dimanche 14 décembre 2025

14 décembre 2025 - PESMES - 3ème dimanche de l'Avent - Année A

 Is 35, 1-6a.10 ; Ps 145 ; Jc 5, 7-10 ; Mt 11, 2-11
 
Chers frères et sœurs,
 
Pouvons-nous mettre notre foi en Jésus ? Telle est la question que les habitants de Galilée et de Judée devaient se poser autrefois ; telle est la question qui se pose à tous les hommes en tous lieux et en tous temps, depuis l’annonce de la Bonne Nouvelle à la Pentecôte. Sur quels appuis solides pouvons-nous nous appuyer pour pouvoir y répondre et confesser notre foi : « Je crois en toi, Seigneur ! » ?
 
Jean-Baptiste a envoyé ses disciples poser cette question à Jésus, mais avec une condition particulière, qui permet à Jésus d’authentifier sa réponse : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » Traduisons : « Es-tu bien le Messie de Dieu ? », la question que tous se posent. Mais il l’exprime en disant : « Es-tu celui qui doit venir ? » Car le Messie de Dieu a déjà été annoncé par les prophètes. Et il n’est vraiment le Messie de Dieu que si et seulement si il correspond aux prophéties le concernant. Le premier critère d’authenticité du Messie de Dieu est les prophéties de l’Ancien Testament. Voilà le premier appui solide sur lequel nous pouvons et nous devons nous appuyer pour pouvoir confesser notre foi : notre foi chrétienne s’enracine dans la foi des prophètes d’Israël.

Jésus a compris la question 5 sur 5 ; il répond : « Les aveugles retrouvent la vue, et les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, et les sourds entendent, les morts ressuscitent, et les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle. » Ces affirmations répondent directement à diverses annonces du prophète Isaïe – nous en avons entendu une en première lecture. Il est capital d’observer que Jésus ne renvoie pas la question à des paroles mais à des actes : les prophéties, pour être validées authentiquement, doivent correspondre à la réalité des faits. Ce qui répond aux prophéties, c’est le témoignage de la réalité de la vie de Jésus, de sa prédication et de ses actes, de sa mort et de sa résurrection, et de l’envoi du Saint-Esprit. Par conséquent, le second appui solide sur lequel nous pouvons et nous devons nous appuyer pour pouvoir confesser notre foi en Jésus, c’est le témoignage des Apôtres : l’Évangile, et son résumé, le Credo. Notre foi chrétienne s’enracine dans le témoignage des Apôtres, lequel répond directement à celui des prophètes.

Ainsi le visage de Jésus que nous sommes appelés à contempler, « la gloire du Seigneur, la splendeur de notre Dieu » comme dit Isaïe, est celui qui nous est annoncé par les prophètes et décrit par les Apôtres. Et c’est tout. Par l’action de l’Esprit Saint, nous sommes amenés chacun selon des modes différents et à des degrés divers à voir dans nos cœurs ou à travers notre prochain le visage du Seigneur. Mais jamais ce visage ne peut être différent de celui qui nous est dessiné par les prophètes et les Apôtres. Si quelque chose ne correspond pas, alors, nous avons encore un peu de chemin à parcourir dans la connaissance de la Parole de Dieu et de sa mise en pratique.
 
En envoyant à Jésus ses disciples – et avec eux les foules qui venaient se faire baptiser au Jourdain – Jean-Baptiste, désigne donc encore une foi Jésus comme « celui qui doit venir », comme « Messie de Dieu » : il accomplit totalement sa vocation prophétique. Tout prophète authentique, habité par l’Esprit de Dieu, ne parle et agit que pour annoncer le Christ, et lui seul.

