Ex
32,7-11.13-14 ; Ps 50 ; 1Tm 1.12-17 ; Lc 15,1-32
Chers
frères et sœurs,
Que ce soit à travers les histoires de Moïse
ou de saint Paul, à travers les paraboles de la brebis ou de la pièce d’argent
perdues, ou du fils prodigue, l’enseignement du Seigneur est le même. C’est
l’histoire du drame de l’homme perdu, qui peut, avec l’aide de la grâce de
Dieu, être retrouvé.
Au commencement, il y a toujours le don de
Dieu. Pour le peuple hébreu, il y a les promesses d’une terre et d’une descendance,
il y a la libération d’Egypte et le don de la Loi au Sinaï. Pour saint Paul, il
y a dans son cœur cet amour jaloux pour Dieu, et des études très poussées dans
le judaïsme, à l’école d’un des plus grands rabbins de Jérusalem. Pour les
brebis, il y a le fait d’avoir un bon berger qui les guide sur de gras
pâturages – ce berger, c’est bien sûr le Seigneur. La femme, quant à elle, est
propriétaire de dix pièces d’argent : c’est une belle fortune. Et le fils
prodigue, il a ce bonheur d’avoir un père bienveillant qui va accepter de lui
donner sa part d’héritage pour se lancer dans la vie.
Au commencement de toutes ces histoires, il y
a en réalité le rappel que Dieu a créé l’homme à son image et à sa
ressemblance : il y a en l’homme la vocation à vivre éternellement en
communion avec Dieu et avec son prochain. Au commencement, il y a toujours le
don de Dieu.
Mais voilà, dans tous les cas, il y a un
problème. Impatient, le peuple se détourne de Dieu et se met à adorer des
idoles. Au nom d’un amour de Dieu mal compris, Paul se met à exercer la
violence contre les premiers chrétiens et les persécute. Se croyant sans
doute plus maligne que les autres, ou attirée par la gourmandise, une brebis
quitte d’elle-même le troupeau et finalement se perd dans la nature. Par
négligence, la femme égare une de ses pièces d’argent. Et par bêtise, le fils
prodigue dilapide sa fortune dans une vie désordonnée, jusqu’à en mourir de
faim.
La leçon est terrible pour l’homme. Il y a en
lui quelque chose de faussé – qu’on appelle traditionnellement le « péché
originel » - qui ne lui permet pas de répondre à sa vocation. Et quiconque
ignore cet handicap ne se rend pas compte qu’il est attiré vers une fausse
liberté, qui le retourne contre Dieu, et le conduit lui-même à l’auto-destruction.
Combien sont-ils les hommes, et même les baptisés qui, croyant pouvoir vivre
librement sans Dieu, en réalité se retrouvent bientôt à vivre contre lui, tout
en se dégradant eux-mêmes, et leur entourage avec ?
La bonne nouvelle est que le Seigneur connait
cette situation et qu’il n’abandonne pas l’homme à sa dérive. Il se manifeste à
Moïse, à qui il fait part de son ressentiment – et même de sa colère – contre
son peuple ingrat. Il incite Moïse à prier, à intercéder pour le Peuple, et
c’est ainsi que Dieu lui pardonne et lui confirme les promesses. De même, il ne
laisse pas saint Paul s’enfermer dans la spirale de la violence : il se
manifeste à lui sur la route de Damas. Il lui révèle sa miséricorde et le fait
apôtre. Le bon berger n’hésite pas à laisser temporairement ses 99 brebis pour
partir à la recherche de la brebis manquante : c’est pour lui une question
de dignité. S’il l’avait laissée seule, il ne serait plus le bon berger. Or Dieu est le Dieu fidèle
qui pardonne, même les infidélités. De même, la femme n’hésite pas à remuer toute
sa maison pour retrouver sa pièce d’argent : il n’y a plus qu’elle qui
compte à ses yeux. Et le père du Fils prodigue, voyant que celui-ci essaye maladroitement
de revenir à la maison, se précipite vers lui en courant, le couvre de baisers,
et le rétablit dans sa dignité de fils.
Vous voyez que, par son amour, Dieu rétablit
la situation du commencement, soit parce que l’homme perdu le cherche, soit
parce que d’autres hommes prient pour lui, soit parce que Dieu lui-même vient
le chercher. Mais dans tous les cas cet homme ouvre les yeux sur sa situation
de pécheur et, quand il a vu, il remercie Dieu pour sa miséricorde et sa
confiance renouvelée.
Il reste une étape : la dernière. On
voit que le bon berger et la femme rassemblent leurs amis pour faire la fête. Et
le père du fils prodigue organise également une fête. Mais voilà que le frère aîné est jaloux. Il en est resté à l’étape 2 : il ne voit pas, il ne
comprend pas, il se croit juste par lui-même, tout seul. Et il se perd à son
tour. Il faut que le Père lui rappelle son amour qui est de toujours, pour le
calmer, en espérant qu’il comprenne, qu’il accepte, et soit sauvé à son tour.
Chers frères et sœurs, seul l’amour fait voir
la vraie réalité des choses. C’est un amour que nous n’avons pas en nous-mêmes,
mais que nous devons recevoir de la seule vraie source d’amour qui est Dieu. Par
Jésus et par son Esprit Saint, cette source nous est rendue accessible. Il ne
dépend que de nous de vouloir y manger et y boire. Et d’en remercier le
Seigneur. Amen.