Gn
15,5-12.17-18 ; Ps 26 ; Ph 3,17-4,1 ; Lc 9,28b-36
Chers
frères et sœurs,
Il y a trop de choses à dire sur la
Transfiguration de Jésus. Je vais donc simplement attirer votre attention sur quatre
points importants.
Le premier est le sommeil mystérieux qui
s’abat sur Pierre, Jacques et Jean pendant que Jésus est transfiguré. Ce
sommeil est du même type que celui qui s’est abattu sur Abraham en son temps.
C’est une sorte de torpeur, car on demeure conscient de ce qu’il se passe. Ce sommeil
est très spécial puisqu’il annonce le passage ou la présence de Dieu. Il s’agit
d’un effet de l’Esprit Saint. N’oubliez jamais que l’Esprit saint a un côté
pile : c’est un détergent qui purifie le cœur ; et un côté
face : c’est une douce et chaleureuse onction qui guérit et qui soulage.
L’Esprit Saint est aussi lumière : il éblouit et terrorise ceux qui ne
veulent pas voir Dieu et vivent dans les ténèbres, mais il illumine et réjouit
ceux qui aiment Dieu et qui vivent dans la lumière. Ainsi donc, ce sommeil mystérieux
est une purification spirituelle nécessaire aux Apôtres pour qu’ils puissent
voir Jésus illuminé par la puissance de l’Esprit Saint. En fait, ils vivent
quelque chose de la mort avant de pouvoir découvrir quelque chose de la
résurrection. Ils vivent un baptême.
Le second point est la transformation de
Jésus. Comme je viens de le dire, l’Esprit Saint a la faculté d’illuminer ceux
qui aiment Dieu. Et non pas seulement d’illuminer l’âme mais aussi le corps.
Lorsque nous ressusciterons, ce n’est pas seulement notre âme qui ressuscitera,
mais aussi tout notre corps : nous aurons un corps glorieux. C’est la
raison pour laquelle un chrétien respecte son corps jusque dans la mort. Se
faire enterrer avec son corps, c’est porter témoignage de sa foi en la résurrection
de l’âme et du corps. Saint Luc ici parle d’un vêtement éblouissant. Mais il ne
faut pas se tromper. Quand il dit « vêtement » il veut parler du
corps de Jésus. En effet, il écrit en grec et ne veut pas utiliser le mot
« métamorphose » pour parler de la transfiguration de Jésus, car cela
renvoyait, pour les grecs, à des mythes. Saint Luc n’a pas voulu mélanger les
choses. Mais il a bien voulu dire que c’est Jésus tout entier, âme-« visage »
et corps-« vêtement », qui est illuminé par la puissance de l’Esprit.
Maintenant souvenez-vous que lorsqu’une personne est baptisée, elle reçoit un
vêtement blanc. Cela veut dire que par le baptême, elle reçoit aussi cette
puissance de l’Esprit Saint qui va transfigurer son âme et son corps. Être
baptisés, c’est entrer déjà maintenant dans l’espace-temps de la résurrection.
Le troisième point est la voix de Dieu. Cette
voix, nous l’avons déjà entendue lors du baptême de Jésus. Une action de
Dieu – ici la transfiguration de Jésus, ou un baptême – est toujours accompagnée
par une Parole de Dieu. Quand Dieu agit, il parle, ou quand il parle, il agit.
Parce que sa Parole est toujours créatrice. Souvenez-vous : « Et Dieu dit : « que la lumière
soit » ; et la lumière fut ». La Parole créatrice, c’est la
signature de Dieu. Lorsque nous célébrons un sacrement : baptême,
confirmation, eucharistie, mariage, ordination, confession, il y a toujours un
geste et une parole. Ainsi, au baptême, on verse de l’eau sur le baptisé en
disant : « Je te baptise, au nom du Père, et du Fils et du
Saint-Esprit ». Cela veut dire qu’à travers le prêtre – qu’il soit génial
ou qu’il soit nul – c’est toujours Dieu lui-même qui parle et qui agit. C’est
Dieu qui baptise, c’est lui qui consacre le pain et le vin pour qu’il devienne
le Corps et le Sang de Jésus. C’est l’œuvre de l’Esprit Saint qui continue aujourd’hui
l’œuvre créatrice de Dieu.
Lors de la transfiguration, Dieu le Père
dit : « Celui-ci est mon Fils,
celui que j’ai choisi, écoutez-le » : il illumine Jésus et dit
qu’il le remplit de son amour. Au baptême, nous avons reçu le vêtement blanc,
mais aussi une onction d’huile, le saint Chrême, qui signifie l’amour que nous
recevons nous aussi de Dieu, comme Fils et Filles bien-aimés de Dieu.
Le quatrième point, pour finir, concerne la
présence de Moïse et d’Elie. C’est extrêmement important pour nous. Cela veut
dire, d’une part, que cette expérience de Jésus transfiguré a été connue par
Moïse et Elie et qu’ils appartiennent à la communion des saints. Souvenez-vous
de Moïse au Mont Sinaï, et Elie au Mont Horeb. À leur manière, ils ont vécu
exactement ce qu’ont vécu Pierre, Jacques et Jean sur la montagne. Ils ont fait
l’expérience du même Dieu, par la puissance du même Esprit Saint. Le Dieu de
l’Ancien Testament et le Dieu du Nouveau Testament c’est strictement le même.
Mais si des hommes comme Moïse et Elie, comme
Pierre, Jacques et Jean, et même Abraham, ont – par la puissance de l’Esprit
Saint qui les a plongés dans un sommeil mystérieux – pu faire l’expérience de
la gloire de Dieu, alors c’est vrai pour nous aussi. Nous le vivons par le
sacrement du baptême, mais il est aussi des personnes à qui il est donné de le
vivre à leur manière dans une expérience spirituelle. La prière, chers frères
et sœurs, lorsqu’on se laisse guider par l’Esprit Saint sur la montagne, peut
nous conduire à faire l’expérience de la gloire et de l’intimité de Dieu. Et de
découvrir alors qu’on fait partie de la communion des saints. Et c’est une
grâce.