulent sa
mort ; la foule qui avait acclamé Jésus comme roi, maintenant réclame sa
mort sur une croix ; Jésus qui aurait dû être honoré comme vrai Roi de l’univers,
est moqué, insulté et frappé comme un misérable ; Lui qui est le Fils de
l’Homme, au moment de son élévation vers le Ciel pour être glorifié par les
anges et les archanges, est élevé sur une croix et humilié par les insultes des
passants et des Grands Prêtres ; à midi, au moment où le soleil est le
plus éclatant, l’obscurité se fit sur
toute la terre ; Jésus qui avait dit qu’il ne boirait du vin qu’à
l’avènement de son Règne éternel, se voit offrir du vinaigre au moment de son
agonie ; et le centurion – un païen étranger à Israël – est le premier à
confesser l’espérance d’Israël, la foi de l’Église : « Vraiment,
cet homme était le Fils de Dieu ! »
Tout
est à l’envers. Tout est en ombres chinoises. Le blanc est devenu noir… mais
aussi le noir est devenu blanc.
Car
nous voyons là l’œuvre du Seigneur : Dieu s’est fait homme ; il s’est
abaissé au plus bas de l’humanité jusqu’à être traité comme un paria, alors
qu’il est innocent. Il s’est laissé conduire jusqu’à la mort ; il est
descendu au séjour des morts. Mais pour libérer l’homme, en remonter l’homme,
les hommes pécheurs, tous les hommes, jusqu’à les élever dans sa gloire, la
gloire de Dieu, par la puissance de sa résurrection.
Souvenons-nous
frères et sœurs : quand nous sommes les jouets du Mauvais et que nous
sommes accusés et traités injustement, alors nous sommes comme Jésus, avec lui
en sa Passion. En remettant à l’endroit ce qui apparaît à l’envers, par la foi,
alors nous savons que toute injure sur terre deviendra une acclamation au ciel ;
un coup sera effacé par une caresse ; des loups furieux seront remplacés
par des anges ; une mort misérable ouvrira à une résurrection glorieuse. Car
les premiers dans ce monde deviendront les derniers dans les cieux ; et
les derniers en ce monde, par la foi, deviendront les premiers dans les cieux.
Voilà
la grande leçon de Jésus en sa Passion. On y voit le Dieu innocent passer au
tribunal des hommes qui le condamnent à mort ? Mais en réalité, ce qu’il
faut vraiment voir, c’est l’inverse : la Passion de Jésus est l’heure du
jugement de l’humanité où Dieu, prenant sur lui-même tous ses péchés, lui fait
grâce, et lui accorde la vie éternelle.
Tel
est le Dieu annoncé et attendu par les Juifs ; tel est le Dieu des
chrétiens ; il n’y en a pas d’autre.