Ex 17,8-13 ; Ps
120 ; 2Tm 3,14-4,2 ; Lc 18,1-8
Chers
frères et sœurs,
En
prenant un exemple de la vie quotidienne, Jésus nous enseigne que nous ne
devons pas nous décourager de prier, mais au contraire prier sans cesse jusqu’à
ce qu’il vienne. Et c’est cela « avoir la foi », c’est « prier
jusqu’à la venue de Jésus, pour obtenir sa justice ».
L’histoire
du combat contre les Amalécites montre bien que la prière est puissante et
qu’elle a un effet réel dans ce monde. Lorsque Moïse garde les bras levés, dans
une attitude de prière, Josué est plus fort que les Amalécites, c’est-à-dire
plus fort que les puissances du mal. La prière a pour effet de dominer le mal
et d’obtenir la justice.
Mais
l’histoire de Moïse montre bien aussi que la prière est une véritable épreuve,
durant laquelle on peut se décourager et tout perdre. Ainsi, quand Moïse baisse
les bras – c’est le cas de le dire – Josué est dominé par son adversaire et
risque de perdre la bataille. Lorsque Jésus dit : « Le Fils de
l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? »,
c’est comme si Josué se disait – au beau milieu du combat : « Moïse
tiendra-t-il le coup, sur la montagne ? »
Comment
tenir bon dans la prière jusqu’à ce que Dieu donne la victoire, ou que le juge
rende justice, ou que Jésus vienne nous donner sa paix ?
On
a vu que Moïse avait besoin d’être aidé par Aaron et Hour. On peut dire qu’il
avait besoin d’être soutenu par la pratique régulière de la prière du Temple et
par le désir vivant de la sagesse. On sait aussi que Moïse est monté sur la
montagne avec le bâton de Dieu, ce bâton avec lequel il avait frappé l’eau de
la Mer Rouge pour y faire passer le peuple poursuivi par les Égyptiens. Pour un
chrétien, ce bâton, c’est le bois de la croix, avec lequel Jésus a brisé les
portes de la mort pour libérer les hommes des puissances infernales et leur réouvrir
l’accès à la vie éternelle.
Ainsi
donc, le carburant de la prière, c’est la régularité de la pratique religieuse,
chez soi et à l’église, l’amour et la recherche de la vérité, et la mémoire de
la croix de Jésus, qui est mort et ressuscité pour que nous puissions entrer
dans la vie.
C’est
ce que dit aussi saint Paul à Timothée. Si tu veux être ferme pour proclamer la
Parole de Dieu à temps et à contretemps, tu trouveras des forces dans les
Saintes Écritures. En effet, les Écritures nous permettent d’alimenter notre
recherche de la vérité comme d’entretenir notre mémoire des actions de Dieu
pour nous. Avec nos traditions communautaires et individuelles de prière et
notre fréquentation des Écritures, nous avons ce qu’il faut pour durer dans la
prière jusqu’à ce que Jésus vienne.
Mais,
pour bien comprendre jusqu’au bout l’Évangile d’aujourd’hui, je voudrais
ajouter une chose. Jésus n’a pas choisi par hasard la figure d’une veuve pour
illustrer sa parabole. On pourrait dire : « il a choisi une veuve,
parce que personne ne pouvait prendre sa défense, parce qu’elle était âgée et
faible ». Oui, mais pas seulement. Parce qu’une veuve, pour Jésus, c’est
la figure de l’Église.
L’Église
est dans le monde comme une vieille femme fidèle, pauvre et fragile, qui attend
le jour de Dieu où elle retrouvera son époux, ses enfants s’ils sont partis
trop tôt, et toute sa famille, c’est-à-dire pour l’Église qui attend de
retrouver Jésus son époux, ses enfants qui sont les saints, et tous les anges
du ciel.
Comme
une veuve, l’Église est aussi dans le monde face à des puissants qui « ne
craignent pas Dieu et ne respectent pas les hommes ». Face à ceux qui
ne connaissent pas Dieu, et qui sont par conséquence sans humanité, elle ne
peut que crier, comme le faisaient aussi les prophètes, jusqu’à obtenir, à
défaut de la justice des hommes, celle de Dieu.
Nous
avons donc, chers frères et sœurs, avec les lectures d’aujourd’hui, une image
de ce que nous sommes en tant qu’Église – une fiancée ou une veuve qui attend
son époux avec l’impatience de l’amour – et de ce que nous avons à faire :
prier sans cesse jour et nuit pour demander justice, sans nous décourager mais
en trouvant des forces dans nos traditions de prière, dans la participation régulière
aux offices liturgiques, et dans la fréquentation des Écritures, pour y
chercher la lumière de la vérité et entretenir notre mémoire des actions de Dieu
dans notre histoire.
Et
par-dessus tout, en gardant bien serré dans notre main le Credo, c’est-à-dire le
bâton de bois, le bois de la croix de Jésus, par lequel nous passons de la mort
à la vie, comme au jour de notre baptême. Alors nous serons forts pour lutter
comme Josué contre les puissances du mal et comme Timothée pour proclamer
l’Évangile du Christ à temps et à contre-temps, dans un monde qui est d’autant
plus inhumain qu’il ne connaît pas Dieu.
Et
nous nous souviendrons aussi que le plus beau nom de la veuve dont parle Jésus,
c’est Marie.