lundi 10 janvier 2022

09 janvier 2022 - GRAY - Baptême du Seigneur - Année C

Is 40,1-5.9-11 ; Ps 103 ; Ti 2,11-14 ; 3,4-7 ; Lc 3,15-16.21-22
 
Chers frères et sœurs,
 
À l’époque de Jésus, le peuple d’Israël est en attente d’un Messie qui le sauvera, non seulement de la tutelle romaine, mais aussi de sa déchéance spirituelle et morale. On le voit bien : la société est traversée par de puissants courants religieux restaurateurs : les Esséniens de Qumran qui se sont mis en retrait de manière sectaire, les Pharisiens qui prônent la conversion morale ; les Sadducéens sont attachés à la pureté du culte, et les Zélotes des activistes politiques et violents. Tous attendent, d’une manière ou d’une autre le Messie, en grec le « Christ », c’est-à-dire celui qui a reçu l’onction du Seigneur, comme prêtre, prophète et roi. Dans ce contexte, la prédication de Jean Baptiste d’un baptême de conversion en prévision du Règne de Dieu qui vient, suscite évidemment un grand intérêt et beaucoup de questions. Et ce Messie tant attendu, ne serait-il pas le Baptiste lui-même ?
 
La réponse de Jean est sans équivoque : il n’est pas le Messie mais il est celui qui lui prépare le chemin. Il est comme le prophète Elie qui annonce au peuple la venue imminente du Messie. Il est aussi le prêtre qui par le baptême dans le Jourdain purifie le peuple de ses péchés et le sanctifie pour l’année sainte du grand Jubilé où toute justice sera rendue et la paix accordée, notamment par la venue de ce Messie. Mais Jean-Baptiste est encore le prêtre qui, en baptisant Jésus – le Seigneur profitant de ce baptême pour en manifester la consécration – révèle au peuple qui est le Messie attendu. Jean baptisait humainement dans l’eau, mais l’onction divine a été accordée par Dieu lui-même sous la forme de la colombe, et confirmée par la voix venant du ciel. Cette capacité sacerdotale particulière de Jean-Baptiste doit être encore davantage soulignée, car elle révèle également l’identité et la mission véritable de Jésus.
 
Nous le savons, Jésus, de par sa reconnaissance par Joseph était de lignée royale. Mais, pour prendre possession de sa royauté, il lui fallait être oint par le Grand prêtre avant de monter en triomphe, assis sur un âne, à Jérusalem. Or, lors du baptême de Jésus par Jean, lorsque l’Esprit Saint descend sous la forme de la colombe et vient reposer sur le corps de Jésus, il se passe visiblement ce qu’il se passe invisiblement lorsque, le Grand Prêtre accomplissant les rites prescrits, la Présence du Seigneur descend dans son Temple et vient reposer sur l’Arche d’Alliance. L’humanité de Jésus est ainsi le Temple de sa divinité. Et cela est rendu visible par le rite baptismal effectué par Jean comme prêtre. Faut-il donc comprendre que Jean-Baptiste appartenait à une famille de Grand prêtres légitimes, écartée du sacerdoce par les prêtres illégitimes – Anne et Caïphe – installés par les Romains ?
 
La question a une certaine importance, car il fallait que Jésus soit aussi lui-même prêtre pour être le Messie. Cette consécration lui est reconnue par Jean-Baptiste lui-même qui déclare ne pas être digne de délier la courroie de ses sandales – ce qu’il fallait faire au Grand prêtre pour qu’il puisse entrer dans le Saint des Saints du Temple afin d’accomplir une fois par an le sacrifice du Grand Pardon. Justement, cette liturgie du Grand Pardon est également signifiée à Jésus par la voix du Seigneur lui-même : « Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi je trouve ma joie ». Comme Isaac était le fils chéri d’Abraham, fils unique qui devait être offert en sacrifice, et qui fut remplacé par un bélier, de même Jésus est le Fils bien aimé du Père, véritable agneau pascal offert en sacrifice sur la croix pour le véritable grand pardon des péchés. « Grand prêtre et offrande », nous retrouvons les deux dénominations attachées à Jésus dans la Lettre aux Hébreux. Cette lecture qui consiste à voir dans le baptême de Jésus sa consécration sacerdotale est parfaitement traditionnelle : saint Éphrem affirmait ainsi sans détour : « Jésus reçut le sacerdoce de la maison de Lévi par la seconde naissance que lui conférait le baptême du fils d’Aaron » – c’est-à-dire Jean-Baptiste.
 
Jésus oint comme roi et prêtre, par Dieu, au moyen de Jean-Baptiste, il est aussi oint comme prophète comme cela est visiblement affirmé par la descente sur lui de la colombe. En réalité, prophète il l’est toujours en tant que Verbe de Dieu, Parole de Dieu, et parce qu’il ne fait qu’un avec le Père et le Saint-Esprit.
 
Finalement, en quoi toutes ces considérations sur le baptême de Jésus nous intéressent-elles ? Mais tout simplement parce que, lorsque nous sommes baptisés à notre tour, nous le sommes dans le même Esprit Saint qui fait de nous des prêtres, des prophètes et des rois en Jésus, comme fils et filles bien-aimés du Père. Ainsi donc, la mission de Jésus est aussi la nôtre : rendre grâce à Dieu par l’offrande de nous-même pour le salut du monde ; annoncer le règne de Dieu qui vient, conformément aux Écritures ; et accomplir toute justice et toute paix autour de nous, dans l’Esprit Saint. Telle est la vocation des baptisés à la suite de Jésus, selon ce qui a été révélé et rendu visible aux hommes il y a plus de 2000 ans sur les bords du Jourdain.


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