Mais en retour, Jésus aussi authentifie Jean-Baptiste, et à travers lui tous les prophètes qui l’ont précédé. Non seulement en montrant que les prophéties se réalisent – ce qui est un fait – mais aussi en révélant leur identité profonde : Jean, comme tous les prophètes, est habité comme Élie par l’Esprit de Dieu. 
Jean est-il un roseau agité par le vent – on dirait aujourd’hui une girouette ? Non, Jean était connu pour son intransigeance doctrinale et morale jusque devant les rois. Il le payera de sa vie. 
Jean était-il un homme habillé de manière raffinée ? La question sous-entendrait que Jean ait pu être corrompu, servile, parvenu, ou sensible aux facilités humaines. Non, Jean ne vivait pas dans la  compromission : il était tout entier, âme et corps donné à l’action de l’Esprit Saint en lui : il était un authentique serviteur de Dieu : il était un vrai prophète. 
Jean était-il un prophète, insiste Jésus ? Oui – confirme-t-il, « et bien plus qu’un prophète ». En effet, Jean est appelé « messager », il est élevé à un rang angélique, qui est aussi ici un rôle de prêtre : « J’envoie mon messager en avant de toi » ; pour « préparer le chemin devant toi », c’est-à-dire restaurer, rétablir, accomplir l’obéissance à la Loi : l’amour exclusif de Dieu et du prochain comme soi-même, et présenter cet amour en sacrifice. Souvenez-vous : « Il faut qu’il grandisse et que je diminue. » Jean est en même temps et tout à la fois, prophète, ange et prêtre.

Jésus souligne la grandeur de Jean le Baptiste : « Parmi ceux qui sont nés d’une femme, personne ne s’est levé de plus grand que lui ». Et pourtant, Jésus ajoute : « le plus petit  dans le royaume des Cieux est plus grand que lui. » Et qui est ce « plus petit » ? C’est chacun de nous, qui est baptisé au Nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit, qui a été élevé au rang de prêtre, prophète et roi, devenu enfant et ami de Dieu. Comment ne mettrions-nous pas notre foi en celui qui a tant fait pour nous, hier, aujourd’hui et demain ? Amen.

dimanche 7 décembre 2025

07 décembre 2025 - SAVOYEUX - 2ème dimanche de l'Avent - Année A

 Is 11,1-10 ; Ps 71 ; Rm 15,4-9 ; Mt 3,1-12
 
Chers frères et sœurs,
 
Bienvenue dans le monde des prophètes ! Un prophète, dans notre tradition judéo-chrétienne, est un homme ou une femme, qui est habité par l’Esprit de Dieu et par qui la Parole de Dieu s’adresse aux hommes. Il en est institué témoin et messager.
 
Dans la première lecture, le prophète Isaïe rapporte la vision qu’il a du monde nouveau, que nous appelons le ciel, ou le Royaume des Cieux. Dans ce ciel se trouve le rejeton de David, le juste juge. Il est également dit fidèle, c’est-à-dire qu’il est Dieu. Il n’y a que Dieu qui soit vraiment juste et fidèle. Isaïe dit de lui : « Ce jour-là, la racine de Jessé sera dressée comme un étendard pour les peuples, les nations la chercheront, et la gloire sera sa demeure. » Bien sûr nous savons qu’il s’agit de Jésus, dressé sur l’étendard de la croix, appelant au baptême les hommes de toutes les nations, et demeurant dans la Gloire de Dieu, au ciel.
Dans l’évangile, nous sommes mis en présence de Jean-Baptiste. Ce n’est pas pour lui donner une petite touche d’exotisme que saint Matthieu nous dit qu’il est habillé d’un « vêtement de poil de chameau, avec une ceinture de cuir autour des reins ». Le 2ème livre des Rois nous apprend que le prophète Élie était habillé exactement de la même manière. Le message est très clair, et saint Matthieu le dit explicitement au chapitre 17 de son évangile : saint Jean-Baptiste, c’est Élie de retour. Non pas sa réincarnation, mais avec le même esprit.
En quoi cela est-il important ? Parce que selon le prophète Malachie, Élie doit revenir « avant que vienne le jour du Seigneur, jour grand et redoutable ». Nous comprenons pourquoi Jean-Baptiste proclame avec insistance : « Convertissez-vous, car le royaume des Cieux est tout proche. » Elie-Jean-Baptiste annonce la venue de Jésus, le juste juge et fidèle, qui, sous le signe de la croix, va rassembler toutes les nations dans la demeure de sa Gloire, au Ciel.
 
