Ap
11, 19a ; 12, 1-6a.10ab ; Ps 44 ; 1 Co 15, 20-27a ; Lc 1, 39-56
Chers
frères et sœurs,
L’Apocalypse
de saint Jean est un texte curieux, rempli d’images et de symboles. Pour
une grande partie des gens, il annonce l’avenir de manière prophétique. Mais en
réalité, il est plutôt un moyen crypté, compréhensible pour les chrétiens,
incompréhensible pour les autres, pour évoquer et comprendre les difficultés,
c’est-à-dire les persécutions du temps présent, à l’époque où vivait saint
Jean.
Notre
lecture commence de manière assez grandiose par l’ouverture du sanctuaire de
Dieu, qui est dans le ciel, avec l’apparition de l’Arche d’Alliance. Nous
devons savoir tout d’abord, que pour saint Jean la réalité est composée de la
Terre – l’univers dans lequel nous vivons – et du Ciel, qui est le domaine de
Dieu. Le temple de Jérusalem, comme toute église traditionnelle, a été configuré selon cette distinction. Dans
la première partie, la terre, se trouvent habituellement les prêtres, le grand
candélabre, l’encens et les offrandes de pain. Derrière le rideau, dans la
seconde partie appelée « Saint des Saints », le ciel, se trouve l’Arche
d’Alliance qui contient les Tables de la Loi et sur laquelle repose la Présence
de Dieu. Dans cette deuxième partie, seul le Grand Prêtre peut rentrer une fois
par an pour la prière du Grand Pardon.
Justement,
la vision de saint Jean, qui est un homme de la terre, n’est possible que par
l’ouverture du rideau qui lui permet d’apercevoir l’Arche qui se trouve dans le
sanctuaire du ciel. Cette ouverture ne se fait pas par hasard, mais sur la
prière de louange des vingt-quatre anciens qui se trouvent devant le trône de
Dieu, qui sont les vingt-quatre prophètes de l’Ancien Testament, en comptant
parmi eux saint Jean-Baptiste. Ils rendent gloire à Dieu parce qu’il a décidé
que l’heure de la Rédemption de l’humanité – l’heure de Jésus – était venue. Ces
vingt-quatre anciens agissent donc comme des prêtres.
Ils
voient donc, et saint Jean avec eux, l’Arche d’Alliance. Or saint Jean nous dit
que cette Arche, c’est la bienheureuse Vierge Marie. De même que l’Arche qui se
trouvait dans le Temple contenait les Tables de la Loi ; de même la Vierge
Marie contient en son sein Jésus, la Parole de Dieu, source et accomplissement
de la Loi. Sur l’Arche reposait la Présence de Dieu ; sur Marie repose
l’Ombre de l’Esprit Saint, comme l’Ange Gabriel le lui a dit lors de
l’Annonciation.
Nous
voyons ensuite cette Vierge magnifique, comme était l’Arche d’Alliance, donner
naissance à un enfant, qui est donc Jésus. C’est le mystère de Noël. Le Dragon
qui veut dévorer l’enfant, humainement c’est Hérode, mais c’est surtout le
Satan qui veut absolument empêcher Jésus de réussir sa mission.
Ce
Dragon est fascinant : sur ses sept têtes se trouvent des diadèmes précieux. Ce
sont les symboles de sa puissance. Le mal, de manière multiple, est puissant et
attirant. Le dragon balaye le ciel et fait tomber le tiers des étoiles. Les
étoiles sont les fils et les filles de Dieu. Chacun est libre de ses choix :
être avec Jésus ou bien se soumettre, se livrer, aux puissances fascinantes du
démon, et chuter.
Très
vite saint Jean passe sur la vie de Jésus et même sur sa mort et sa
résurrection. Il évoque seulement son Ascension au ciel : « L’enfant fut
enlevé jusqu’auprès de Dieu et de son trône. » Ce que saint Jean veut
nous enseigner, en effet, concerne plutôt ce qui se passe à ce moment et ensuite.
Rappelons-nous ici, en passant, que seul celui qui peut entrer dans le
sanctuaire du Temple est le Grand Prêtre, pour le rituel du Grand Pardon. Ainsi,
lors de son Ascension au ciel, où il entre dans la gloire de Dieu, Jésus est le
Grand Prêtre véritable.
Ici
le texte de notre lecture est malheureusement coupé et, pour comprendre, il
faut le lire en entier dans notre Bible. Nous apprenons alors que, pendant que
la Femme – la Sainte Vierge Marie – s’enfuit au désert, le lieu où se réfugient
habituellement les gens qui sont persécutés, il y a un immense combat dans le
Ciel entre Saint Michel et le Dragon. Entre les anges et les démons. Mais le
Satan est vaincu, c’est-à-dire que dans son Ascension au Ciel, accompagné de
tous les anges, Jésus a vaincu non seulement le péché et la mort, mais surtout
leur racine : le Diable et ses démons. Et c’est pourquoi, Jésus ayant rempli
entièrement sa mission, on entend dans le ciel la voix forte qui
proclame : « Maintenant, voici le salut, la puissance et le règne
de notre Dieu, voici le pouvoir de son Christ. » Ce moment, c’est celui de
la Pentecôte : le Démon est vaincu et l’Esprit Saint est répandu sur le monde. Ainsi
le Grand Pardon est accordé par Dieu à Adam et à sa descendance, à toute
l’humanité, à nous tous.
Mais
que devient la Bienheureuse Vierge Marie ? Il faut continuer notre lecture
dans la Bible. Le Dragon et ses démons, comme Adam autrefois, sont jetés hors
du Ciel et chutent à leur tour sur la terre. Ils se lancent alors à la
poursuite de la Femme. Saint Jean dit qu’elle est protégée par les ailes d’un
grand aigle, c’est-à-dire par lui, comme Jésus le lui a demandé sur la croix.
Et faute d’avoir pu la rattraper par ses puissances de mort, le Dragon et ses
démons finissent par se retourner contre le reste des enfants de la Femme,
c’est-à-dire contre les chrétiens, contre nous : « ceux qui
obéissent aux ordres de Dieu et qui possèdent le témoignage de Jésus ».
Ainsi s’expliquent les persécutions.
Voilà
donc ce qui se trouve dans notre lecture de l’Apocalypse. Retenons que Marie
est l’Arche d’Alliance qui contient la Parole de Dieu et sur qui repose
l’Esprit du Seigneur. Retenons aussi que quand le Diable renonce à s’attaquer à
elle, il se reporte sur nous. Mais qu’avons-nous à craindre ? Il a été
vaincu par la prière de Jésus, par Saint Michel et ses anges, et jamais il n’a
pu porter atteinte à la Vierge Marie. Si nous nous cachons dans le manteau de
notre Reine du Ciel, nous ne craignons rien.