Gn 18, 20-32 ; Ps
137 ; Col 2,12-14 ; Lc 11,1-13
Chers frères et sœurs,
Nous sommes toujours inquiets de savoir si nous
prions comme il faut et si notre prière est efficace. N’est-ce pas le même
souci qui habite le disciple qui interroge Jésus : « Seigneur,
apprends-nous à prier » ?
Jésus répond très simplement à cette demande.
Il n’y a pas de secret dans la prière, c’est quelque chose de très
naturel et très direct : il suffit de s’adresser à notre Père qui est aux
cieux, et de lui faire part de nos demandes vitales.
La plus vitale de nos demandes est qu’il
réalise la promesse qu’il nous a fait connaître, par le prophète
Ézéchiel : « Je montrerai ma grandeur, je manifesterai ma
sainteté, je me ferai connaître aux yeux de nombreuses nations. Alors elles
sauront que Je suis le Seigneur ». Cette promesse est essentielle car
elle annonce que le Règne de Dieu arrivera quand l’Esprit Saint aura été
répandu dans le cœur des hommes de toutes les nations, qu’ils connaîtront le
cœur de Dieu, qu’ils verront sa gloire et seront illuminés par elle, qu’ils seront
revêtus de sa sainteté, qu’ils vivront heureux dans son amour, et que toute la
création sera renouvelée. Autrement dit, si nous avons l’Esprit Saint, nous avons
tout.
Or, la prière qui consiste à s’adresser à Dieu
pour lui demander de réaliser cette promesse est très ancienne. Elle s’appelle
en hébreu le « Kaddish ». Tous les rabbins la récitent après avoir
commenté les Écritures, ainsi que leurs disciples, et c’est encore vrai aujourd’hui.
Voici la prière du Kaddish :
« Que soit
magnifié et sanctifié le grand Nom dans le monde qu’il a créé selon sa volonté
; et qu’il établisse son règne de votre vivant, et de vos jours et du vivant de
toute la maison d’Israël, bientôt et dans un temps proche. Que son grand Nom
soit béni à jamais et d’éternité en éternité !
Que soit
béni et célébré, glorifié et exalté, élevé et honoré, magnifié et loué, le Nom
du Saint, béni soit-il ! Lui qui est au-dessus de toute bénédiction et de tout
cantique, de toute louange et de toute consolation qui sont proférées dans le
monde.
Que les
prières et supplications de tout Israël soient accueillies par leur Père qui
est aux cieux.
Que la
plénitude de la paix nous vienne des cieux, ainsi que la vie, pour nous et pour
tout Israël.
Que Celui
qui établit la paix dans les hauteurs l’établisse sur nous et sur tout Israël.
Amen ».
Nous voyons bien qu’il y a des différences avec
le Notre-Père, mais nous voyons aussi qu’il y a une grande parenté avec lui. Ainsi,
quand Jésus enseigne le Notre-Père à ses disciples, il leur enseigne son « Kaddish »
pour prier son Père de réaliser sa promesse : celle de l’envoi de l’Esprit
Saint pour renouveler le monde et nous-mêmes, afin que son Nom soit glorifié.
Jésus nous indique donc ce qu’il faut demander
à Dieu et comment le faire. La question de savoir si cela est efficace demeure.
Jésus répond à cette interrogation par une parabole : l’homme qui vient la
nuit pour demander du pain à son ami, c’est nous tous qui venons déranger notre
Père et toute sa maisonnée – les saints et les anges – quand nous sommes dans
les ténèbres et que nous avons besoin de quelque chose de vital. Il est très
remarquable que Jésus situe cette histoire dans la nuit. Il est en effet une
particularité des chrétiens de prier la nuit, en veillant, en attendant que la
lumière de la Résurrection vienne sur nous. Et Jésus nous dit que cette prière persévérante
est toujours entendue.
Il est aussi un autre aspect de la prière,
illustré par l’histoire d’Abraham. Celui-ci intercède pour les habitants de
Sodome, qui sont de grands pécheurs. Nous observons qu’Abraham tout seul
parvient à négocier le salut de la ville pourvu que le Seigneur y trouve
beaucoup, puis un certain nombre, et finalement quelques justes. Cela veut dire
d’une part que la prière est puissante : un seul priant peut obtenir
beaucoup d’attention de la part de Dieu. D’autre part, il suffit d’être
quelques justes pour compenser l’effet d’une multitude de pécheurs. Être juste
et priant, c’est être un paratonnerre pour beaucoup de monde. Non pas que Dieu
serait un Dieu vengeur, mais c’est que pour exercer sa justice avec
miséricorde, Dieu a besoin de notre prière. Sinon, pourquoi aurait-il accepté
de négocier avec Abraham, pourquoi lui aurait-il fait part de son
dessein ?
Dieu nous fait l’honneur de participer, par notre prière, à sa justice et à sa miséricorde dans le monde. Il nous prie aussi de lui demander l’essentiel pour le salut du monde, à savoir l’envoi de l’Esprit Saint.
Dieu nous fait l’honneur de participer, par notre prière, à sa justice et à sa miséricorde dans le monde. Il nous prie aussi de lui demander l’essentiel pour le salut du monde, à savoir l’envoi de l’Esprit Saint.
La prière a-t-elle un effet ? Lorsque
l’Esprit Saint fut répandu sur les Apôtres à la Pentecôte et que l’Église a
commencé son action dans le monde, au service de Dieu et du prochain, alors la
promesse du Seigneur a commencé à se réaliser. Nous en sommes nous-mêmes la
preuve physique, par notre communion aujourd’hui, ici-même, au Corps et au Sang
de Jésus.