Pour les juifs de Judée et de Jérusalem, à l’époque, il s’agit donc de se convertir et, pour en manifester l’intention sincère, de se faire baptiser dans l’eau du Jourdain par Jean. Par nature, si je puis dire, les Juifs sont déjà convertis : en vertu de l’Alliance du Dieu fidèle, ils appartiennent au Peuple de Dieu. En quoi doivent-ils se convertir ? Il en est du temps de Jean-Baptiste comme du temps d’Élie, comme de tous les temps ici-bas : il faut renoncer à l’idolâtrie pour revenir à l’amour exclusif de Dieu et du prochain. Quand Jean-Baptiste dit, reprenant une parole prononcée par le prophète Isaïe, « Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers », nous voyons l’image mais n’en comprenons pas vraiment le sens. Pour un juif, il s’agit clairement de l’étude de la Loi de Moïse et de sa mise en pratique. Donc, la conversion attendue pour la venue du Messie, c’est l’abandon des idoles et le retour à la pratique de la Loi de Moïse, et le signe de cette démarche en est le baptême dans le Jourdain. De fait, pour entrer en Terre Promise et monter à Jérusalem, au temps de Josué, il faut d’abord franchir les eaux du Jourdain.
Aujourd’hui, les Juifs attendent toujours le retour d’Élie et les plus pieux sont évidemment très attachés à l’étude de la Loi et à sa mise en pratique, comme à de nombreux bains de purification rituelles.
 
Cependant, Jean-Baptiste a ajouté à son appel à la conversion : « Celui qui vient derrière moi est plus fort que moi, et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu. » « Celui qui vient » est Jésus, nous le savons. Il est « plus fort » que Jean, c’est-à-dire que si Jean est humain, Jésus est divin. Car Celui qui est « fort », c’est Dieu. On comprend pourquoi Jean n’est pas digne de lui retirer ses sandales : Jésus est le Dieu fort. Et c’est lui qui baptisera « dans l’Esprit Saint et le feu ».
Par rapport au judaïsme traditionnel, Jean-Baptiste fait ici une « percée conceptuelle » : le vrai baptême n’est pas dans l’eau du Jourdain, mais « dans l’Esprit Saint et le feu ». Cela veut dire que la Terre Promise et Jérusalem ne sont plus la Terre Sainte matérielle et la ville actuelle de Jérusalem, mais il s’agit du Ciel, du Royaume des Cieux, de la Gloire de Dieu. Josué et Jésus portent exactement le même nom, mais si l’un fait entrer dans une terre, l’autre fait entrer dans le ciel. Le juste Juge, qui est Dieu fidèle, n’est pas un roi de la terre, mais son Trône est dans les cieux. Le baptême n’est plus d’eau seulement, mais il est au « Nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit ». Et le feu, c’est celui du Don de l’Esprit, l’Esprit de Pentecôte qui fait l’Église par la communion de tous. C’est ainsi, d’ailleurs, que les baptisés deviennent eux-mêmes prophètes, par l’Esprit Saint qui habite en eux.
La conversion attendue demeure la même qu’au temps d’Élie, d’Isaïe, de Malachie et de Jean-Baptiste : renoncer aux idoles, aimer Dieu seul et son prochain comme soi-même, et le mettre en pratique. Et, lorsqu’on est baptisé, vivre déjà sur la terre de la vie du ciel, par la communion au Corps et au Sang de Jésus, lui qui est Dieu fort, Dieu juste, Dieu fidèle, hier, aujourd’hui et demain, en attendant son retour, comme il nous l’a promis. Amen. 


dimanche 23 novembre 2025

22-23 novembre 2026 - SEVEUX-VALAY - Notre Seigneur Jésus Christ Roi de l'Univers - Année C

2S 5, 1-3 ; Ps 121 ; Col 1, 12-20 ; Lc 23, 35-43
 
Chers frères et sœurs,
 
La fête de notre Seigneur Jésus Christ Roi de l’Univers nous donne l’occasion de méditer sur notre vocation humaine et chrétienne.
 
Dès le commencement Jésus est « Roi de l’Univers » parce qu’il est le Verbe de Dieu, la Parole de Dieu, par qui tout a été fait. « C’est par lui que tout est venu à l’existence, et rien de ce qui s’est fait ne s’est fait sans lui » a écrit saint Jean :  tout dans l’Univers porte son empreinte. C’est encore plus vrai pour ce qui nous concerne, dès lors que Dieu nous a créés en disant : « Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance. » C’est ainsi que l’homme et tout l’Univers sont pleinement eux-mêmes selon leur vocation, selon le plan de Dieu, lorsqu’ils accueillent le Christ Jésus comme principe existentiel et vital de tout leur être, en reconnaissant Jésus comme « Roi de l’Univers ».
 
