Dn
12, 1-3 ; Ps 15 ; He 10, 11-14.18 ; Mc 13, 24-32
Chers
frères et sœurs,
Nous
arrivons à la fin de l’année liturgique, qui est un résumé de l’histoire de
l’univers. Cette histoire avait débuté au commencement – la Genèse du monde et
de l’homme ; la chute d’Adam et Eve ; l’espérance d’un Sauveur. Elle
avait continué par l’histoire de ce Sauveur, Jésus, de sa naissance à sa
résurrection, et son ascension ; et elle se termine par l’Apocalypse : le
jugement de l’univers et la venue du Seigneur en gloire, dans la communion des
saints. Aujourd’hui, Jésus enseigne à ses disciples ce qu’il en sera du jour de
sa venue.
Ces
derniers temps, il se tenait dans le temple. Il y avait débattu avec les
autorités d’Israël sur la manière de porter du fruit pour Dieu, en aimant Dieu
et son prochain, en donnant toute sa vie pour eux. Maintenant, Jésus est sorti
du temple et on lui a fait remarquer combien celui-ci était beau,
impressionnant. De fait, à l’époque, le temple de Jérusalem est le plus grand
temple du monde. Et l’on vient de partout pour les grandes fêtes, notamment
pour Pâques. C’est un lieu de pèlerinage considérable.
Or
Jésus indique à ses disciples que de ce temple, il ne restera pas pierre sur
pierre. Ceux-ci sont interloqués, et ils lui demandent quand et comment cela
arrivera. Et Jésus de leur répondre en évoquant des rumeurs de guerre, des faux
messies, des persécutions, des trahisons dans les familles, tandis que
l’Évangile sera porté à toutes les nations. À un moment « l’Abomination
de la désolation sera installée là où elle ne doit pas être » – c’est
un peu mystérieux – et il faudra fuir aussitôt dans les montagnes, sans rien
emporter, sans se retourner. Ce sera un moment de grande détresse, où surgiront
de faux messies, de faux prophètes, pour égarer les élus, c’est-à-dire les
baptisés.
Et
nous arrivons à l’évangile de ce dimanche. L’enseignement de Jésus est presque
mot pour mot un condensé de l’Ancien Testament, où l’on retrouve des citations
de nombreux prophètes : Joël, Isaïe, Ézéchiel, Daniel, Zacharie, Amos,
Sophonie… Quand Jésus parle, ses auditeurs voient remonter dans leur esprit
tout leur catéchisme en quelque sorte. Jésus n’invente rien : il explique
que ces « jours-là », annoncés par les prophètes vont se réaliser.
Il
y a deux manières de concevoir cette réalisation. La première est tout
simplement la mort, la résurrection et la glorification de Jésus : sa
Pâque. La seconde est la fin du monde elle-même, à la fin des temps, la
naissance du monde nouveau. Mais la Pâque de Jésus renvoie à la fin des temps :
elles s’expliquent l’une par l’autre.
Pour
la Pâque, il faut se souvenir que, dans Ézéchiel, quand il est question de
l’obscurcissement du soleil et de la lune, il s’agit d’une complainte adressée
au Pharaon d’Égypte où le fils de l’homme lui annonce sa destitution et sa
perte. Et vous vous souvenez qu’au moment où Jésus meurt en croix, il y a une
éclipse de soleil et l’on entre dans la nuit. Pâque a lieu durant la nuit. Les
étoiles qui tombent du ciel et les puissances célestes qui sont ébranlées, ce
sont Pharaon et ses armées, mais ce sont aussi Satan et ses anges, les démons,
qui sont vaincus et chassés des cieux.
Voilà
ce que dit Jésus : de même que Pharaon et son armée ont été vaincus dans
la nuit de Pâque, de même le Fils de l’homme – c’est-à-dire lui-même – va
vaincre Satan et ses anges dans ce moment de grande détresse où le soleil est
obscurci et où la lune ne donne plus sa clarté. Cela, Jésus le fait lors de sa
propre Pâque, et notamment durant son Ascension au ciel, tandis que les Apôtres
sont perclus de peur, au Cénacle.
Et
justement, « on verra le Fils de l’homme venir dans les nuées avec
grande puissance et avec gloire ». C’est la vision de Jésus
ressuscité, dont le corps n’obéit plus aux lois physiques de la création, et
qui se présente comme un corps de communion. La gloire de Dieu, c’est la
communion des saints, dans la paix, la joie et la lumière. Voir Jésus
ressuscité, vainqueur de la mort, c’est constater qu’il a vaincu le Pharaon de
ce monde. Alors « il enverra ses anges pour rassembler ses élus des
quatre vents » : en effet, c’est la Pentecôte où Jésus envoie ses
apôtres, ses disciples, évangéliser par toute la terre, pour rassembler les
élus – les baptisés – en un seul peuple, dans sa communion, dans sa gloire.
Nous
voyons bien que Jésus voit au-delà du temple matériel qu’il a sous les yeux, car
il pense toujours au temple de son corps : le jour de détresse, c’est le
jour de sa Pâque, la Pâque qui conduit à la Pentecôte. C’est ainsi que Jésus
peut facilement dire que « cette génération ne passera pas avant que
tout cela n’arrive », puisqu’en effet, la Pâque de Jésus est toute
proche.
Cependant, ce que dit Jésus peut aussi s’appliquer à la fin du monde en tant
que tel. Dans ce cas, le temple qui sera détruit, le corps de Jésus qui sera
défait avant d’être relevé transfiguré, c’est l’Église. Le corps n’échappera
pas au sort qui est celui de la tête, et les tribulations que vivront les élus
seront terribles. Mais le Seigneur frappera à la porte à l’improviste, comme
l’époux du Cantique des Cantiques frappe lui-même à la porte de sa
bien-aimée, pour lui porter son amour. C’est pourquoi Jésus insistera tellement
pour que les élus, les baptisés, demeurent éveillés pour attendre sa venue, comme
un époux qui vient dans la nuit, car alors il sera leur délivrance et leur vie.
C’est la Pâque, hier, aujourd’hui et demain. Dieu est toujours le Dieu de la vie.