Ac
1,12-14 ; Ps 26 ; 1P 4,13-16 ; Jn 17,1b-11a
Chers
frères et sœurs,
Dans
son évangile, saint Jean nous donne accès à la prière de Jésus, à son rapport
intime avec Dieu son Père et notre Père.
D’un
point de vue liturgique, nous sommes entre l’Ascension et la Pentecôte, temps
durant lequel Jésus monte de la terre au ciel, de ce monde à son Père, pour
accomplir la prophétie de Daniel du Fils de l’Homme qui va s’asseoir à la
droite de Dieu, et, dans un acte sacerdotal, lui présenter en offrande son
humanité, notre humanité, pour en obtenir de lui, par grâce, la pleine
régénération.
Or
l’extrait du chapitre 17 de l’évangile de Jean que nous avons lu rapporte la
prière que Jésus a faite à son Père au moment de la Cène, avant sa Passion. Il
y a donc un décalage chronologique. Pour autant l’Église ne se trompe pas en
nous faisant écouter cette prière aujourd’hui.
D’une
part parce qu’il est reçu traditionnellement que cette grande prière de Jésus a
été enseignée aux Apôtres durant le temps des Apparitions, durant les quarante
jours après Pâques, et qu’il s’agit bien d’une prière de Jésus liée à son
Ascension au ciel. Saint Jean l’a placée au moment de la Cène, car déjà la
Passion et la Croix pour le pardon des péchés annoncent l’Ascension et
l’offrande de Jésus faite à son Père à l’autel céleste, pour l’obtention du don
de l’Esprit Saint.
Et
d’autre part, cette prière de Jésus est une prière éternelle : elle fait
partie de l’échange permanent, de la vie, qui est au sein de la Trinité :
Jésus ne cesse jamais de dire à son Père : « Moi, je prie pour eux »,
pour que sans cesse nous recevions la Vie éternelle – l’Esprit Saint – et que
par lui nous connaissions Dieu notre Père. Jésus ne cesse jamais de prier pour
nous.
Pendant
que Jésus monte vers son Père, lui présentant en offrande notre humanité, avec
sa prière intense pour que nous recevions de lui la grâce de l’Esprit Saint,
les Apôtres sont en prière au cénacle. Saint Luc nous dit qu’ils étaient
« tous, d’un même cœur, assidus à la prière, avec des femmes, avec
Marie la mère de Jésus et avec ses frères ». En fait, c’est toute
l’Église qui est en prière, attendant elle aussi avec espérance l’aboutissement
de l’offrande de Jésus : la réception du don de l’Esprit Saint.
Par
bonheur cette offrande de Jésus, présentée avec sa prière et celle de l’Église,
sera reçue par le Père : et la preuve, c’est que l’Esprit Saint sera bien
répandu sur cette Église au jour de la Pentecôte.
Maintenant,
chers frères et sœurs, réfléchissez bien. Ce que je viens de dire de ce qu’il
se passe entre l’Ascension et la Pentecôte, d’un point de vue temporel, ou en
permanence d’un point de vue atemporel, c’est-à-dire la prière de Jésus et
celle de l’Église qui accompagne son offrande de l’humanité pour l’obtention de
la vie éternelle, tout cela se passe aussi à chaque messe.
N’est-ce
pas que le prêtre, représentant Jésus, monté à l’autel, prie le Père d’agréer
les offrandes du Corps et du Sang de Jésus pour que l’assemblée puisse les
recevoir, avec la Paix qui vient de Dieu, en communion ? N’est-ce pas que,
pendant que le prêtre semble seul à l’autel, comme Jésus devant l’autel qui est
dans le ciel, l’assemblée sainte, toute l’Église, est en prière pour que cette
offrande soit agréée par Dieu notre Père ?
En
fait, nous reproduisons à notre mesure, ici à Charcenne, aujourd’hui, le
mystère de l’offrande de Jésus entre l’Ascension et la Pentecôte, et le mystère
éternel du Fils qui se donne par amour au Père, recevant de lui – et nous, par
lui, avec lui et en lui – la Vie éternelle, le don de l’Esprit Saint, la
communion.
Chers
frères et sœurs, la messe n’est pas la représentation théâtralisée du repas
pascal de Jésus, mais elle est un sacrement : elle est la participation
réelle, aujourd’hui, de l’assemblée sainte des baptisés au mystère éternel de
l’amour de Dieu. Par sa prière Jésus nous y fait entrer et, par le don de
l’Esprit Saint, le Père nous en fait bénéficier et nous le fait connaître. La
vie chrétienne, dont la messe est la source et le sommet, c’est la communion de
l’humanité à l’amour de Dieu. Aucune religion sur la terre ne permet d’aller
aussi loin : Dieu s’est fait homme pour que l’homme demeure en Dieu, dans
son amour, dans sa communion, éternellement.