Cependant l’homme n’a pas reconnu cette royauté et, dans sa chute, il a entraîné l’Univers dans les ténèbres. Ainsi l’humanité et la création tout entière ont été assujetties au péché et à la mort. Mais, comme le Seigneur notre Dieu est fidèle, il ne nous a pas abandonnés à cet esclavage. En premier lieu, il s’est suscité un peuple prophétique ayant à sa tête un roi, images de l’humanité sauvée ayant Dieu lui-même à sa tête comme roi. C’est ainsi et en second lieu que, réalisant cette promesse, le Verbe de Dieu, la Parole de Dieu, Jésus s’est fait chair en Marie, descendante du roi David. Jésus, vainqueur en sa Passion et sa résurrection des tentations et de la mort dans lesquels Adam était tombé, fut élevé au ciel et reconnu « Seigneur ». En lui l’humanité et la création ont été, non seulement libérées, mais aussi recréées comme humanité et création nouvelles. C’est ainsi que le peuple prophétique annonçait l’Église, peuple nouveau dont la constitution n’est pas terrestre mais céleste et dont le chef hier, aujourd’hui et demain est toujours l’unique et même Seigneur Jésus-Christ, le « Roi de l’Univers ».
Cette royauté, ou plutôt ce règne de Jésus s’applique déjà pour nous, baptisés, qui sommes encore en pèlerinage dans ce monde, au plan social et au plan individuel.
 
Au plan social, nous devons distinguer ce qui est de l’ordre terrestre, ce qui est « à César », et ce qui est de l’ordre céleste, ce qui est « à Dieu ». Avez-vous remarqué, dans l’évangile de ce jour, que Jésus est interpellé par trois fois de la même manière : « Sauve-toi toi-même ! », d’abord par les chefs d’Israël, ensuite par les soldats romains, et enfin par le mauvais larron. Ces trois tentations de Jésus rappellent celles qu’il avait déjà vaincues au désert. Ici, tentations de se proclamer lui-même Messie, Roi et Christ en désobéissant à la volonté de son Père, contre tentations de changer les pierres en pains, de régner sur tous les royaumes de la terre en adorant Satan, et de se jeter au bas du Temple en mettant Dieu en demeure de le sauver. Jésus a été tenté de régner dans l’ordre terrestre, au prix de trahir son Père au profit de Satan. Mais il a choisi de boire la coupe de sa Passion : il a fait la volonté de son Père, et c’est ainsi qu’il a reçu de lui le règne véritable, dans l’ordre céleste.

De la même manière que Jésus, nous baptisés, nous sommes tentés de faire du règne céleste du Christ un règne terrestre. Lorsque nous luttons pour un monde « plus juste et plus fraternel », un monde « de justice et de paix », ou bien pour le « règne du Christ » dans le monde, de quoi parlons-nous ? Si il s’agit d’une justice et d’une fraternité humaine aux prix de compromissions morales et du sacrifice de la vérité de l’Évangile ; si il s’agit d’arrangements diplomatiques et d’une paix fondée sur des intérêts particuliers ; si il s’agit d’une chrétienté politique niant toute liberté de conscience, alors nous faisons fausse route. Car le règne de Dieu n’est juste qu’en sainteté, fraternel qu’en communion dans l’amour de Dieu ; il n’est règne de paix que de la Paix de l’Esprit Saint qui vient de Dieu seul. Le Règne du Christ pour nous se manifeste dans l’écoute et l’obéissance à la Parole de Dieu, dans l’amour de Dieu et du prochain, dans la célébration des mystères du ciel, les sacrements, surtout l’Eucharistie. L’Église est donc pour nous ici-bas le règne de Dieu, dans l’attente de sa transfiguration totale dans la Gloire.
 
Pour finir, et j’en viens au plan individuel, le Règne de Dieu n’est pas seulement extérieur à nous : il nous est aussi intérieur. Il rejoint notre vocation intime : l’amour que Dieu nous porte, l’amour auquel il nous invite, dans une vie sainte. Le Seigneur Jésus veut régner en nos cœurs ; il veut habiter en nous comme Dieu demeure dans son Temple. Pour cela, il a besoin de nous : que nous soyons comme une petite Église personnelle, nourris par sa Parole et ses sacrements, adorant Dieu seul et soignant notre prochain ; et que nous chassions les marchands du Temple, nos gros péchés et nos petites manies, tout ce qui s’oppose à sa volonté. Ce Règne de Dieu n’est pas inaccessible, comme dit le Seigneur à ses fils bien-aimés : « Elle est tout près de toi, cette Parole, elle est dans ta bouche et dans ton cœur, afin que tu la mettes en pratique. » 

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