vendredi 14 octobre 2022

08-09 octobre 2022 - CHEVIGNEY - VELLEXON - 28ème dimanche TO - Année C

2R 5,14-17 ; Ps 97 ; 2Tm 2,8-13 ; Lc 17,11-19
 
Chers frères et sœurs,
 
Comme d’habitude chez saint Luc, il s’agit de comprendre, à la lumière des Écritures, un événement réel qui vient de se passer : ici la guérison d’un groupe de lépreux, avec un Samaritain qui revient sur ses pas pour glorifier Jésus, ce qui n’était probablement pas prévu. En effet, Jésus venait pour les brebis perdues d’Israël, et personne ne s’attendait à ce que des Samaritains, des Cananéennes, des centurions romains et autres étrangers fassent preuve d’une foi plus profonde, plus fructueuse. Du coup, dans son Évangile, saint Luc donne des clés de lecture, pour comprendre ce qu’il s’est passé.
 
Première observation, Jésus voyage en passant par une région non identifiée, qui se situe aux confins de la Samarie et de la Galilée : il est au bout du monde, dans un lieu perdu. Et à ce point perdu, que des lépreux ont pu s’y installer. En réalité, le village est un village de lépreux. Le nombre dix est une manière habituelle de désigner un grand nombre. Jésus passe donc par un endroit perdu, où habitent des parias, exclus de toute civilisation, de toute vie.
Respectant l’interdit, les lépreux n’approchent pas de Jésus, mais ils crient vers lui, en employant les paroles du psaume 50 : « Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour, selon ta grande miséricorde, efface mon péché. Lave-moi tout entier de ma faute, purifie-moi de mon offense. » Ils appellent Jésus « Jésus-Maître », c’est-à-dire qu’ils reconnaissent en lui le pouvoir de les guérir, qui peut être un simple pouvoir de médecin. Et Jésus les renvoie à l’observance de la Loi : « Allez vous montrer aux prêtres », selon les prescriptions du livre du Lévitique. Les lépreux observent la parole de Jésus et la Loi de Moïse, et par leur mise en pratique, par cette foi, ils sont purifiés. C’est ainsi que Naaman le Syrien a obéi à Élisée, en allant se baigner dans le Jourdain, et il a été purifié.
 
Mais voilà qu’un Samaritain, un étranger du point de vue des Juifs, comme Naaman, revient pour remercier, pour rendre grâce à Dieu, en créant une forme d’embarras. Élisée est embarrassé par les cadeaux de Naaman, Jésus est embarrassé qu’un Samaritain – et non pas les autres – vienne le glorifier comme Dieu. D’où sa question : « Les neufs autres, où sont-ils ? » Comme en mathématiques, la réponse est dans la question. Les autres se sont « mis à part », alors qu’ils auraient dû être là, avec Jésus et ses disciples, et le Samaritain. Or ceux qui se « mettent à part », par définition ce sont les pharisiens. Ainsi donc, on voit que la visite de Jésus, qui vient pour guérir et pardonner, ne suscite pas toujours, et même dans la plupart des cas (90% !) aucune gratitude, et il n’est ni reconnu ni glorifié comme Dieu, notamment ici par ceux qui s’attachent à la Loi de Moïse, mais n’ont pas su reconnaître celui qui en est le Maître.
 
On aurait pu avoir le cas où sur les dix lépreux un revienne glorifier Jésus sans qu’il soit pour autant un Samaritain. Mais c’est un Samaritain. Non seulement il était lépreux, mais en plus il est Samaritain : Jésus le traite d’étranger. Il cumule donc tous les défauts de la terre : c’est un paria entre les parias. Mais par sa foi il va être sauvé. Les autres sont guéris, lui il est guéri et sauvé. Qu’est-ce que cela veut dire ?
Ici il faut être prudent et ne pas tomber dans le piège qui consiste à croire que seul le Samaritain est sauvé parce qu’il a reconnu Jésus comme Dieu, tandis que les autres – qui ne font qu’obéir à la Loi de Moïse – ne le seraient pas et, par conséquent, qu’ils seraient finalement condamnés. Saint Luc ne dit pas cela.
Il applique cette parole de Jésus : « Il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion ». Il faut comprendre que le Samaritain, lui qui était étranger au Peuple de Dieu, avait besoin, en plus de sa guérison, d’être sauvé, c’est-à-dire réconcilié et intégré à la communion des saints. Tandis que les autres, du fait de leur appartenance au Peuple de Dieu n’avait pas à être sauvés, quoique Jésus s’étonne quand même de leur manque de gratitude. Ainsi, parce qu’il a fait ce que les autres auraient dû faire les premiers, le Samaritain a-t-il obtenu la grâce du Salut.
On objectera : « mais il a désobéi à Jésus et il n’a pas respecté la Loi de Moïse, puisqu’il n’est pas allé voir les prêtres ! » Et certains d’en profiter pour crier partout que la Loi de Moïse et les prêtres sont inutiles puisqu’on peut s’en passer en glorifiant directement Jésus ! Mais, en voyant qu’il était guéri, le Samaritain a vu également que le prêtre véritable qui guérit, qui pardonne et qui sauve, c’est Jésus lui-même. Ainsi, en réalité, il a bien obéi à Jésus et accompli la Loi. Saint Luc montre ici sans le dire que Jésus est le seul vrai Grand Prêtre, tous les autres n’agissant qu’à son image ou en son nom.
 
Pour finir, ce qui est important et qu’il faut faire savoir autour de nous, c’est que nul homme sur la terre, qui soit exilé ou perdu jusqu’au bout du monde, en raison de ses fautes ou de ses faiblesses, n’est exclu de l’amour de Dieu qui pardonne et qui guérit, pourvu qu’il accepte d’écouter sa Parole et de la mettre en pratique. Et nul homme étranger au Peuple de Dieu – dès lors qu’il reconnaît Jésus comme Dieu et le glorifie comme il se doit – n’est exclu de la Terre promise, du Royaume des cieux. Il est comme Naaman et le Samaritain, baptisés dans leur conversion et relevés par Jésus, c’est-à-dire ressuscités avec lui pour la vie éternelle. 

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